Auteur : L'ange gardien

Disclaimer Bon allez, une tite séance de rappel : Tous à moi ! : )

Mel : Je répondrai même pas à ça !

L'ange gardien : Pfff, mauvais joueur…

Mel : # tire la langue #

L'ange gardien : # fait une grimace #

Mel : # louche et se met un doigt dans l'oreille #

Lena : Comme vous pouvez le constater, ça s'arrange pas…

Genre : Romances yaoi et hétéro, mignon.

Note : Bon, je sais que c'est une fête qui n'est pas forcément très appréciée, et d'autant plus quand on est célibataire (j'ai fondé le club des pauvres abandonnés, ça vous intéresse ?), mah avec ma bande zigotos, je pouvais pas la laisser passer ! Alors voilà, un autre petit extra ! En avance d'un jour pasque je pars pour la semaine dans une contrée dépourvue d'Internet !

Super Saint-Valentin

Les mains croisées sous son menton, les coudes appuyés sur son bureau, Cyril retint difficilement un fou rire. Dans le silence studieux de la classe, il aurait été du plus mauvais effet… Tous les élèves avaient le nez dans leurs livres de mathématiques, torturant leurs neurones pour trouver les réponses aux exercices tordus de leur cher professeur de mathématiques…

En réalité tous l'adoraient. Malgré la sévérité de ses notes et la difficulté de ses contrôles, il avait toujours une plaisanterie aux lèvres, un sourire très doux et désarmant qui vous retirait toute envie de vous opposer à lui. Puis si vous le décidiez vraiment, la froideur de sa voix et la glace de ses yeux suffisait à vous calmer… Il n'était pas seulement un bon professeur mais aussi un homme, parfois presque un ami. Et c'était rassurant lorsque l'on voyait la faune qui peuplait les lycées…

En attendant, le respectable professeur redevenait à cet instant un véritable gamin de 17 ans devant le manège de deux de ses élèves. Cela faisait déjà dix minutes qu'ils s'échangeaient des petits messages par voisins interposés, inconscients de leur manque de discrétion. Et à voir la rougeur de leurs joues à tous les deux ainsi que le sourire qui pointait sur leurs lèvres, c'était loin d'être des insultes…

La jeune fille brune griffonna rapidement quelque chose sur une feuille blanche qu'elle roula en boule avant de la glisser à sa voisine qui la fit passer. Se sentant observée, elle releva la tête pour croiser le regard pétillant de son professeur. Elle se sentit aussitôt rougir, prise en flagrant délit de flirt et de non assiduité en même temps… Dans un instant il allait se lever, darder sur elle un regard glacial, la réprimander de sa voix plus froide que la banquise et s'emparer du papier…

A sa grande surprise, il se contenta de lui faire un clin d'œil assorti d'un sourire en coin avant de passer à un autre élève. Elle en resta presque la bouche ouverte à la fixer. Quel professeur tolérait des échanges de courrier pendant son cours ? Et en souriait même ? Décidément, il passait son temps à les étonner… Si elle avait su ce qui se passait dans la tête du jeune homme…

You know our love was meant to be

La sonnerie retentit, aussitôt suivie d'un claquement presque synchrone de livres qu'on referme. Mais au lieu de filer aussi vite que possible, tous les élèves relevèrent la tête vers leur professeur. Il avait été très clair en début d'année, insistant sur le fait que c'était lui qui donnait le signal de sortie et non la cloche, leur promettant avec un sourire de faire de son mieux pour être d'accord avec elle. Les seuls élèves à avoir voulu transgresser cette règle la première heure s'étaient aussitôt rassis et n'avaient plus jamais recommencé…

La porte s'ouvrit malgré l'immobilisme des élèves pour laisser apparaître un jeune homme blond qui s'appuya au chambranle, un sourire amusé aux lèvres qui se reflétait jusque dans ses yeux gris. Les adolescents adressèrent un sourire à leur professeur d'anglais avant de se tourner à nouveau vers Cyril.

-Allez, filez, fit celui-ci avec un sourire amusé.

Aussitôt les élèves s'enfuirent comme une envolée d'oiseaux aux chants de rire, excepté la jeune fille brune qui resta un instant pour discuter avec le jeune homme. Intéressé, Hiroki la regarda rougir tandis que Cyril éclatait de rire avant de se rendre compte comme elle sortait qu'une dizaine de filles ne pouvaient se résoudre à partir, dévorant des yeux Cyril qui s'approchait maintenant de lui. Il n'était même pas sûr que le blond avait remarqué les regards posés sur lui…

-Salut beau blond ! fit Cyril en s'asseyant sur un bureau comme Hiroki se postait devant lui. Toujours en vie ?

-Comme tu vois, répondit son ami avec un sourire. Dis, tu devrais peut-être informer ton fan-club qu'à la récréation, généralement, on descend dans la cour…

Cyril tourna la tête pour voir les adolescentes massées devant la porte. Elles rougirent aussitôt et s'échappèrent dans les escaliers. Le jeune homme haussa un sourcil et tourna un regard interrogateur vers son ami qui ne put retenir un fou rire.

-Tu les fais craquer, mon vieux ! s'exclama-t-il en secouant la tête. Enfin, tu dois bien avoir remarqué qu'elles passent leur temps à te dévorer des yeux, non ? T'es en danger au milieu de tous ces adolescents, Cyril ! Tu devrais peut-être leur dire que tu as déjà été capturé…

Cyril rougit violemment et tira la langue à Hiroki. Non, il n'avait pas remarqué… C'était le genre de choses auxquelles il ne prêtait pas la moindre attention, et il en était toujours le premier étonné… Heureusement que Yann n'était pas au courant…

-Tu peux parler, le beau professeur d'anglais ! contre-attaqua-t-il. Rappelle-moi le nombre de filles qui viennent en cours de soutien mais qui bizarrement au bout de cinq mois n'ont toujours pas fait le moindre progrès en anglais ?

-Un point pour toi, reconnut Hiroki en riant. Mais moi, Lena est au courant et elle réaffirme sa possession régulièrement en venant me chercher… Au fait, qu'est-ce qu'elle voulait Ariane tout à l'heure ? Te faire une déclaration d'amour enflammée ?

-Crétin, répondit Cyril en secouant la tête. Non, je l'ai juste surprise tout à l'heure en train d'échanger des mots doux avec son petit copain Ethan et elle s'étonnait que je n'aie rien dit…

Hiroki haussa un sourcil et posa une main sur le front de son ami avant de lui tirer la paupière pour examiner son œil puis de prendre son pouls d'un air très concentré.

-Arrête, se dégagea Cyril en riant, je ne suis pas malade. C'est juste… Je les trouvais mignons et puis on est le 14 février, alors…

Hiroki éclata de rire et entoura les épaules de son ami de son bras pour l'entraîner vers la porte.

-Espèce d'incorrigible romantique, va ! fit-il en secouant la tête.

Cyril joignit son rire au sien et ils entreprirent de faire la course dans les escaliers pour rejoindre la machine à café/chocolat. Ce n'était pas parce qu'ils étaient censés être de respectables professeurs qu'ils allaient se priver du plaisir d'être des gamins…

The kind of love that lasts forever

Appuyé au mur près de la porte entrouverte, Cyril ne put empêcher un sourire de naître sur ses lèvres en écoutant son ami. Il passait son dernier cours de la journée en soutien, et apparemment la remarque du blond prenait tout son sens… Aucune des trois filles qu'il avait interrogées jusqu'ici n'avaient pas été capable de lui baragouiner quoique ce soit de correct… Cyril imaginait très bien les yeux de son ami s'écarquiller et se lever au ciel dans la plus grande discrétion devant l'élève rougissante !

-D'accord, fit la voix d'Hiroki. Alex, can you tell me, please or I'll be going mad, what this very kind and gentle dolphin wants to do out of the sea ? (1)

Ah nan, mauvais choix... Cyril eut un sourire ironique et ne put s'empêcher de passer la tête par l'embrasure de la porte pour voir un jeune homme brun aux grands yeux bleus fixer son ami d'un air très gêné. Visiblement, il était loin de connaître la réponse vu que lui non plus n'avait rien écouté de l'histoire du gentil petit dauphin qui voulait devenir humain. Par contre le blond aurait juré qu'il connaissait par cœur chaque trait du visage d'Hiroki…

Il laissa échapper un léger rire, s'attirant un regard faussement courroucé de son ami et toute l'attention des élèves.

-Tu sais que tu perturbes mon cours, là ? fit le métis en croisant les bras et en penchant la tête sur le côté.

C'est mignon, il a même chopé les attitudes de Lena ! Le blond posa un regard attendri sur son ami et s'assit sur un bureau du premier rang en s'adossant au mur.

-Petit un, ça va bientôt sonner, fit-il avec un grand sourire innocent, et petit deux, vu la concentration de tes élèves, moi j'appelle pas ça un cours mais du masochisme !

Sous le regard ébahi des adolescents, Hiroki se contenta de lui tirer la langue tandis que son ami éclatait de rire. Des professeurs, ça ? Des gamins pareils ? Ils étaient encore pires qu'eux ! La voix du métis les ramena sur terre, coupant court à leurs avalages de mouches.

-Allez, on arrête là pour aujourd'hui, capitula Hiroki. Fêtez le 14 février et revenez plus attentifs !

Les élèves ne se le firent pas dire deux fois et s'empressèrent de ranger leurs affaires tandis que Cyril s'approchait d'Hiroki occupé à se battre avec la fermeture de son sac. Un petit groupe s'arrêta à la porte pour voir le professeur de maths s'emparer du sac en riant pour l'ouvrir d'un coup sec. Le métis se contenta de lui ébouriffer les cheveux ce pourquoi il récolta un coup dans l'épaule.

-Tu crois qu'ils sont ensemble ? murmura Alex à son amie Ariane.

La jeune fille haussa les épaules et secoua la tête.

-Non, Mr Atan est marié. Par contre, je ne sais pas pour Mr Léonne…

-Pris aussi ! signala la voix d'Hiroki dans le silence qu'aucun des deux élèves n'avait noté. Si vous pouviez faire passer le mot, certains et certaines seraient peut-être plus attentifs en cours…

-Remarque, fit Cyril, ils sont au courant pour toi mais ça n'évite pas le même schéma…

-T'as fini de casser ma baraque ? répliqua Hiroki d'un air ennuyé.

Cyril fit mine de réfléchir un court instant avant de répondre avec un grand sourire parfaitement crétin.

-Nan !

C'en fut trop pour Alex et Ariane qui s'enfuirent, rouges comme des tomates, laissant leurs deux respectables professeurs se chamailler comme des gamins. Cyril partit dans un grand éclat de rire qui résonna dans la salle vide, gagnant bientôt Hiroki. Le surveillant qui passait par là ne leva même plus un sourcil en signe d'étonnement. Depuis qu'ils avaient été mutés ici, tous les deux, toutes les salles résonnaient des échos de leur rire…

-N'empêche, fit Cyril comme ils remontaient l'allée pour sortir du lycée, tu fais exprès de choisir ceux qui ne peuvent pas te répondre ! Mélina, Pauline, Alex… Comment veux-tu qu'ils sachent quoi que ce soit quand ton gentil petit dauphin leur passe très haut au-dessus de la tête !

-Quoi, Alex aussi ? s'exclama Hiroki.

Cyril hocha la tête et ne put s'empêcher d'éclater de rire devant l'expression abasourdie qu'affichait son ami. C'est vrai que se rendre compte qu'une bonne partie de vos élèves était plus intéressée par le professeur que par le cours était un peu déstabilisant… Heureusement pour eux, jusqu'ici, aucun n'avait cherché à pousser plus loin. Ils se rendraient bien compte avec le temps que ceux qui les entouraient étaient bien mieux que des professeurs inaccessibles…

-Arrête de rire ou je raconte tout à Yann ! menaça Hiroki.

-Ah non ! protesta Cyril. Il me laisserait même plus venir en cours, à moins de porter sur moi un long drap opaque triplement cadenassé et annonçant en rouge fluo ''chasse gardée'' !

-A propos de Yann, fit le métis en riant, vous avez prévu quelque chose ce soir ?

Le rire de Cyril mourut doucement et son sourire se fit plus mélancolique. Il haussa les épaules en posant sur son ami un regard un peu triste.

-Non, rien du tout, murmura-t-il. Ça fait deux semaines que je le voie à peine tellement c'est le tourbillon de folie à l'agence. Ils ont je ne sais pas combien de concours à rendre en même temps, alors il bosse comme un dingue et rentre très tard.

Hiroki passa un bras autour des épaules de son ami pour le réconforter. Visiblement l'absence de Yann lui faisait plus mal qu'il ne voulait le montrer. Surtout aujourd'hui… Cette journée avait beau être pour certains une tradition idiote et purement commerciale, jamais les différents couples de leur groupe d'amis n'avait omis de la fêter. Alors si déjà se retrouver seul tous les soirs depuis quinze jours n'avait rien de drôle, ce soir ce serait pire…

-Tu peux venir à la maison, tu sais, fit le métis comme ils s'arrêtaient à l'embranchement de rues séparant leurs chemins. Lena serait ravie de te voir !

-Non, merci, répondit Cyril en secouant la tête avec un sourire. C'est votre soirée à tous les deux et puis ne t'inquiète pas, je vais survivre ! Allez, va retrouver ta femme et embrasse-la pour moi !

Hiroki ouvrit la bouche pour répliquer mais l'expression de son ami l'en dissuada. Il se contenta de le prendre dans ses bras pour une courte étreinte avant de se reculer en lui ébouriffant les cheveux.

-D'accord, crétin, fit-il avec un grand sourire.

Il s'éloigna après un dernier geste de la main, se retournant juste pour voir le dos de son ami disparaître à un angle. Yann, il est temps de redresser la barre…

And I want you here with me

Cyril entra dans la maison silencieuse et manqua de tomber avec Engel qui ne cessait de se frotter à ses jambes.

-Salut le chat, fit-il en le prenant dans ses bras. Tu n'as pas eu de nouvelles de ton maître, par hasard ?

Le félin se contenta de ronronner sous les caresses de la main qui passait et repassait dans son pelage, calé contre l'épaule du jeune homme et les griffes accrochées à son pull. Cyril eut un léger rire et alla s'asseoir dans le fauteuil près de la cheminée sans lâcher le chat qui se roula en boule sur ses genoux. Il poussa un profond soupir et laissa sa tête partir en arrière.

Ils savaient tous les deux depuis le début que ça ne serait pas facile, loin de là. Ils avaient chacun un métier passionnant mais prenant, et Yann avec son intégration à l'agence du père de Lena une fois son diplôme en poche avait été pris dans le folie des préparations et réalisations de concours, au point depuis deux semaines de ne plus être qu'une ombre dans la maison. Si toute leur vie devait être ainsi, Cyril se demandait combien de temps il pourrait tenir à ce rythme… Hum, et bien c'est que tu as des pensées sympathiques, toi ! Tu vas aller prendre un bon bain chaud, ça te fera du bien…

Le jeune homme souleva doucement le chat endormi qui poussa un petit miaulement de protestation et le reposa sur le coussin du fauteuil avant de se lever. Comme il montait les escaliers en direction de la salle de bains son regard tomba sur le diplôme d'architecte qu'il avait accroché contre l'avis de son amant. Un sourire tendre naquit sur ses lèvres tandis que le souvenir de la pseudo dispute concernant ce cadre lui revenait en mémoire. Yann avait râlé toute la journée pour la forme, feignant de se renfrogner un peu plus sous le rire du blond. Il avait fini par accepter de laisser le cadre là où il était, réclamant une rétribution pour sa capitulation. Rétribution que Cyril avait été plus que ravi de lui accorder… Reviens, s'il te plaît...

From tonight until the end of times

-Où sont les maquettes ?

-Quelqu'un a vu Karen ? Elle devait m'apporter les plans il y a un quart d'heure !

-Merde, l'ordinateur a planté !

-Florian, téléphone pour toi !

-La photocopieuse est en rade ! Elle le fait exprès ou quoi ?

Yann inspira profondément et tenta d'ignorer l'effervescence qui l'entourait pour se concentrer sur le plan qui le tenait en échec depuis une heure. Il avait un escalier de secours à placer, mais où…

Il jeta un coup d'œil à sa montre par réflexe et se mordit les lèvres en constatant qu'il était déjà huit heures. Ce n'était pas ce soir encore qu'il allait rentrer tôt… Son ange devait être rentré, maintenant, seul dans leur maison. Cette image lui vrilla le cœur. Il était conscient d'avoir été plus qu'absent depuis quinze jours, mais il y avait tellement de travail ! Il se sentait même parfois coupable de partir en voyant les piles de dossier sur son bureau qui semblaient ne jamais diminuer… Et pourtant Cyril lui manquait tellement… Jusqu'ici il ne lui avait rien dit, cependant le jeune homme se doutait qu'il n'allait pas tarder à exploser. Ce en quoi il aurait raison, d'ailleurs… Mais que pouvait-il faire d'autre ?

-Yann, Stéphane t'appelle, c'est urgent !

Le jeune homme ferma les yeux et inspira profondément avant de se lever. Pardon Tenshi…

You should know everywhere I go

You're always in my mind

-Où allons-nous ?

-Secret !

-Dis-moi, je veux savoir !

-Non !

-Laisse-moi voir, au moins !

-Pas question !

Océane poussa un soupir de mécontentement et se renfonça dans son siège, croisant les bras pour bouder. Mel lui jeta un coup d'œil et ne put s'empêcher de rire. Les yeux cachés par un épais foulard de velours noir noué autour de la tête, les cheveux coiffés en un chignon et vêtue d'une magnifique robe bleu-vert, elle était une femme superbe au visage d'enfant renfrogné. C'était lui qui l'avait priée de le laisser lui faire une surprise. Elle avait accepté, intriguée, mais plus ils roulaient plus elle perdait patience. Et plus Mel s'amusait. Elle avait gardé dans son caractère quelque chose d'adorablement enfantin, des attitudes et une sorte d'innocence si souvent perdues par les adultes. Une petite facette de sa personnalité qui la rendait pour lui si unique et si précieuse. En espérant que…

-Tu veux bien regarder la route ? fit gentiment Océane, le coupant dans ses pensées. Parce que à force de me contempler, on va finir par avoir un accident…

-On est à un feu rouge, répondit Mel, les joues légèrement rosies de s'être fait prendre en flagrant délit, je suis arrêté alors je peux arrêter de regarder la route.

-Vi, merci, j'avais senti qu'on était arrêtés, railla Océane. Mais par définition, il y a un moment où un feu passe du rouge au vert. Et dans ces cas-là, accessoirement, ça peut servir de regarder devant soi…

Mel ouvrit la bouche pour répliquer mais il dut la refermer sous le rire de la jeune fille. Déjà qu'il était stressé, si en plus elle commençait à le mettre en boîte…

-Gagné, fit Océane comme ils redémarraient.

-Gna gna gna… répondit le jeune homme.

La jeune fille se contenta de lui tirer la langue avant de se renfoncer un peu plus dans son siège. Elle adorait les surprises, c'était vrai. Mais pas quand elles se faisaient attendre aussi longtemps ! Et puis elle sentait Mel un peu tendu, anxieux, presque… hésitant… Qu'est-ce qu'il pouvait bien avoir derrière la tête ? S'il ruse pour m'emmener voir un match de basket, je hurle ! Elle eut un sourire intérieur. Non, jamais il n'oserait faire ça, même pour rire ! N'est-ce pas ?

In my heart

La voiture s'arrêta à nouveau, mais cette fois-ci Océane l'avait sentie faire un créneau. Ils étaient arrivés ? Elle entendit la portière de Mel s'ouvrir, son pas rapide comme il contournait la voiture, le bruit de sa poignée. Elle sentit une bouffée de vent lui caresser le visage, s'engouffrant dans le véhicule. La main de Mel se posa sur la sienne et la saisit délicatement pour l'aider à sortir de la voiture. Bien qu'incertaine de sa position, elle lui adressa un sourire de remerciement.

-Tu peux éviter de séduire le voiturier ? fit la voix légèrement ennuyée du jeune homme tandis qu'un autre éclatait de rire.

Oups Elle se tourna vers l'origine de la voix et lui adressa une petite moue d'excuse comme leur voiture redémarrait.

-Je peux enlever mon bandeau, maintenant ? demanda-t-elle.

-Pas encore, répondit Mel avec un rire dans la voix. Encore quelques instants, petite fille !

Océane lui tira la langue et suivit sa main qui la guidait. Elle sentait un sol léger et mou sous ses pieds, un vent frais sur son visage. Elle entendait au loin le bruit de l'eau, des rires, une musique douce…

Mel s'arrêta au bout de quelques pas et se tourna vers elle, le cœur serré. Il posa une main tendre sur sa joue, amenant un sourire qu'il effaça de ses lèvres. Un peu surprise, elle répondit à son baiser, nouant ses bras autour de son cou. Il en profita pour dénouer lentement le ruban de velours, le laissant glisser le long de son cou comme ils se séparaient.

Océane cligna des yeux et tourna la tête. Elle resta bouche bée. Un peu en contrebas s'ouvrait un vaste jardin aux mille couleurs, des tables disposées le long des allées qui se rejoignaient toutes à une immense fontaine aux fines ciselures. Les lumières sortaient d'immenses plantes montantes, offrant à l'ensemble une lumière tamisée et intime. Au loin la jeune fille distingua un petit pont dans les jardins plongés dans l'obscurité, se détachant nettement sous la lune.

Elle sentit les bras de Mel s'enrouler autour de sa taille et sa tête venir se poser sur son épaule. Il la serra contre lui, effleurant la peau de son cou en un baiser éphémère.

-Bonne Saint-Valentin, petit poisson, murmura-t-il doucement.

In my soul

Baby

Alya leva les yeux vers l'horloge accrochée au-dessus de son miroir. Dix heures et demi. Plus qu'une heure. Elle inspira profondément et essaya de se détendre. Un petit bonhomme de neige, deux petits bonhommes de neige, trois petits bonhommes de neige… Nan, ça marche pas… Elle rouvrit les yeux et planta son regard dans celui de son reflet. Il lui renvoyait l'image d'une jeune femme aux courts cheveux bruns dont les mèches s'envolaient autour du visage, les grands yeux sombres maquillés très légèrement. Elle avait renoncé à l'image de l'Orientale depuis peu, piochant une autre idée dans l'un des jeux préférés de Lena qu'elle avait tenu à lui montrer en long, en large et en travers. C'était un peu étrange de voir son visage au naturel et non dissimulé derrière un masque blanc. Et encore plus de le voir pâlir à vue d'œil…

- Ça suffit ! souffla-t-elle. Ce n'est quand même pas la première fois que tu vas chanter devant des gens, si ? Tu es prête, tu t'entraînes depuis des mois, les musiciens sont prêts aussi…

Oui, mais… Oui mais ce concert allait être filmé. Oui mais il était retransmis en direct. Oui mais cette chanson était un cadeau spécial. Oui mais maintenant ce n'était plus tout à fait pareil…

Une série de douces notes la coupa dans ses pensées. Elles s'arrêtèrent un instant avant de reprendre en boucle, calmes, apaisantes… La chanteuse tourna la tête pour voir son guitariste Lyo assis sur un tabouret près de la porte, caressant les cordes de son instrument. Il releva la tête vers elle et lui adressa un sourire qui se refléta jusque dans ses yeux bruns mangés de mèches claires. Elle lui rendit son sourire et accompagna la guitare en chantant les notes. Tout va bien, disaient les yeux. Je suis là.

And I know

Yes I know

Andréanne mit une touche finale à son maquillage et sourit à son reflet dans la glace. Les cheveux lâchés sur ses épaules, uniquement retenus par deux petites tresses partant de ses tempes, elle portait une longue robe noire toute simple, qui faisait ressortir ses yeux d'or. Oui, il allait aimer. Du moins elle l'espérait… Son regard se fit plus doux à sa pensée. Il lui avait plu dès le début, dès qu'elle avait vu son sourire. Le même que celui de son frère, mais avec quelque chose de moins… torturé, de plus innocent. Il avait gardé un charme enfantin qui l'avait faite craquer. Et bien sûr, elle ne s'était pas rendue compte qu'elle lui plaisait elle aussi… Il avait fallu l'intervention de leurs deux frères respectifs, amusés et faussement exaspérés, pour qu'ils réussissent à ouvrir les yeux. Et pas une seconde elle ne regrettait cette levée de rideau. Au contraire.

Elle eut un sourire en se souvenant de leur Noël à la montagne. Elle avait eu l'impression de se retrouver au milieu d'une grande famille pleine de rires et de chaleur, retrouvant les sensations qui lui faisaient tant défaut ici. Depuis le départ définitif de Yann, ses parents semblaient se refroidir peu à peu de l'intérieur. Ils n'avaient pas été capables de saisir la main tendue que leur avait offerte leur fils, et ils souffraient à présent de cette perte. Mais bien sûr, jamais ils ne l'auraient avoué. Ils refusaient même d'entendre toute nouvelle de Yann lorsqu'elle revenait de chez lui. Et le prénom de Cyril était devenu un mot tabou, au grand chagrin de la jeune fille. Si seulement ils voulaient bien faire l'effort d'essayer de le connaître…

-Autant demander à un hippopotame de danser la macarena sur Mozart, marmonna Andréanne en attachant un oiseau d'or à son cou.

D'ailleurs il lui fallait ruser pour pouvoir voir Ephram. Elle n'en revenait toujours pas que ses parents aient cru à son mensonge de Noël chez une copine pour la montagne. Et si jamais ils savaient qu'elle sortait avec lui… Depuis quelques jours déjà, le jeune homme désirait venir s'expliquer avec ses parents. Elle s'y était toujours fermement opposée, mais vu son caractère, il n'allait certainement pas tarder à transgresser cet interdit…

That it's plain to see

La sonnette retentit au moment où Andréanne enfilait son manteau, prête à rejoindre Ephram quelques rues plus loin. Un mauvais pressentiment l'envahit et elle se dépêcha d'aller ouvrir avant que son père ne sorte du salon. Sur le seuil se tenait le jeune homme, un large sourire aux lèvres, sa longue natte battant son manteau noir sous l'effet du vent.

-Ephram ! s'exclama Andréanne.

-Bonsoir, fit-il doucement en lui tendant la rose qu'il tenait à la main.

Andréanne lui sourit en portant la fleur à son visage pour en sentir l'odeur mais se ressaisit aussitôt.

-Allons-y vite ! Je t'avais dit que ce n'était pas…

-Une bonne idée ? termina une voix dangereusement basse derrière elle.

La jeune fille se retourna pour voir son père debout dans l'embrasure de la porte, son regard glacial planté dans celui d'Ephram qui se refusait à baisser les yeux. L'homme attrapa sa fille vers le bras et la tira à l'intérieur de la maison.

-Monsieur… protesta Ephram.

-Pas un mot, coupa Anthony d'une voix plus froide que la banquise. Votre frère m'a déjà volé mon fils, il est hors de question que vous me preniez aussi ma fille.

Là-dessus il claqua la porte au nez d'un Ephram médusé, sourd aux cris de sa fille. Il avait décidé. Il en serait ainsi.

So in love that we're together

Now I know

-Et si je t'accrochais un néon fluo ''Pas touche, à moi !'' ? Tu crois que ça marcherait ?

Hiroki posa sa fourchette et haussa un sourcil, lui adressant un regard dubitatif.

-Ben quoi ? fit Lena en haussant les épaules. Je cherche !

Le jeune homme éclata de rire et secoua la tête.

-Je n'aurais jamais dû t'en parler… fit-il d'un air ennuyé.

-Si si, c'était une très bonne chose au contraire ! répondit Lena. Comme ça, ça me conforte dans l'idée que je ne t'ai pas trop abîmé !

Hiroki en resta un instant interdit puis éclata de rire en prenant sa main dans la sienne. Il en caressa doucement la peau, jouant un instant avec l'alliance qui ornait son annulaire droit. Il eut une bouffée de tendresse en la voyant. Elle lui rappelait une fois de plus qu'elle l'avait accepté, qu'elle avait dit oui pour le laisser entrer dans sa vie. Et c'était un cadeau dont il remerciait chaque jour le ciel.

-Tu es un sacré numéro ! s'exclama-t-il avec un grand sourire.

Sa femme lui fit un clin d'œil avant de lever de table, emportant le plat vide vers la cuisine.

-C'est pour ça que tu m'aimes ! lança-t-elle par-dessus son épaule.

That I need you here with me

Hiroki éclata de rire et se leva pour aller chercher dans le buffet des assiettes à dessert. Ses yeux glissèrent au passage sur la large cheminée où brûlait un feu, réchauffant le salon aux impressionnantes bibliothèques dont des livres étaient posés un peu partout. Des tableaux et des dessins de Lena avaient été accrochés aux murs malgré les protestations de la jeune femme, apportant des touches de vie et de couleurs. Elle s'était vengée en posant sur tous les meubles des cadres contenant les photos d'Hiroki. Le jeune homme eut un sourire à cette pensée et alla poser son chargement sur la table.

La maison n'était pas bien grande, c'était vrai. Mais ils avaient réussi à en faire un endroit chaleureux, à en faire leur maison. S'il avait su que ses pas le mèneraient jusqu'ici… Ses jambes butèrent dans une masse chaude et pelucheuse comme il se dirigeait vers la cuisine pour aller aider Lena. Hiroki se retint de justesse à un fauteuil et eut un sourire d'excuse en s'agenouillant.

-Désolé, Duo, fit-il au golden retriever en glissant ses mains dans les poils dorés. Je ne t'avais pas vu…

Le chien lâcha un aboiement.

-Vi, je sais, t'es repérable, désolé… Dis, tu sais pourquoi notre ange agit bizarrement depuis le début de la soirée ? Elle n'arrête pas de commencer des phrases sans les finir !

Le chien se contenta de remuer la queue en penchant la tête sur le côté.

-C'est ça, prends ton air de bon toutou innocent qui ne sait rien, bouda Hiroki en lui caressant la tête. Je sais que tu ne vas rien me dire, tu l'as toujours préférée !

Pour toute réponse, Duo posa ses pattes sur ses épaules et le fit basculer en arrière, le bloquant de tout son poids.

-Duo ! protesta le jeune homme.

Un rire retentit dans la pièce, leur faisant tourner la tête. Prise d'un fou rire, Lena s'était assise sur sa chaise et semblait ne plus pouvoir s'arrêter. Duo et Hiroki se regardèrent et le jeune homme poussa un profond soupir.

-Oskour…

From tonight until the end of time

You should know everywhere I go

Alya jeta un oeil derrière le rideau et son cœur rata un battement. Elle n'avait jamais imaginé qu'ils seraient si nombreux ! Elle se sentait ramenée à ses débuts, l'angoisse commençait à lui tordre le ventre… Jamais elle n'allait pouvoir chanter devant eux ! Jamais !

Une main effleura la sienne pour refermer le lourd tissu rouge avant de se poser sur sa taille, l'attirant en arrière contre une poitrine où battait un cœur au rythme régulier. Deux bras l'entourèrent d'une étreinte chaude et puissante, l'amenant à poser sa tête au creux d'une épaule. Des lèvres se posèrent sur sa tempe avant qu'une joue ne s'appuie sur ses cheveux.

-Lyo… souffla-t-elle.

Le jeune homme resta silencieux, se contenant de la serrer un peu plus fort contre lui tandis qu'il imprimait à leurs corps un lent mouvement de bercement. Alya ferma les yeux, profitant du contact apaisant, le laissant effacer ses craintes et ses doutes. C'était vrai qu'il était là. Qu'il allait être avec elle.

Elle se retourna dans ses bras et lui adressa un doux sourire.

-Merci, souffla-t-elle.

-De rien, répondit Lyo en appuyant son front contre le sien. Eh, ça aurait fait tache si tu t'étais évanouie de frayeur sur scène ! s'exclama-t-il en riant.

-Quoi ?! fit Alya, faussement indignée. Espèce de…

Deux lèvres exigeantes coupèrent court à sa phrase, l'emmenant dans une occupation beaucoup plus intéressante et susceptible de lui faire oublier jusqu'au concert imminent…

-Pas de gros mots, fit Lyo avec un clin d'œil lorsqu'ils se séparèrent. Ça nuirait à ton image !

-Et maintenant, celle que vous attendez tous depuis le début de la soirée ! Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, il est onze heures et demi, voici Alya !

Un tonnerre d'applaudissements retentit dans la salle, empêchant la jeune fille de répondre au guitariste. Elle se contenta de lui tirer la langue, geste puéril auquel il répondit en lui volant un baiser plein de rires avant de lui soulever le rideau.

-A toi, l'oiseau, fit-il comme elle passait sous le tissu.

Elle se retourna pour lui adresser un clin d'œil avant de s'avancer vers la lumière.

You're always on my mind

In my heart, in my soul

Cyril ramena son plateau vide dans la cuisine, n'allumant même pas la lumière de la pièce. Il n'en avait ni le besoin ni l'envie. Il jeta un regard triste à la table sur lequel il avait laissé un plat recouvert d'une cloche pour le protéger d'Engel. Il doutait fortement que Yann prendrait la peine de dîner en rentrant mais au cas où… Il eut un petit sourire en voyant se détacher sous la lune le petit papier blanc qu'il avait posé à côté de l'assiette. Il en connaissait chaque mot par cœur, ses mots d'apaisements et d'amour quand il ne désirait qu'une seule chose, c'était les entendre à nouveau. Sa voix seule lui manquait déjà tellement…

-Tu deviens pathétique, mon pauvre Cyril, murmura le jeune homme en faisant demi-tour.

Il retourna s'asseoir sur le canapé du salon, où Engel l'accueillit d'un petit miaulement ensommeillé. Le félin s'empressa de se rouler en boule sur ses genoux dès que le jeune homme se rassit. Amusé, Cyril passa ses doigts dans la douce fourrure grise, amenant un ronronnement sourd à sortir de la gorge d'Engel.

Il attrapa la télécommande, jetant au passage un regard machinal au téléphone qui n'affichait pas le moindre message. Bien sûr. Il n'allait pas appeler dans les quinze secondes qu'avait duré son passage à la cuisine… Espèce d'idiot…

Cyril mit la télévision en marche, bien décidé à rester éveillé jusqu'au retour de Yann, quitte à devoir supporter un documentaire sur les pattes des goélands argentés à tête huppée…

I want to have you near me

I want to have you hear me saying

Océane tournoya sur elle-même, les bras grand ouverts et les lèvres ouvertes sur un rire tandis que sa robe s'enroulait autour de ses jambes. Elle se rattrapa à la balustrade du petit pont et s'y appuya pour regarder l'eau couler doucement sous elle. Elle entendait encore au loin la musique du restaurant, étouffée par les arbres qui les entouraient, leur offrant un lieu à l'écart du reste du monde. La seule lumière qui leur parvenait était celle de la lune et des étoiles qui jouaient avec les mouvements de l'onde.

La jeune fille se tourna vers Mel qui se tenait à quelques pas, perdu dans sa contemplation de l'eau. Il avait paru un peu mal à l'aise toute la soirée, comme hésitant dans ses paroles. Il avait éludé toutes ses questions avec un tendre sourire, changeant aussitôt de sujet. Malgré tous ses efforts, Océane n'avait pas réussi à deviner ce qui pouvait bien le préoccuper. Ce n'était certainement pas quelque chose de grave ni de douloureux, non. C'était plutôt comme un combat intérieur…

-Mel ? appela-t-elle doucement en posant sa main sur sa joue.

No one needs you more than I need you

Le jeune homme sursauta, surpris, et tourna la tête pour rencontrer les deux grands yeux interrogateurs. Pitié non, ne me regarde pas comme ça… Plus il essayait d'avancer, plus il ne désirait que reculer. Il avait peur de faire une erreur envers elle, d'être rejeté, de l'effrayer… Il pourrait accepter un refus clair et net, pas un sourire désolé ni de la pitié si elle disait non. Oui mais en même temps, il ne pouvait plus envisager sa vie sans elle. Il ne pouvait imaginer ses matins sans son sourire au réveil, ses soirées sans son regard, ses nuits sans sa présence. Il était devenu complètement dépendant d'elle, et maintenant qu'il était au pied du mur, il en prenait toute la dimension. Et cette puissance l'effrayait un peu…

-Mel ? Tu es là ou les extra-terrestres ont fini par réussir à te lobotomiser ? demanda gentiment Océane, le tirant de ses pensées.

Le jeune homme lui tira la langue et serra son poing dans sa poche. Il ne pouvait plus reculer. Pas maintenant.

-Océane… commença-t-il d'une voix un peu tremblante. Voilà, je… Je… balbutia-t-il sous l'œil inquiet de la jeune fille.

Il pesta intérieurement contre lui-même. Pourquoi fallait-il qu'il réussisse à ordonner ses pensées et jamais ses paroles ! Il était en train de se ridiculiser et elle n'allait pas tarder à éclater de rire ! Des larmes de rage et d'émotion aux yeux, il finit par prendre sa main dans la sienne, enserrant ses doigts entre les siens.

-Pardon pour mon manque de cohérence dans mes paroles, fit-il en mettant un genou à terre. J'essaierai de faire mieux une prochaine fois, ajouta-t-il en levant la tête vers la jeune fille abasourdie, ancrant son regard au sien. Océane, accepterais-tu que je devienne ton mari ? demanda-t-il doucement en sortant une petite boîte noire de sa poche.

Il l'ouvrit pour laisser la lune faire briller une fine bague d'argent sertie d'éclats de diamants. Océane resta silencieuse, immobile, comme figée. Puis Mel vit avec horreur des larmes emplir ses yeux et couler sur ses joues sans qu'elle fasse un geste pour les arrêter.

-Je… fit-il, complètement déboussolé.

Océane se laissa glisser au sol devant lui et se jeta dans ses bras, le serrant contre elle de toutes ses forces, manquant de le faire basculer en arrière. Il sentait ses larmes couler dans son cou, ses lèvres balbutier des mots contre sa peau. Elle s'écarta lentement de lui et les yeux de Mel s'ancrèrent dans les siens, craignant ce qu'ils allaient y trouver… et il faillit tomber à nouveau. Un magnifique sourire illuminait le visage d'Océane, brillant jusque dans ses yeux tandis qu'elle approchait son visage du sien.

-C'est oui, souffla-t-elle sur ses lèvres. Mille fois oui !

Le jeune homme en resta un instant interdit, jusqu'à ce qu'un léger rire le fasse revenir à la réalité. Il ne rêvait pas ! Elle était là, devant lui, à genoux, les mains sur son visage, et elle avait dit oui ! Fou de joie, il se releva en l'enlevant dans ses bras pour la faire tournoyer dans un éclat de rire. Il la garda dans ses bras en la reposant au sol, appuyant son front au sien.

-J'ai craint que tu dises non, souffla-t-il en lui glissant la bague au doigt.

-Essaye toujours d'en épouser une autre, répondit Océane en nouant ses bras autour de son cou.

Elle se dressa sur la pointe des pieds pour l'embrasser, scellant leur accord d'appartenance. Ils allaient être ensemble. Toujours. C'est vrai que c'est une super Saint-Valentin…

I want to have you near me

I want to have you near me saying

Andréanne resta immobile dans l'entrée, abasourdie. Tout s'était passé si vite ! Elle n'arrivait pas encore à croire qu'il avait fait ça. Qu'il avait pu faire ça ! Une vie gâchée ne lui suffisait pas, il lui fallait la sienne en plus ?

Elle leva lentement la tête pour voir son père la regarder, les yeux plus froids que la banquise, les bras croisés, sourds à la sonnette de la porte qu'il avait fermée à clé. Anthony resta un long moment silencieux avant de se détourner.

-Tu restes ici ce soir, fit-il d'une voix parfaitement égale en s'éloignant en direction du salon à la porte duquel sa femme venait d'apparaître. Et tu ne reverras jamais ce garçon.

La sonnette se tut, mais Andréanne savait qu'Ephra m était toujours là. Il l'attendait, et l'attendrait jusqu'au bout. Cette pensée lui donna du courage et elle serra les poings.

-Non, lâcha-t-elle d'une voix parfaitement calme.

-Je te demande pardon ? fit son père en se retournant lentement.

Il fit face à son enfant dont les yeux flamboyaient bien que sa voix restât parfaitement égale.

-J'ai dit non, répondit Andréanne. Je ne resterai pas ici ce soir, et je ne compte pas cesser de voir Ephram uniquement parce qu'il s'agit de ton bon vouloir !

-Je fais ce qu'il y a de mieux pour toi ! fit Anthony en haussant le ton. C'est le frère de celui qui m'a pris mon fils, il est hors de question qu'il te tourne autour !

-Personne ne vous a volé Yann, répondit sa fille. C'est vous qui l'avez repoussé ! Vous avez failli détruire la vie qu'il s'était reconstruite après le carnage que vous y aviez fait pour de simples préjugés stupides et sans fondements ! Vous avez jugé Cyril sans le connaître, sans vouloir voir tout le bien et le bonheur qu'il a apportés à Yann ! Et vous recommencez avec moi ! Vous ne connaissez pas Ephram mais vous le repoussez d'emblée !

-Tais-toi ! asséna violemment Anthony.

-Non ! répondit sa fille tout aussi durement. Pour une fois c'est toi qui vas m'écouter ! J'aime Ephram, et ce n'est pas toi qui vas détruire ce qu'il y a entre nous ! C'est ma vie, mon cœur, c'est à moi de décider quoi en faire ! Tu n'as rien à y faire !

Anthony ouvrit la bouche pour répliquer, ivre de rage, mais sa femme le coupa en posant une main sur son bras. Elle s'empara des clés et alla ouvrir la porte, révélant Ephram appuyé à l'une des colonnes de la véranda. Aussitôt le jeune homme se redressa, s'assurant silencieusement qu'Andréanne n'avait rien. La jeune fille lui fit un sourire rassurant bien qu'un peu tremblant.

-Emilie ! protesta Anthony.

-Suffit ! trancha sa femme. Nous avons déjà perdu notre fils, je ne veux pas perdre ma fille, c'est hors de question !

L'homme en resta abasourdi. Emilie, habituellement si silencieuse et effacée, lui tenait tête ! Ouvertement et devant témoins !

-Vas-y, Andréanne, fit Emilie en tirant sa fille par la main.

Andréanne obéit machinalement et se retrouva dehors sans avoir compris comment. Ephram entoura ses épaules de son bras et la serra contre lui sans se soucier du regard glacial d'Anthony qui tourna les talons sans un mot.

- Ça va aller ? murmura-t-il.

-Oui, répondit doucement Andréanne en jetant un regard attristé à la porte close du salon. Merci, maman, ajouta-t-elle en levant les yeux vers elle.

Sa mère lui adressa un tendre sourire. Elle n'avait pas su aider Yann, elle avait été trop longtemps aveugle. Et elle l'avait perdu. Andréanne restait son seul lien avec lui, et sa seule enfant à ses côtés. Il était temps qu'elle agisse en mère.

-Passe une bonne soirée, répondit-elle avec un sourire. Et ne t'inquiètes pas, je parlerai à ton père… ajouta-t-elle en refermant la porte.

Andréanne resta à regarder la porte fermée jusqu'à ce qu'une légère pression sur son épaule la ramène à la réalité. Elle tourna la tête pour croiser le regard inquiet d'Ephram qui lui caressa la joue.

-Désolé d'avoir été la cause de votre dispute, murmura-t-il.

-Il fallait bien que ça éclate un jour ou l'autre, répondit Andréanne en haussant les épaules. Comme ça c'est fait…

Le jeune homme la serra un peu plus contre lui et déposa un baiser sur sa tempe avant d'y poser sa tête.

-C'est vrai que tu m'aimes ? fit-il soudain.

Andréanne se détacha de lui pour rencontrer un regard pétillant.

-Comme si tu en doutais, crétin ! répondit-elle en lui envoyant un coup dans l'épaule.

-Ben vi, un peu, dit Ephram en bloquant son poignet d'un air ennuyé. Surtout quand tu me martyrises… ajouta-t-il en l'attirant contre lui tandis qu'elle éclatait de rire.

-Et là, c'est mieux ? fit-elle en effleurant ses lèvres.

-Vi, beaucoup mieux… souffla-t-il avant de s'emparer des lèvres offertes.

Aucun des deux ne vit le rideau de la fenêtre retomber sur un visage souriant…

No one needs you more than I need you

When you love somebody till the end of times

Yann se retint de pousser un cri de victoire en enregistrant les dernières modifications de son plan. Ça y était ! Il l'avait bouclé ! Ce foutu escalier de secours était enfin placé depuis le temps qu'il le narguait ! Et malgré toutes les interruptions qu'il avait subies de ses collègues… Karen pour les plans qu'elle ne trouvait plus, Stéphane pour ceux dont il avait besoin immédiatement afin de préparer la réunion de chantier du lendemain, Antoine pour des erreurs sur des évaluations, Sandrine pour le téléphone…

-Antoine, les plans ! cria une voix du fond de la pièce.

-Karen, tu as corrigé ceux de Meaux ?

-Tournée de café !

Un cri général d'allégresse se fit entendre, arrachant un léger rire à Yann qui se leva de son bureau en s'étirant. Il se sentait affreusement lourd et ankylosé et n'avait plus qu'un seul désir : rentrer chez lui, retrouver son ange. Et s'excuser platement auprès de lui… Il jeta un coup d'œil machinal à sa montre et manqua d'en retomber sur sa chaise. Minuit moins le quart ! Il avait vraiment passé toute la soirée à l'agence ! Il s'adressa une gifle mentale en enfilant son manteau. Mais quel crétin ! Et connaissant Cyril, il doit être en train de t'attendre… Une voix joyeuse le tira de ses pensées moroses.

-Et tournée de chocolats aussi ! annonçait-elle. C'était quand même la Saint-Valentin aujourd'hui !

Yann en retomba sur sa chaise, les yeux écarquillés. La Saint-Valentin ? Aujourd'hui ? Et il l'avait oublié ?! Comment avait-il pu faire une chose pareille ! Non seulement il abandonnait son ange toute la soirée, mais en plus un 14 février ! Tu es vraiment le pire des imbéciles, pauvre crétin !

-C'est pas vrai ! siffla-t-il entre ses dents en se précipitant vers la porte.

-Yann ! fit une voix dans son dos. Tu ne peux pas partir, on doit regarder…

Le jeune homme se retourna très lentement, son regard glacial clouant sur place la pauvre jeune femme blonde. Il serra les dents pour ne pas hurler, ses yeux lançant des éclairs.

-On ne doit rien regarder du tout, Karen, fit-il d'une voix dangereusement basse. Il est près de minuit et je rentre chez moi ! C'est clair ?

-Heu… à demain, alors ? répondit la jeune femme avec un sourire.

Yann lui adressa un sourire d'excuse et hocha la tête, se sentant un peu coupable. Elle lui adressa un clin d'œil et un petit geste de la main. Tout va bien, j'ai compris, ne t'inquiètes pas ! Il la connaissait depuis suffisamment longtemps pour savoir qu'il n'avait as besoin de se répandre en paroles avec elle. Et c'était reposant… Il allait enfin franchir la porte d'un pas pressé lorsqu'une nouvelle voix l'arrêta.

-Yann !

Le jeune homme leva les yeux au ciel et soupira avant de se retourner pour voir Alexandre appuyé à la rambarde supérieure de l'escalier.

-Viens me voir dans mon bureau, fit-il en se détachant de son support. Il y en a pour deux minutes, ajouta-t-il d'un ton amusé.

Yann se sentit rougir et se dirigea vers les escaliers. Il avait dû l'entendre répondre à Karen… Et il savait aussi qu'en tant que son patron, il ne risquait pas le même accueil. Même si le jeune homme ne rêvait que de tout envoyer balader et qu'on le laisse enfin libre de rentrer chez lui !

-Assieds-toi, fit Alexandre lorsque Yann l'eut rejoint.

Il croisa les mains sous son menton, les coudes appuyés sur son bureau, et plongea son regard dans le sien sans dire un mot. Mal à l'aise et fébrile, Yann ne put empêcher un soupir de lui échapper. Pourquoi l'avoir retenu si c'était pour s'observer en chiens de faïence ? Il n'avait pas que cela à faire ! Il allait ouvrir la bouche lorsqu'Alexandre le devança.

-Yann, j'apprécie beaucoup le travail que tu fais ici à l'agence. Tu es compétent et efficace, et je ne doute pas que tu feras dans quelques années un grand architecte. Tu as tout pour, fit-il sans se soucier des yeux écarquillés de son vis-à-vis. Je suis heureux de voir que tu aimes ton travail, mais ne le fais pas au dépend de ta vie privée.

Yann en resta la bouche ouverte, incapable de répondre. Ses neurones semblaient s'être mis en stand-by. Il ne pouvait qu'écouter.

-Tu avais oublié que c'était la Saint-Valentin aujourd'hui, n'est-ce pas ? fit doucement Alexandre en penchant la tête sur le côté. Et ça fait deux semaines que tu rentres très tard chez toi. C'est vrai que l'agence est un véritable tourbillon en ce moment, et que tu te sens sollicité de tous côtés. Je suis sûr que tu culpabilises même, quand tu t'en vas et que tu vois la masse de travail qu'il te reste ! Mais apprends à mettre un frein. Ne te noies pas dans le travail. C'est l'erreur que j'ai faite il y a quelques années, et j'ai failli perdre ma famille. Ne fais pas comme moi. Tu risques de perdre ce que tu possèdes de plus précieux…

Le cœur serré, Yann ne put qu'hocher la tête. Il avait raison. Dix fois, vingt fois, mille fois raison. Il n'avait pas su mettre de limites à son implication dans son travail, et s'il n'y prenait pas garde, il en paierait bientôt le prix. La seule idée de perdre Cyril lui vrilla le cœur. Il leva des yeux embués de larmes vers Alexandre et lui adressa un sourire.

-Merci, souffla-t-il en se levant.

-Allez, file, répondit l'homme avec un doux sourire. Et va te faire pardonner…

When you love somebody always on my mind

No one needs you more than I

Seule lumière de la pièce le feu en dessinait les contours, adoucissant les angles et perdant dans les ombres le fond de la maison. Blottie sur les genoux d'Hiroki dans leur immense fauteuil de cuir brun, Lena nicha son nez dans le cou de son mari, s'amusant à faire frissonner la peau bronzée sous son souffle. Le jeune homme finit par éclater de rire et resserra l'étreinte de ses bras autour d'elle, faisant tressaillir l'oreille de Duo qui était étalé de tout son long devant l'âtre. Il poussa un soupir de contentement et appuya sa joue sur la tête calée contre son épaule. Rien qu'un instant comme celui-ci, un moment câlin tout doux suffisait à le rendre heureux. Ils avaient réussi à équilibrer leurs vies professionnelles et privées, à ne pas se perdre dans la routine comme tant de couples après le mariage.

Il se sentait chaque matin plus heureux de sentir son corps chaud contre le sien, de voir ses yeux embrumés de sommeil au réveil, d'entendre ses légers délires au petit déjeuner… C'était suffisant pour lui assurer une bulle de bonheur pour affronter le monde extérieur. Juste de l'avoir avec lui. Et il espérait vraiment que Yann allait réussir à ne pas se perdre avec Cyril. Ils méritaient mieux que ça…

-Hi-chan ? fit une petite voix, le tirant de ses pensées.

-Hum ? répondit-il, intrigué.

Mais rien ne vint. Toute la soirée Lena avait commencé des phrases sans les finir, ouvert la bouche pour ensuite la refermer, interrompu ses paroles en plein milieu… Que pouvait-elle avoir à lui dire de si difficile ? Posant ses mains sur ses épaules, Hiroki la détacha doucement de lui et plongea ses yeux dans les siens.

-Qu'est-ce qu'il y a ? fit-il d'une voix douce.

Mais Lena resta silencieuse. Elle n'y arrivait tout simplement pas. Comment allait-il réagir ? Bien, probablement… Oui mais et si… Et si quoi ? Et si n'importe quoi… Si elle avait sauté de joie, manquant d'aller danser sur tous les toits, qu'en serait-il de lui ? Elle ferma les yeux, incapable de soutenir son regard inquiet et interrogateur. Elle n'avait jamais su résister à ce regard gris…

Deux mains douces se posèrent sur son visage, l'emprisonnant pour l'attirer en avant. Hiroki l'embrassa tendrement, gardant son visage dans ses mains pour l'empêcher de rompre leur baiser. Comme si elle aurait pu en avoir envie…

-Allez, dis-moi, fit-il lorsqu'ils se séparèrent. Tu es un extra-terrestre du Quadrant extérieur de la Galaxie Gamma et tu n'arrives pas à me l'avouer ?

Lena secoua la tête avec un léger sourire et Hiroki fit mine de réfléchir.

-Tu as un troisième œil qui pousse derrière ta tête ?

Lena sourit franchement et tourna la tête pour lui prouver que non. Le jeune homme se mordit les lèvres puis son visage s'éclaira.

-Je sais ! s'exclama-t-il. Tu as découvert qu'il existait une dimension parallèle à la nôtre où tout est inversé et où tu es mariée à Cyril, je file le parfait amour avec Ephram, Océane flirte avec Yann et Andréanne et Mel sont les parents de sept enfants ! Non plus, fit-il comme Lena éclatait de rire en secouant la tête à nouveau. Alors là, je sèche…

-Je suis enceinte, dit la jeune femme.

Hiroki sursauta et la regarda avec de grands yeux écarquillés, la bouche ouverte. Il cligna des yeux et attrapa sa main.

-Refais-te le me le ? balbutia-t-il.

Amusée et émue, Lena s'exécuta obligeamment.

-Je suis enceinte, répéta-t-elle.

Lentement, un large sourire naquit sur les lèvres d'Hiroki. Le regard pétillant, il éclata de rire, les larmes aux yeux. Il prit le visage de sa femme entre ses mains et appuya son front contre le sien.

-Lena… souffla-t-il, un sourire radieux illuminant son visage. Lena, c'est magnifique !

-C'est vrai ? fit la jeune femme d'une voix hésitante. Tu… Tu en es heureux, Hi-chan ?

Interdit, Hiroki resta un instant silencieux avant de la prendre dans ses bras pour la serrer étroitement contre lui. Comment pouvait-elle croire qu'il n'en serait pas comblé de joie ? En même temps, il connaissait la réponse. Même s'ils avaient fait de gros progrès, Lena gardait en elle une crainte de rejet. Il ne doutait pas qu'avec les années, elle finirait par disparaître. Avec le temps…

-Tu n'aurais pas pu me rendre plus heureux, chaton, fit-il doucement en lui embrassant la tempe. Un enfant… Notre enfant… Tu te rends compte ? Nous allons être parents ! s'exclama-t-il avec un rire de bonheur. J'ai hâte de la voir, cette petite crevette ! Un enfant…

Lena se détacha de lui pour pouvoir le regarder dans les yeux. Les prunelles grises pétillaient de bonheur, reflétant l'immense sourire de ses lèvres. Elle se sentit sourire à son tour. Elle avait eu tort de s'inquiéter. Et elle avait été stupide de craindre. Hiroki était aussi heureux qu'elle à l'idée de leur bébé. Leur bébé…

-Notre bébé, souffla le jeune homme. Il va falloir lui trouver un prénom…

Lena éclata de rire en se blottissant contre lui, embrassant la peau de son cou. Le rire d'Hiroki se joignit bientôt au sien, emportant dans la nuit leur futur tandis qu'un petit chat s'ingéniait à lui faire perdre la tête…

When you love somebody till the end of times

When you love somebody always on my mind

Yann ouvrit silencieusement la porte. L'entrée était plongée dans le noir et le silence, tout comme le reste de la maison face à lui. Seul un rai de lumière filtrait sous la porte repoussée du salon, d'où sortait un son étouffé. Le jeune homme posa sa serviette et ouvrit doucement la porte. Face à lui, la télévision allumée diffusait un concert d'Alya. Les cheveux courts volant autour de son visage, un grand sourire aux lèvres, la jeune fille chantait une vieille mélodie des années 80, qui n'avait pourtant rien perdu de sa beauté… Elle prit la main de son guitariste qui la fit tournoyer dans un grand éclat de rire, échangeant avec lui un regard qui fit sourire Yann.

Il s'approcha pour éteindre l'écran. Tête en l'air comme il l'était, Cyril avait dû l'oublier en montant se coucher… Il était certainement endormi dans leur lit, le nez perdu dans un oreiller et Engel roulé en boule contre lui… Yann eut un soupir en contournant le canapé pour y attraper la télécommande… et trouva Cyril endormi dans les coussins. Le visage détendu mais la bouche plissée en une moue boudeuse, il serrait contre lui un énorme coussin.

Le cœur de Yann manqua un battement. Il resta un long moment immobile, debout face au canapé, à le regarder dormir. Juste vêtu d'un jean et d'un pull léger, les mèches blondes ébouriffées, L'état d'abandon de Cyril lui vrilla le cœur. Il l'avait attendu toute la soirée. Il avait espéré le voir rentrer ce soir. Et il avait dû s'endormir le cœur lourd en réalisant qu'il avait oublié… Yann se mordit les lèvres et tendit la main pour effleurer la peau pâle. Comment avait-il pu le négliger à ce point ? Comment avait-il pu être aussi aveugle ? Quel genre d'amoureux était-il pour abandonner son ange au profit de son travail ? L'avertissement d'Alexandre prenait tout son sens… Et s'il était trop tard pour redresser la barre ? Et s'il avait déjà joué ses dernières cartes… Yann se laissa tomber à genoux, les yeux débordants de larmes. Dieu qu'il avait été stupide… Ses doigts tremblants caressèrent doucement la joue de Cyril, glissant vers ses lèvres, remontant vers son front… Ne pars pas…

You're the meaning in my life

You're the inpiration

Cyril fronça les sourcils. Il y avait quelque chose d'étrange... Une présence de plus qui n'était pas là avant… Mais une présence bizarre, qui n'avait pas son aura habituelle. Une présence qui semblait hésiter à le toucher… Le jeune homme ouvrit les yeux, encore engourdi de sommeil.

-Yann ? souffla-t-il. C'est toi ?

Comme aucune réponse ne venait, il se frotta les yeux et secoua la tête, pestant contre lui-même. Pourquoi fallait-il qu'il ait des gènes de marmotte neurasthénique ? Il releva la tête pour rencontrer un regard d'or troublé de larmes. Cyril en resta bouche bée. A genoux devant lui, encore vêtu de son manteau, Yann le regardait sans faire un geste, le visage ravagé de larmes silencieuses.

-Yann… souffla doucement le blond en se penchant vers lui.

Comme s'il n'avait attendu que cela, le jeune homme se précipita contre lui, enfouissant son visage dans son cou. Ses larmes coulaient sur la peau de Cyril, ses lèvres formaient des mots inaudibles et tremblants tandis qu'il semblait vouloir se fondre contre son cœur, les mains agrippées à son pull. Abasourdi, Cyril referma lentement ses bras sur le corps parcouru de frissons. Il était déstabilisant de voir Yann, le plus solide d'entre eux, s'écrouler ainsi dans ses bras. Toutes ses récriminations, tous ses griefs, toute sa colère et sa douleur face à sa solitude s'étaient envolés devant les larmes de son amant.

-Yann… souffla-t-il doucement en lui caressant les cheveux, dégageant son front des longues mèches brunes. Yann, qu'est-ce qui se passe ?

-Pardon… murmura le jeune homme entre deux sanglots. Pardon, Tenshi…

Il se détacha lentement de lui, levant la tête pour plonger son regard dans le sien. Si Cyril avait ouvert la bouche pour répondre, il la referma dès que leurs yeux s'accrochèrent. Ceux de Yann brillaient de douleur et de colère, de souffrance et de remords. Il leva une main tremblante et la posa sur la joue chaude de son ange, comme s'il craignait de le voir disparaître au moindre geste.

-Je m'en veux tellement, tu sais… chuchota-t-il d'une voix pleine de larmes. Je m'en veux tellement de t'avoir abandonné… Je n'aurais jamais dû être aussi absent, j'aurais dû faire attention, je… Pardon… Pardon, Tenshi… Ne pars pas… Ne t'en vas pas…

Cyril sentit à son tour des larmes rouler sur ses joues devant l'air désemparé de Yann. Il avait l'air si vulnérable ! Et il était tellement en colère contre lui-même… Le jeune homme se laissa glisser au sol devant lui et prit le visage de son amant entre ses mains, un tendre sourire aux lèvres.

-Je ne vais nulle part, Yann, murmura-t-il en ancrant son regard au sien. Je ne vais pas m'en aller, je te le promets. Je reste là…

Un sourire hésitant naquit sur les lèvres du brun, qui s'élargit lorsque Cyril hocha la tête. Ils n'avaient pas besoin de paroles supplémentaires pour s'entendre. Je te pardonne… Cyril s'approcha un peu plus, effleurant les lèvres de Yann en un baiser éphémère tandis que ses mains se chargeaient de lui retirer son manteau.

-Mais ne recommence jamais, souffla-t-il comme le jeune homme refermait ses bras sur lui.

-C'est promis, répondit Yann avec un léger rire.

Il s'empara des lèvres de son amant, lassé de les sentir jouer avec les siennes en les frôlant à peine. Cyril sourit dans leur baiser, caressant doucement le dos de Yann qui ne put s'empêcher de frissonner.

-Joyeuse Saint-Valentin, Tenshi, chuchota-t-il en lui mordillant l'oreille.

Un rire joyeux échappa au jeune homme, amenant un sourire aux lèvres de Yann tandis qu'il se perdait dans son cou. Il venait de se faire offrir un cadeau magnifique : le pardon d'un ange.

You bring feeling to my life

You're the inspiration

Fin

''You're the inspiration'' : Chicago

(1) : Alex, peux-tu me dire, s'il te plaît ou je vais devenir dingue, ce que ce très gentil et adorable dauphin veut faire hors de la mer ?

Valà ! J'espère que ce petit extra vous aura plu... C'est bizarre de n'avoir personne qui râle, pour une fois !

Engel : Mrroû !

Duo : Wouf !

L'ange gardien : Me disais, aussi… Sorry les ptits chous, vos humains sont occupés pour le moment ! Z'avez qu'à vous faire des mots croisés…

Engel : Miou !

L'ange gardien : M'énerve… Enfin bon bref, joyeuse Saint-Valentin à tout le monde !