Auteur : Isa ( )

Genre : romance, vie de tous les jours.

Rencontre au sommet.

Chapitre 2

Atsushi Kimoto

Je laisse mon regard se porter sur la foule. Je comprends parfaitement la réaction de Masato, mais c'est tellement ennuyeux de toujours se rebeller. Je ne cache rien d'important dans ce sac, rien de préjudiciable ou qui me ferait aller en prison. Alors pourquoi perdre du temps ? Nous allons finir par être en retard pour prendre l'express.

Je n'écoute même plus les répliques que font les vigils et mon ami. Je regarde avec une pointe de curiosité les passants qui ont pris de leur précieux temps pour s'arrêter et regarder la scène. La plupart sont des hommes d'un certain âge en costard noir avec cravate assortie. Ils ont tous l'air de n'avoir aucun désir et que cette petite altercation a illuminé un peu leur journée maussade.

J'aperçois plus loin, un homme de haute taille mais il a déjà tourné la tête et je n'ai pas le temps de voir son visage. Lui aussi porte un complet, lui aussi doit être un homme d'affaire sans rêves ni avenir.

Si c'est ça qui nous attend une fois les études finies, cela ne donne pas envie.

Une main se pose sur mon épaule et je vois Masato qui me sourit avec fierté. Les deux vigils qui nous ont interpellés ne sont plus là. Comme à l'accoutumée, la force de persuasion de Masato a été la plus forte. Il est vraiment fait pour diriger mais parfois son esprit rebelle est légèrement trop fort.

Nous nous connaissons depuis le collège et avons gravi les années ensemble pour finalement terminer à l'université de Tsukuba. Personne dans notre entourage ne croyait qu'il serait capable de réussir un examen d'admission. Mais avec de l'acharnement et un peu de mon aide, Masato a terminé dans le top cinquante et s'est vu accepté dans la section sport, celle qu'il souhaitait. Quant à moi, j'ai terminé dans le top dix et suis maintenant des cours de physique avec le but de devenir chercheur.

Nous venons de passer trois jours à Tokyo pour visiter. Tous les quartiers connus y sont passés : Roppongi, Shibuya, Ikebukuro, Asakusa et j'en passe. Je regrette juste que nous n'ayons pas eu le temps d'aller au parc de Ueno mais Tsukuba n'est qu'à une heure de train. J'y reviendrai certainement.

Venant d'Osaka, je n'ai pas été trop surpris par la grande métropole. Les similitudes sont frappantes, mais je trouve quand même Tokyo plus froide, moins vivante. Vous direz que c'est à cause des différences Kansai-Kanto cependant mon père vient d'Ibaraki donc j'appartiens à moitié l'un et l'autre. Mais il est vrai que mon esprit est plus du Kansai, là où j'ai grandi. Je suis d'un naturel joyeux et heureux de vivre. Il est difficile de me démonter. Je suis parvenu à trouver un juste équilibre entre mes études, mes amis, ma famille et je compte bien continuer ainsi.

Nous attrapons le premier métro direction Akihabara. A cette heure de la journée, celui-ci est plein à craquer. Des lycéens, collégiens, j'aperçois même des écoliers, la moyenne d'age a baissée en une heure de temps. Le précèdent métro ne contenait que des businessmen. C'est amusant de voir l'évolution au fil des heures.

Près de moi, un groupe de lycéennes, elles chuchotent en me jetant des regards papillotants. Je fais mine de m'intéresser à l'extérieur mais leur attitude m'amuse. Dans la vitre, je vois le sourire élargi de Masato qui a compris leur manège. Il me donne un coup de coude en me chuchotant :

« Tu as fait des touches ».

Et de partir dans un des ses grands éclats de rire. Nous formons une sacrée paire tous les deux. Certaines personnes nous trouveraient mal assortis. Masato et ses cheveux blonds, ses yeux noirs taquins, son air rebelle et moi et mes cheveux noirs, mes yeux noirs et ma patience à toute épreuve. Deux êtres complètement opposés et pourtant les meilleurs amis du monde.

Nous parvenons enfin dans la grande station de la ville électronique. Mais nous ne nous arrêtons pas pour regarder les milliers d'articles high-tech qui nous entourent et nous rejoignons la gare de l'express qui nous ramènera à Tsukuba.

Nous trouvons facilement des places à cette heure de la journée et nous nous asseyons sur l'une des longues banquettes les préférant aux places à quatre plus petites. Cette ligne de train est relativement jeune, elle s'est ouverte l'année dernière en août. Elle a permis à la petite cité scientifique de grandir, devenant ainsi une cité dortoir. Je ne sais pas si c'est un bien ou un mal. Mais pour le moment j'apprécie ma nouvelle vie, Tsukuba est une ville tranquille et elle est tout à fait adaptée à l'étude et au travail. L'université est l'une des plus grandes de tout le Japon, la troisième il me semble.

Le train se met en mouvement. Masato me sourit et me montre du doigt un homme âgé, la tête penchée dangereusement en avant. Il est impressionnant de voir les personnes parvenir à ne pas s'écrouler par terre et dormir ainsi. Surtout avec le bruit du train.

Masato part dans une grande conversation avec ses trois compères quant à moi je perds mon regard sur les faubourgs de la métropole, laissant mon esprit dériver sur ces derniers mois.

Nous avons commencé notre nouvelle vie en avril et avons profité des vacances de Printemps pour trouver un appartement à Tsukuba. Deux choix s'étaient offerts à nous: les dortoirs universitaires ou bien un appartement individuel. Après avoir visité les dortoirs, nous avons décidé d'un commun accord de trouver quelque chose où nous pourrions vivre à deux. Les dortoirs sont des petits carrés de dix mètres sur dix, sans toilettes ni cuisine. Une petite horreur d'habitation où il fait extrêmement chaud en été et extrêmement froid en hiver.

Après plusieurs inspections et l'aide d'un service universitaire, nous avons finalement pu mettre la main sur un appartement près du centre ville. Le bâtiment est tout neuf de l'année dernière, il est situé un peu loin de l'université mais est très pratique. Et le loyer est le même que si nous avions été dans deux dortoirs séparés. Au moins nous aurons un véritable lieu pour vivre, pas une mini cage où l'on ne peut se déplacer. Il possède deux chambres, un coin cuisine salon et une salle de bain. Le seul problème est qu'il n'était pas meublé. Mais grâce à nos bourses d'études et nos parents, nous serons capables de le garnir rapidement. Nous avons déjà acheté l'essentiel de survie et pour le moment, depuis trois mois que nous nous y trouvons, nous sommes très contents.

L'environnement de Tsukuba est très studieux. Il est celui d'une ville récente et faite pour le travail. Il n'y a pas de grand centre de loisir, et elle ne possède que des petits centres de shopping ici et la. Une voiture est nécessaire pour réellement apprécier la vie dans cette ville. Pour le moment nous nous tâtons. Seul moi aie le permis et je trouve qu'avec nos vélos nous nous en sortons très bien. Bah, je verrais ça plus tard.

Je sursaute quand la sonnerie de mon portable se met en route. Je réponds vivement en jetant un oeil aux passagers du wagon. L'homme âgé semble complètement perdu au milieu de ses rêves. Et une jeune femme avec deux enfants ne semble pas s'offusquer par mon appel.

"Mosh mosh".

La voix de mon grand frère s'élève à l'autre bout.

"At-chan, tu es chez toi?".

"Non, on est toujours dans l'express".

Je regarde ma montre.

"Encore une vingtaine de minutes".

"Okay. C'est pour te dire qu'on sera-la d'ici une heure. Donc ça devrait aller".

Je souris à une petite fille d'une dizaine d'années qui me fait des grimaces de sa place. Sa mère la reprend aussitôt.

"Oui, on avait prévu pour".

J'entends le portable changer de main et la voix de ma petite sœur me perce les tympans.

"Tu vas bien?!".

"Tu n'es pas obligé de crier, petit monstre".

Elle éclate de rire et je peux entendre la voix de ma mère lui demander de se calmer. Mako vient d'avoir sept ans, elle est insouciante et joyeuse. Nous avons une grande différence d'age mais cela ne nous empêche pas de nous adorer.

Mon grand frère, Tomoaki, travaille avec mon père dans une société de comptabilité. Il est plus âgé que moi de cinq ans et nous nous sommes toujours chamaillés pour un rien. En ce moment, sa grande passion est de me caser avec n'importe quelle fille qui lui aurait tapé à l'œil. Le seul problème étant qu'en matière de petite amie, nous n'avons pas du tout le même goût. Et puis, pour le moment, je suis plus intéressé sur le dernier jeu de rôle sorti que le sourire rouge brillant de ma voisine de palier. J'ai eu plusieurs aventures au lycée, rien de bien sérieux, mais rien d'extraordinaire pour me donner envie d'être perpétuellement collé par une fille comme Tomo. D'ailleurs, maman commence à le rappeler à l'ordre car il approche de la trentaine et devrait penser à se marier. J'ai encore tout mon temps, après tout je vais prendre vingt et un dans un mois.

Ma mère est psychologue pour enfant. Nous avons grandi dans un environnement très sain et les problèmes que peuvent avoir tous les enfants ne nous ont jamais embêtés. Peut-être sommes-nous un peu trop protégé, mais nos parents nous laissent beaucoup de liberté.

Ma famille vient nous rendre visite car une conférence à laquelle mon père et mon frère vont participer va avoir lieu à Tsukuba à partir de lundi. Et comme ils veulent aussi voir l'endroit ou je vis, ils ont décidé de venir trois jours avant. Cela fait un moment que je ne les ai pas eus sur le dos. Mais je les aime vraiment et suis ravi qu'ils me rendent visite.

Mon père a réservé des chambres à l'Epochal juste à côté de la salle de conférence et à deux minutes de mon appartement. Je sais que son séminaire est le mardi matin et j'ai hâte d'y être. Je n'ai jamais eu l'occasion de voir mon père présenter ses travaux et je prendrai une journée rien que pour y assister.

« Tu n'as pas oublié ton ours en peluche ? ».

« Nan ! Peko-chan est avec moi ! Est-ce que Ma-ni sera avec toi ? ».

Je lance un regard vers Masato qui me sourit. Je lui tends l'appareil en murmurant :

« Mako-chan ».

Ces deux-la s'entendent comme larron en foire. L'esprit encore gamin de Masato est un vrai délice pour Mako et ils n'hésitent jamais à faire les quatre cent coups ensembles. Ils s'adorent et ça se voit.

« C'est ma petite princesse ? ».

« Ma-ni ! Tu vas bien ? ».

Je souris. La conversation part sur le dernier jour d'école de Mako et sur ce qu'elle compte faire durant cette semaine imprévue de vacances. Après un court moment, Masato me rend le portable.

« Ta maman ».

« Tout va bien Atsushi ? ».

« Oui, comme je te l'ai dit y'a une semaine. Aucun problème ».

Elle s'inquiète toujours pour un rien. Et pourtant elle sait bien qu'avec moi il n'y a jamais de problèmes, j'ai toujours été sage et obéissant. Y'a peu de chance que je change du jour au lendemain.

« Très bien. Nous seront bientôt là ».

Nous discutons un petit moment de choses et autres puis je raccroche. L'express va entrer en gare.

Je sens que les sept jours à venir vont être agréables.