DANS UNE CAGE OU AILLEURS
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THROUGH THE BARRICADES
ÉPILOGUE
Les filles galopent sur les pelouses vert tendre du parc, je regarde ma montre, assis sur un banc. Elles sont increvables. Après les boutiques de Soho ce matin on a visité Trafalgar Square, Big Ben et Buckingham Palace, elles ont encore assez d'énergie pour galoper derrière les écureuils. C'est un long week-end de mai, Tara baragouine quelques mots en anglais dans les Mc Do, elle est adorable avec ses couettes. Lily, elle, commence à bien maîtriser quelques notions d'anglais, le système scolaire s'est amélioré en langues ou alors c'est le bénéfice des voyages successifs. Je leur demande de me rejoindre dès que je peux à l'étranger, c'est une bonne expérience pour elles même si Lucie est persuadée du contraire et fait tout pour m'emmerder systématiquement. C'est la première fois qu'elles verront James en dehors du tournage et j'appréhende un peu.
- Les filles, il est tard, on va rentrer à l'hôtel se rafraîchir avant d'aller dîner.
- Oh non, pas déjà papa. Regarde, il est pas tard, il fait même pas nuit.
- Vi, on s'amuse trop, renchérit Tara, toute rouge.
- Oui mais on va être en retard…
- Allez papa, fait Tara avec sa mine de Chat Potté et je fonds.
- Ok on fera l'impasse sur le retour à l'hôtel, on ira dîner directement.
Je jette un œil sur mon portable, pas de message, ouf. J'ai toujours peur qu'il annule au dernier moment, il reste assez insaisissable. Nous ne vivons pas ensemble, il ne l'a pas voulu. C'est préférable pour beaucoup de raisons mais ça crée aussi des flottements et des incompréhensions. Parfois il m'échappe, disparaît dans la nature pour revenir quelques jours plus tard, toujours évasif. Je lui fais parfaitement confiance mais la petite tristesse que je lis au fond de son œil me peine souvent, même si je sais que je ne peux rien faire. La perte de son père lui a causé un terrible coup au moral, il cache sa peine sous une indifférence ou un cynisme blasés mais je sais que la faille est là, elle me fait peur.
À dix-neuf heures j'arrive à convaincre mes démons qu'il est temps de manger, nous nous partons en taxi « Mais papa regarde le taxi il roule du mauvais côté, on va faire un accident » pour aller au restaurant. C'est un bon endroit, discret et à l'écart, nous nous installons à table alors que les filles cherchent les hamburgers sur la carte, en vain.
- Pourquoi il y a encore une place de vide ? interroge Tara en buvant son coca.
- Parce qu'on attend quelqu'un.
- Qui ça ? se rembrunit Lily.
- James, vous savez, l'acteur.
- Oh, on va faire un film papa ? s'écrie Tara en tapant dans ses mains.
- Non, pas ce soir bichette mais je vais en tourner un avec James en effet.
- On pourra venir ? lancent-elles les deux en même temps, épatées.
- Ma foi, oui, je pense. Sur une partie du tournage en tout cas, pendant les vacances. Ce n'est pas encore sûr, il faudra voir avec votre mère, je réponds prudemment.
- Mais avec maman on s'ennuie trop, on préfère faire des films avec toi.
- Dites pas ça à votre mère sinon elle ne vous laissera pas venir, les filles.
- On tournera encore près de chez papy et mamie, comme l'année dernière ?
- Non, pas cette fois. Cette fois ça se passera en Irlande du Nord.
- C'est où l'Irlande du Nord ? En Amérique ? s'exclame Tara subitement intéressée.
- Non, c'est plus haut que l'Angleterre, débile, souffle Lily en levant les yeux au ciel.
- Chuuut les filles, on se calme. C'est pas encore fait alors on reste calmes, ok ? dis-je en commandant un verre.
Le restaurant commence à se remplir, James n'est toujours pas là. Les filles se tortillent sur leurs chaises « Papa on a faim », je leur commande des chips au vinaigre en désespoir de cause. Elles mangent n'importe quoi, heureusement que Lucie ne le sait pas. Lily se concentre sur la carte tarabiscotée en tirant un peu la langue, je lui traduis au cas par cas les mots qu'elle ne connaît pas mais la moitié de la carte est en français, snobisme oblige.
- Il pourrait venir ton ami, on l'attend tout le temps, maugrée Lily en grignotant ses chips.
- Comment ça ?
- Déjà l'année dernière sur le tournage il était toujours en retard. Il avait même quitté le tournage, tu te souviens ?
Oh que oui. Souvenir horrible, qui me laisse de sueurs froides.
- Oui. Mais c'est parce que son père était très malade. Il est mort depuis, d'ailleurs. Mais on n'en parle pas, ok ?
- Ben alors il n'a plus de raison d'être en retard !
- Lily !
- Pourquoi tu retravailles avec lui alors, s'il t'embête ? ajoute-t-elle en plissant les yeux.
- Mais enfin… parce que… c'est un très bon acteur, voilà tout. Pourquoi tu demandes ça ?
- Oh parce que… comme ça, fait-elle en rougissant.
- Parce que quoi ? C'est maman qui t'en a parlé, hein ? Elle t'a dit quoi ? dis-je en baissant la voix alors que Tara joue avec sa console.
- Rien. Enfin des trucs bizarres… enfin j'ai pas bien compris, ajoute-t-elle en haussant les épaules.
Je me gratte la tête pour trouver une réponse adéquate – sans mentir et sans la choquer non plus - quand James entre dans le restaurant et vient s'asseoir à notre table, un peu gêné, bafouillant des excuses.
- Tu connais mes filles ?
- Bien sûr ! glapit Tara. J'ai même un ortographe de toi chez moi et mes copines sont super jalouses…
- On dit autographe, chérie. Tu vas bien ? Tu veux un verre ? dis-je en me tournant vers James.
- Un coca, comme d'habitude, fait-il d'un ton las sans nous regarder.
- Il était super bien le film qu'on a fait ensemble, déclare Tara en se redressant.
- Oui et toi t'étais super bien aussi, dis-je en lui caressant la joue.
- T'étais la meilleure, reprend James avec un sourire et Tara se rengorge de fierté.
Lily lève les yeux au ciel et nous commente la carte d'un air sérieux, nous passons commande. Petit à petit James se détend car les filles l'interrogent avec beaucoup d'intérêt sur son métier, un sujet inoffensif.
-Tu vas tourner dans le nouveau film de papa ? fait Tara la bouche pleine.
- Oui. On l'a écrit ensemble.
- Moi aussi je sais écrire, lance Tara avec fierté.
- Mais bien sûr banane que tout le monde sait écrire, fait Lily en haussant les épaules, mais écrire un film ça veut pas dire ça. Ça veut dire qu'il faut inventer une histoire, la découper et la tourner.
- Ah, d'accord… Et ça parle de quoi ce film ? fait la petite.
- C'est une histoire de guerre en Irlande du Nord. Des gens qui se détestent parce qu'ils ne sont pas de la même religion mais qui tombent amoureux quand même, alors ils ont beaucoup d'ennuis. Il y a beaucoup d'attentats, c'est comme la guerre.
- C'est la guerre entre les catholiques et les protestants, précise Lily fièrement.
- Ah bon ? Moi j'ai des amis protestants, on se déteste pas.
- Mais là-bas c'est un contexte particulier, une vieille rivalité. C'est pas comme chez nous.
- C'est pas trop dangereux d'aller là-bas ?
- Pour l'instant non, je ne pense pas. Enfin j'espère, dis-je avec une boule d'angoisse dans la gorge.
Tara hausse les épaules, perplexe, puis demande à James :
- Moi je suis catholique, et toi ?
- Protestant, fait James avec une petite grimace.
- Oh mince, tu vas faire la guerre avec papa, alors ?
- Non non, on est amis, dis-je en souriant. Et c'est juste un film, c'est pas pour de vrai.
- Ah, comme quand t'embrassais Sharon ? demande Tara en se tournant vers James qui sursaute.
- Arrête Tara, tu peux pas comprendre, fait Lily en lui roulant de gros yeux. C'est du cinéma, c'est pas pour de vrai, on te dit.
James plonge le nez dans son assiette, gêné, Tara hoche la tête pensivement puis reprend :
- Ça fait comment d'embrasser les gens pas pour de vrai ?
- Ça fait rien du tout, répond James froidement. On fait semblant, c'est tout. Comme toi quand tu joues avec tes copines.
- Et t'es payé pour jouer et faire semblant ? Cool… Moi je veux faire ça aussi quand je serai grande.
- Oui, et James est très grassement payé pour ça, d'ailleurs, j'ajoute d'un ton sentencieux.
- Et pendant ce temps-là papa toi tu te tapes tout le boulot !
- Oui, c'est exactement ça, dis-je en riant. Je crois que je me fais avoir dans cette histoire…
Tara finit son assiette de bon appétit alors que Lily continue ses questions sur les tournages, je suis touché de voir combien James lui répond avec sérieux, comme à une adulte.
- En tout cas moi je veux jouer dans votre film, déclare Tara tout de go, et je veux gagner beaucoup d'argent !
- T'as bien raison, faut pas te laisser faire par les méchants réalisateurs, lui souffle James.
- C'est ça, fourre-lui ces idées-là dans la tête, je maugrée pour la forme. Quelqu'un veut un dessert ?
- Moi ! Moi ! font les filles en levant le doigt.
- J'en veux bien un aussi, ajoute James avec un clin d'œil. Au chocolat.
- Oui, moi aussi, moi aussi !
- Du calme les enfants. Pourquoi j'ai l'impression d'être votre père à tous ?
- Parce que t'es vachement âgé, murmure James.
- Oh oui, t'es super vieux papa. Et puis tu nous grondes tout le temps.
- Moi ? Alors que je vous laisse faire tout ce que vous voulez ? C'est la meilleure, ça. Je vais vous renvoyer chez votre mère, moi…
- Oh non papa moi je veux encore faire du cinéma avec toi et James, susurre Tara en posant sa tête sur le bras de James. Parce que t'es trop beau James…
- Ouh là, ça c'est une déclaration, dis-je avec un clin d'oeil. C'est une demande en mariage ?
- Arrête de dire des bêtises, lance Lily à sa petite sœur. Tu sais même pas s'il est pas déjà fiancé…
- T'es fiancé ? demande la petite à James en ouvrant de grands yeux.
- Non.
- Ah, tu vois ! rétorque Tara à Lily.
- Mais j'aime quelqu'un déjà, rajoute James en évitant de me regarder.
- Pour de vrai ou tu fais semblant ?
- Pour de vrai, répond-il après une petite hésitation en frôlant ma jambe sous la table.
- Et tu vas te marier ? continue la petite.
- Non. On s'aime, c'est déjà beaucoup. Pas besoin de mariage.
Je sens mes entrailles se serrer et je lance un petit coup d'œil ému à James qui s'efforce de rester sérieux. Un flot chaud de désir et de bonheur m'embrase, j'ai envie de l'embrasser et même plus, je me contente de boire une gorgée de vin. Il faudra qu'il reste ce soir, j'ai trop envie de lui. Je soupire et passe ma main sous la table, il rougit légèrement.
- De toute façon le mariage ça finit toujours mal, hein papa ? décrète Lily en pinçant les lèvres.
- C'est vrai, oui, dis-je sans réfléchir. Enfin non. Ça dépend.
- Mais toi tu vas pas te remarier, hein papa ? demande Tara inquiète.
- Ce n'est pas à l'ordre du jour, non, je réponds en m'efforçant de rester sérieux.
Lily et Tara plongent le nez dans leurs gros desserts, ma main remonte le long de la cuisse de James qui se cambre légèrement. Je vois les filles qui commencent à bailler, bientôt elles seront au lit. Je jette un nouveau coup d'œil à mon voisin qui soupire alors que je le caresse subrepticement. Non, pas moyen qu'il rentre seul ce soir, j'ai trop envie de lui.
- Tu tourneras dans tous les films de papa ? interroge Tara toute barbouillée de chocolat.
James sursaute puis ouvre la bouche, indécis. Il me regarde et je hausse les sourcils, la réponse n'appartient qu'à lui.
- Je ne suis pas sûr, commence-t-il gêné. Peut-être que ton papa en aura marre de moi.
- Je ne pense pas, non, dis-je d'un ton léger. Mais c'est mieux de changer de réalisateur pour la carrière d'un acteur.
Tara hoche la tête gravement, je vois Lily sourire.
- Mais on continuera à écrire ensemble, reprend James. On a encore plein plein d'idées.
Cette fois c'est moi qui souris et détourne les yeux en sentant sa main sur mon genou, alors qu'une vague chaude se répand en moi. Oui, plein d'idées…
Les murs des urgences sont d'un vert terne, James gémit sur son brancard, le visage meurtri. Son bras cassé est plâtré, un mince filet de sang coule de sa tempe, sous ses cheveux. Médecins et infirmières passent rapidement, transportant d'autres blessés de la fusillade, les bruits métalliques résonnent douloureusement à mes oreilles. Encore un attentat, encore la violence. Inacceptable, intolérable. Quotidienne.
Je suis à distance dans un coin sombre et je retiens mon souffle, l'observant en douce. Il est un peu abruti par les calmants, sa lèvre gonflée vire au mauve, le bruit des ambulances qui se succèdent ne cesse pas. Autour de lui des malades attendent des soins, des infirmiers courent en poussant des brancards.
Soudain un homme entre, il avance lentement vers lui, jetant de petits coups d'œil alentour. James pousse un gémissement et semble vouloir se redresser mais il ne peut pas bouger, coincé sur son lit d'hôpital. L'autre reste quelques minutes immobile sur le seuil, hésitant, débraillé, les cheveux en bataille, l'air hagard.
- Non, murmure James alors qu'il se rapproche.
Une infirmière revient prendre ses constantes et repart rapidement, sa blouse verte est tachée et elle soupire, accablée. Dehors le bruit des voitures de police se mêle aux ambulances, l'ambiance est électrique. L'homme fait un pas, James se crispe.
- Va-t'en Ian, murmure-t-il en détournant la tête. On ne doit pas nous voir ensemble.
- Mais…
- Pars. Maintenant.
- Mais quand tu rentreras tu m'appelleras ? demande Ian à voix basse, les lèvres crispées.
James secoue la tête et mon cœur accélère, il y a tant de douleur sur son visage que je souffre aussi. Ian fait un nouveau pas et s'assoit sur le bord du lit, James murmure :
- Non, c'est fini. Tu risques gros, pars. C'est trop dangereux.
- Non, fait Ian d'un ton plus ferme.
- Tu sais ce qui va se passer si on nous voit ?
- Je n'ai pas peur. Personne ne m'empêchera de te voir.
- C'est de la connerie. Pars. Tout de suite.
Ian prend la main de James en catimini sur le drap, des larmes brillent dans ses yeux. Les sirènes de police se rapprochent, je les vois mains crispées, tendus et pâles, se regardant avec désespoir. Et ça me fait mal.
- Tu sais qu'ils nous recherchent. Ils sont après nous, c'est trop dangereux.
- Et j'irais où, sans toi ?
- Chez toi. Faut plus qu'on se voie…
- Je peux pas. Je te jure que je peux pas, souffle Ian en se mordant la lèvre.
Un médecin entre à son tour et lance :
- Je dois l'examiner. Partez…
- Mais je peux rester dans le couloir ?
- Vous feriez mieux de partir. Je dis ça pour vous, ajoute-t-il plus doucement.
Ian fait mine de se pencher mais James détourne la tête, il finit par se relever à contrecœur et sort à reculons.
- J'ai pas peur. Je reviendrai.
James ne répond pas, je reconnais cette crispation dans sa mâchoire, je bloque ma respiration. Ils ne se quittent pas du regard, j'ai l'œil sur la montre. Le médecin sort et Ian revient d'un pas pressé, il se penche et embrasse James avec violence, dévorant littéralement ses lèvres. J'avale difficilement ma salive, le baiser est langoureux et vorace, un truc me chatouille dans le ventre. C'est quoi cette rougeur sur leurs joues ?
- Coupez ! retentit soudain, tout le monde respire.
Ian me lance un coup d'œil, c'est la troisième prise, il s'est encore gouré dans son texte. Ce serait bien qu'il picole moins, il est incontrôlable. Mais parfait pour le rôle. Ses lèvres sont rouges, je m'efforce de le fixer dans les yeux uniquement. James ne me regarde pas, je leur donne à nouveau mes indications le plus froidement possible. La script a l'air soucieuse, le perchman est fatigué.
- Ce serait bien que tu revoies ton texte, Ian, dis-je alors qu'il s'apprête à quitter le plateau.
- Hmmm…
- T'as compris ?
- Oui, je suis pas idiot. Mais c'est un texte à la con, je confonds les phrases.
- Désolé, c'est pas du Shakespeare.
- Ça, tu peux le dire, mon pote.
Il sort, James ne bouge pas du faux lit d'hôpital, la maquilleuse retouche ses lèvres. Je me penche discrètement vers lui alors que l'équipe s'affaire derrière nous.
- Ça va ? je lui demande alors qu'il fait la moue.
- Ce con m'a mordu. Exprès.
- Eh bien dis donc, c'est très sexe entre vous.
- Arrête. Ce con me déteste.
- Mais non James, tu te fais des idées.
- Tu parles. On fait une dernière prise et on arrête, je n'en peux plus, je te jure.
- On arrête si elle est bonne.
- Benjamin…
Mon assistant me rejoint, James fait la tête. J'ai l'impression d'être le surveillant d'une colonie, ma patience est à bout. Ian revient sur le plateau avec dix minutes de retard, il se concentre cinq secondes et il est juste, dans le ton. Étonnant. Dommage qu'il ne sache pas son texte. James est déconcentré, livide, assez crédible finalement, sauf que je sais qu'il est mal. Vraiment. Parce que l'autre con va le mordre à nouveau, par vengeance.
Après la huitième prise la scène est enfin bouclée, James s'enferme dans sa caravane sans un mot. Après un long débrief et la préparation des scènes du lendemain avec mon équipe, je file tambouriner à sa porte.
- James. James, c'est moi, ouvre…
Pas de réponse. Il doit bouder, j'imagine ses lèvres, sa moue, un flux traverse mon corps, j'ai envie de lui.
- James, bordel ! C'est important.
La porte s'entrouvre, James retourne s'asseoir devant son miroir pour se démaquiller sans me jeter un coup d'œil. Je pose ma main sur son épaule, il se dérobe, le visage amer.
- J'ai parlé à Ian. Il m'a dit qu'il n'avait pas fait exprès de te mordre.
- Bullshits. Il l'a fait trois fois. Pas exprès. Tu parles.
- Mais je ne comprends pas ce qu'il…
- Je te l'ai dit, il est jaloux.
- Mais non.
- Mais si. Je gagne plus que lui et il dit que c'est parce que je couche avec le réalisateur. Qu'on est que des enculés tous les deux.
Je fais la moue pour tempérer ses paroles même si techniquement il n'a pas tort. Je passe ma main dans ses cheveux, il se dérobe à nouveau.
- Te laisse pas emmerder par ce con, James.
- Et on couche même pas ensemble ! reprend-il, révolté.
- Parce que tu ne le veux pas, au nom de je ne sais quel principe. Mais tout le monde sait que nous sommes ensemble, tu crois qu'on trompe qui ?
- Mais…, fait-il en levant enfin les yeux sur moi.
- Je crois que tu te trompes de combat. À nous deux on sera plus fort, James, et… j'ai besoin de toi.
Sans un mot je le prends par les épaules pour le faire se lever et je le serre dans mes bras, il me semble le sentir trembler contre moi, c'est peut-être juste le froid, la fatigue. Ou l'amour.
Nos bouches se rejoignent lentement, je glisse mes doigts sur sa peau, impatient. Ça fait du bien de le sentir contre moi, ça fait du bien d'être touché par lui. Il me semble que je revis, que je respire par sa peau, que je vibre par ses doigts. Je ressens sa peine comme il ressent ma peur mais elles s'annulent sous nos chairs offertes et caressées, elles disparaissent quand nous nous ne faisons plus qu'un, enfin.
FIN