Deux coups frappés discrètement à une porte, laquelle s'entrouvrit pour laisser passer une tête brune inquiète.
_ Evan ? Je peux entrer ? Demanda presque craintivement le propriétaire de la tête brune.
_ Hn, grogna le capitaine en continuant à regarder par le hublot.
_ Ça c'est ma réplique, voulut plaisanter gentiment l'agent spécial.
_ Je ne suis pas d'humeur à rire, grogna le châtain.
_ Ne me parle pas comme ça, le prévint doucement Alexis, je n'y suis pour rien et même j'aimerais bien comprendre.
Le reproche n'en était pas vraiment un, la voix qui l'avait prononcé était bien trop calme et posée. Evan ne répondit pas mais laissa son amant approcher. Ce dernier se plaça dans son dos, entoura sa taille de ses bras et l'attira plus encore contre son torse. Ainsi calé, Evan se détendit instinctivement.
_ Je ne m'excuserais pas pour James, commença-t-il d'une voix boudeuse, je l'avais prévenu. Je pense qu'il doit avoir la mâchoire inférieure déboîtée et il faudra sû...
_ Je me fous de James, le coupa le brun toujours aussi calmement, il l'a cherché en effet et il a survécu à pire. Non, moi ce qui me tracasse c'est cette pouf blonde qui s'est pendu à ton cou, cracha-t-il légèrement plus irrité.
_ Hm ! Jaloux ? S'étonna Evan en se retournant dans ses bras.
_ Oui, fut la réponse honnête et ferme d'Alexis.
De surprise, Evan se dégagea de l'étreinte et se recula de quelques pas, attendant de toute évidence des précisions de son amant.
_ Elle t'a appelé « Evan chéri », grommela ce dernier.
Evan eut son premier vrai sourire depuis qu'ils avaient quitté sa cabine ce matin là et embrassa tendrement son homme. Il relâcha ses lèvres délicatement et enfoui sa tête dans son cou.
_ Tu n'as rien à craindre 'Xis, cette fille est folle. On s'est rencontré la première année où j'ai servi sous les ordres de l'Amiral Gordon, lui expliqua-t-il, au bout de quelques semaines elle s'est mise à me tourner autour mais je n'étais pas intéressé. Ça ne l'a pas arrêter, en quelques mois, on est passé du stade drague lourde au stade harcèlement. Je ne pouvais plus faire un pas sans qu'elle soit dans mes traces et tout le monde a cru qu'on était ensemble, soupira-t-il à ce souvenir. Elle n'a rien démenti et s'est mise à colporter des rumeurs sur nous deux, elle m'attendait dans ma cabine en petite tenue, elle me coinçait dans les couloirs pour m'embrasser et tu penses biens que je ne pouvais décemment pas la frapper ! Le problème c'est que les relations de ce genre sont interdites entre marins d'un même bâtiment. J'ai failli me faire virer, c'est Gordon que je dois remercier pour avoir conserver mon poste et mon grade à cette époque là, lui confia-t-il, l'éclairant sur les liens véritables entre le militaire et son compagnon.
Après un silence plus qu'explicite sur l'état de nerfs d'Alexis, il consentit enfin à en faire part à son amant d'une manière très concise.
_ Elle n'a pas intérêt à t'approcher à nouveau ou je ne répond plus de rien, lâcha-t-il froidement, une lueur folle dans les yeux.
_ On fait un marché 'Xis, quand elle arrivera à monter à bord, commença-t-il à expliquer, et crois-moi elle y arrivera, crut-il bon de préciser, tu auras tout le loisir de m'embrasser et de me câliner devant elle, avec un peu de chance elle fera une attaque ! Sourit-il à l'avance, savourant dans son esprit la tête qu'elle tirera.
_ Même devant tes hommes ? S'étonna Alexis, un sourcil relevé.
_ Cette fille est une vraie plaie, je ne suis même pas sûr que ça la freinerait en fait, eut-il peur soudainement. Et oui, même devant mes hommes, reprit-il après un frisson, j'y ai réfléchit et c'était plus une excuse pour moi qui avait encore du mal à m'affirmer dans notre relation, avoua-t-il à son compagnon en revenant dans ses bras comme pour s'excuser. Après cette nuit, crois-moi je n'ai plus aucun doute, lui susurra-t-il en mordillant ses lèvres, le faisant haleter. J'y ai pensé ce matin au réf, j'ai eut envie de te prendre dans mes bras et de t'embrasser quand tu es parti, la présence de mes hommes ne m'est revenu en tête qu'après, termina-t-il en déposant des baisers légers dans son cou. Je me suis dit qu'après tout ...
_ Alors à vos ordres Capitaine, fit Alexis tout sourire en fondant sur ses lèvres.
Quelques baisers et caresses plus tard, les deux jeunes hommes rejoignaient les autres à la passerelle, ne manquait que James et Amely. Il avait été reconduit à sa cabine, toujours sonné et Amely l'avait accompagné pour le soigner.
Evan savait que Yoan et Gordon avaient expliqué la situation aux autres, aussi ne revint-il pas sur le sujet, considérant qu'il était clos, il reprit où ils en étaient, comme si cette interruption n'avait pas eu lieu. Ils définirent différents plans possibles en fonction des situations qu'ils auraient à subir. Entre extrapolations et simulations, ce fut à peine si ils virent Amely revenir. Lorsque Quang Tan s'aperçut de sa présence, il lui tendit la main pour qu'elle le rejoigne et d'un simple regard lui posa une question.
_ Il s'est endormi à cause des calmants, lui répondit-elle. Il avait la mâchoire inférieure déboîtée, ça n'a pas été une partie de plaisir, soupira-t-elle en se massant la nuque, il a interdiction de parler ou même de manger quoi que soit de solide jusqu'à demain minimum. Ce n'est pas bien méchant mais c'est douloureux. Donc pour l'instant, il doit rester dans sa cabine et manger à la paille, conclut-elle en lançant un regard en coin au capitaine.
Ce dernier ne put retenir un sourire satisfait et froid d'étirer ses lèvres, même ses anciens collègues frissonnèrent à sa vue, ils connaissaient bien ce sourire, c'était celui qu'il arborait aussi bien en mission qu'à l'entraînement lorsque son bataillon avait remporté une victoire. Ce fut Gordon qui prit les choses en main.
_ Oliver ! L'interpella-t-il. Je ne sais pas exactement ce qu'il se passe entre vous deux, bien que je crois en avoir une petite idée, ajouta-t-il en jetant un œil sur Alexis qui ne se gêna pas pour le lui rendre, néanmoins, que tu le veuilles ou non, nous aurons besoin de lui, alors la meilleure chose à faire pour le moment serait d'éviter que vous ne vous croisiez ou au moins que vous ne vous parliez.
_ Vous avez raison Amiral, je tenterais d'être raisonnable, soupira-t-il.
Et à la surprise de tous, il se tourna vers Alexis pour se placer dans ses bras, lequel lui rendit son étreinte en l'embrassant sur la tempe. Comme si de rien n'était, l'agent spécial embraya sur les derniers points afin de conclure cet entretien, il était midi passé et ils avaient encore du travail.
_ Donc nous sommes d'accord que notre meilleur chance est demain après-midi à partir de seize heure ? Penny ? Demanda-t-il pour avoir confirmation.
_ Les bulletins météo sont formels, ce sera la seule accalmie, confirma-t-elle, elle durera jusqu'au milieu de la nuit et les tempêtes reprendront de plus belles pendant au moins cinq jours.
_ Donc si nous n'y allons pas demain nous serons coincés encore presque une semaine, accroissant de façon exponentielle les risques de voir l'OD débarquer, réfléchit Evan à voix haute. Quang Tan, le matériel est-il prêt ? Le mini Polochon ?
_ Oui Capitaine, nous avons terminé les modifs et vérifier que l'orage de l'autre jour n'a rien endommagé.
_ Bien alors tout le monde sait ce qu'il a à faire, nous irons à terre cet après-midi, bon appétit, conclut-il la réunion avant de prendre la main du brun et de le tirer à sa suite.
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_ Tu stresses pour demain ? Demanda doucement Evan en caressant tendrement le torse de son brun.
_ Non.
L'air pensif d'Alexis ne rassura pas son compagnon. C'était à peine si il avait desserré les dents depuis leur visite à l'entrepôt pour récupérer le matériel.
_ Ça suffit ! Claqua la voix du capitaine alors qu'il se redressait sur le lit pour dévisager Alexis. Dis-moi ce qui te tracasses, ordonna-t-il, parce que là tu vois, je suis dans tes bras, nu, en train de caresser ton torse avec ma langue et toi tu réagis à peine, résuma-t-il la situation, le ton de sa voix grimpant progressivement, donc soit tu t'es déjà lassé de moi soit tu es préoccupé, dans les deux cas c'est frustrant et vexant !
_ Pardon mon ange, fit Alexis, contrit en le ramenant contre lui. Je ne me lasserai jamais de toi, je suis juste inquiet, j'ai eu l'impression qu'on nous filait tout l'après-midi et ça jusqu'à ce qu'on remonte à bord. Ce qui m'énerve c'est de n'avoir repéré personne, se justifia-t-il. Mais ça n'excuse pas mon inattention envers toi, reprenons, je te promets d'être complètement impliqué maintenant, sourit-il vicieusement en lui mordillant la gorge.
_ Hummm, je sais pas, je suis vexé quand même, répondit le châtain en tentant de fuir l'étreinte de son homme.
_ Evan, gronda ce dernier.
_ Arrête de grogner et embrasse-moi, éclata-t-il de rire en voyant la mine frustrée de son coussin improvisé.
Alexis lui fit ravaler son rire en posant ses lèvres sur les siennes. Ils reprirent effectivement leurs activités à grands renforts de caresses, pas toutes des plus sages. La journée avait été longue, la tension était encore montée d'un cran par rapport au matin et cela irait en s'empirant.
Tant qu'ils n'auraient pas mis ces foutus documents en sécurité, tout le monde serait à cran et ils le savaient. Ils ne devaient pas rater leur chance demain ou le bateau allait exploser avec toute l'énergie négative qu'ils accumulaient.
Cependant, même si ils avaient besoin de dormir et de reprendre des forces, rien n'aurait put empêcher les deux amants de s'unir à nouveau toute la nuit.
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_ Capitaine ! On l'a ! retentit une voix dans la passerelle.
_ Montre-moi Stephen.
Le marin se poussa et laissa son siège au capitaine. Evan poussa un soupir de satisfaction devant l'écran du sonar. L'épave était là, enfin. Depuis une heure qu'ils la cherchaient, ils tournaient autour depuis le début. Elle s'était coincée dans une faille et était restée bloquée, l'ouverture dans le fond sous-marin était trop étroite pour qu'elle n'y tombe complètement et s'était tant mieux, car autrement ce n'est pas à 243 mètres qu'ils auraient dût plonger mais au moins à 3800.
Or, si Polochon pouvait y descendre sans problème, cela leur aurait tout de même pris bien trop de temps. Evan sentit la présence de son amant derrière lui, il laissa sa tête partir en arrière, s'appuyant contre le torse rassurant.
_ Prêt à descendre Alexis ? Murmura-t-il.
_ Puisqu'il le faut.
_ Ok. Bon travail Stephen, va rejoindre Penny, elle te dira ce qui reste à faire. Yo, contacte l'amiral et dis-lui qu'on l'a puis fais jeter l'ancre. Quang Tan, toi et tes gars préparer le submersible, on y va, lança-t-il ses ordres en se redressant, il serait bien resté ainsi dans son étreinte, mais il n'était plus temps.
_ Oui Capitaine.
_ Ok Capitaine.
Bon, ça y était, le moment qu'ils attendaient et redoutaient depuis plus de deux semaines. Sans un mot, Evan et Alexis partirent à la cabine du capitaine afin d'enfiler des vêtements plus chauds et de se préparer. Ils passèrent ensuite au bureau où ils récupérèrent les plans de l'épave afin de ne pas chercher à l'aveuglette. Une fois prêts, ils rejoignirent l'ensemble de l'équipage sur le pont afin d'embarquer dans le mini sous-marin.
Charlélie leur donna les dernières recommandations de prudence et Alexis donna ses dernières directives à James quant à leur général, à savoir ne rien dire pour le moment et attendre d'être sûrs d'avoir les documents avant de le prévenir.
Le blond n'était pas dupe, c'était tout autant par mesure de précaution que dans l'espoir de gagner un peu de temps auprès de son amant. Pourtant, comme si l'altercation de la veille l'avait ramené à de meilleures dispositions, il prit sur lui pour respecter les dites consignes et leur souhaita bonne chance.
Il restait un soldat, bien que son comportement des derniers jours puisse amener à en douter, et la mission était tout autant importante pour lui qu'il s'agissait surtout de la sécurité de sa sœur bien-aimée. A croire que la vie en mer ainsi que la promiscuité permanente avec les autres lui avaient fait oublier ses priorités. Qu'à cela ne tienne, il s'occuperait d'Alexis plus tard.
_ Allez, c'est partit, à toi l'honneur Alexis, fit Evan en lui montrant le sous-marin.
Les deux hommes s'y installèrent et Quang Tan recommença les gestes de la dernière fois. Il activa le treuil, les souleva et les déposa à l'eau. Ils encaissèrent le choc et Evan mis les moteur en marche, brancha les liaisons radios et les caméras puis s'occupa des projecteurs.
Il fit un petit check-up et l'équipage put voir Polochon s'enfoncer dans l'immensité glacée de l'océan polaire. La température de l'eau à la surface ne devait pas excéder les 2 degrés et celle de l'air avoisinait les 10° mais cela ne tarderait pas à chuter car le soleil serait bientôt trop bas pour continuer à les réchauffer de ses rayons ardents.
Il était presque six heure du soir et cela avait beau être une belle journée, ils n'en restaient pas moins à la frontière du cercle polaire et l'air se faisait nettement plus froid que les températures qu'ils avaient connus les jours précédents.
A l'intérieur du sous-marin, Evan semblait contrarié, sa langue claqua contre son palais, signe que quelque chose l'agaçait.
_ Que se passe-t-il ? S'inquiéta Alexis.
_ J'ai l'impression d'oublier un truc, murmura-t-il en réfléchissant, mais je ne sais pas quoi, ça m'énerve ... Ah ! Que je suis con ! S'écria-t-il en se tapant le front d'une main.
Il lâcha une des commandes, tendit la main vers le tableau de bord et après quelques manipulations, de la musique s'éleva dans le cockpit.
_ Ahhhh ... ça va mieux, marmonna-t-il en s'enfonçant dans son siège.
_ T'es pas possible, je m'imaginais déjà le pire, être obligé de remonter pour récupérer un truc important ou quelque chose comme ça mais non, monsieur voulait juste créer une ambiance, le gronda gentiment le brun.
_ Te moque pas 'Xis. Tu ne peux pas comprendre, la plupart du temps je descend seul, alors j'ai pris l'habitude de mettre de la musique, se justifia-t-il. Tu sais bien que je peux pas m'en passer, c'est plus fort que moi, il n'y a que ça qui me détend.
_ Il me semblait avoir trouvé une autre façon de te relaxer pourtant, non ? Le taquina le brun d'une voix joueuse en glissant une main sur son genou.
_ Tu as très bien compris ce que je voulais dire, le réprimanda Evan en retenant un frisson, tu sais que ta méthode est inégalable, non ? Surtout quand tu ...
_ Heu ... les gars, vous êtes conscients qu'on entend tout ce que vous dites ? Les coupa brutalement Charlélie.
Les deux hommes sursautèrent de concert, ils tournèrent leur tête vers l'écran les reliant au bateau. Ils y virent Penny morte de rire en arrière-plan aux côtés de James plus dégoûté qu'autre chose, Amely et Yoan arboraient un petit sourire plus discret mais n'en pensaient pas moins, Charlélie et Quang Tan par contre étaient aussi rouges et gênés que les deux concernés.
Evan ne savait plus où se mettre et il était fortement tenté de couper la communication, Alexis toutefois conserva en apparence son stoïcisme à toute épreuve, mais il remerciait intérieurement le blond de leur avoir rappelé leur présence.
Finalement, Evan reprit contenance et après un petit raclement de gorge s'excusa pour cette aparté légèrement déplacée. Ne voulant pas risquer de renouveler cette expérience, il laissa brancher la caméra intérieure mais coupa la radio, signalant à ses amis qu'ils la remettraient en arrivant sur l'épave.
_ Merde, j'y crois pas, ils ont tout entendu, se désola Evan en levant les yeux au plafond.
_ Ce n'est pas si grave mon ange, après tout, ils sont un peu ta famille, alors quelle importance ? Voulut le rassurer son compagnon.
_ Ouai, mais quand même ... ma seule consolation c'est que James a entendu aussi, ajouta Evan avec un sourire carnassier.
Préférant ne pas s'aventurer à nouveau vers ce terrain glissant, Alexis opta pour la stratégie du « courage, changeons de sujet ».
_ Dis-moi, pourquoi la musique a-t-elle prit une si grande place dans ta vie ?
_ Je n'ai aucun talent de musicien si tu veux tout savoir, je chante à peine juste même, mais après la mort de mon père elle a été mon seul refuge et depuis je ne peux plus m'en passer, sourit-il tristement, il me suffit d'un instrument, d'un air, du timbre d'une voix pour que je me déconnecte. Tu me trouve ridicule ? S'inquiéta-t-il.
_ Au contraire, je t'envie, je n'ai jamais eu de refuge comme ça.
_ Alors je te prêterais le mien, on ira à deux si tu veux ? Lui proposa amoureusement le capitaine, une lueur d'espoir dans les yeux.
_ Avec plaisir, accepta Alexis. Et là tu nous as mis quoi ?
_ Là ? Sonata Arctica.
Alexis pouffa et Evan le regarda, surpris.
_ Pourquoi ris-tu ?
_ Arctica ? Je trouve que c'est plutôt ... de circonstance.
Evan resta dans le vague une seconde puis comprenant l'allusion, il rendit son sourire à son amant. Il n'avait vraiment pas fait exprès et encore moins fait le rapprochement. Mais effectivement, ce groupe d'Europe du Nord au nom si frais lui parut d'un seul coup très approprié à leur « escapade ».
_ Tu sais, j'aime quand tu partages tes pensées et tes souvenirs avec moi, j'ai l'impression qu'on est plus proche ainsi, lui confia Alexis.
_ Oui, c'est un peu comme si on continuait le jeu des questions mais de façon plus spontanée, renchérit Evan.
_ Hn. C'est quoi ça ? Demanda Alexis en désignant une masse sombre à environ 50 mètres devant eux.
_ Notre but. Rallume la radio s'il te plaît.
Aussitôt dit, aussitôt fait.
_ Yo ? On y est, prévint-il le navire.
_ Ok, soyez prudent.
S'approchant tel un grand prédateur, le sous-marin entreprit de faire d'abord un tour de reconnaissance. Alexis, armé du plan, tentait de se repérer. L'épave reposait sur le flanc gauche, la proue surélevée par rapport à la poupe, lui donnant presque l'air de vouloir remonter à la surface. C'était réellement impressionnant de se trouver face à elle en vrai, de l'avoir sous les yeux pour de bon.
Le navire était de taille assez impressionnante, rivalisant avec l'Orca et si dans la pénombre des fonds-marins on ne pouvait que deviner son état de délabrement, lorsque la lumière des projecteurs créait un halo sur telle ou telle partie du navire, celui lui conférait une allure des plus fantomatiques.
Un sentiment étrange étreignit les deux hommes lorsqu'ils commencèrent à faire progresser le sous-marin vers l'entrée du couloir qu'ils savaient mener au bureau du défunt capitaine. Ils comprenaient parfaitement ce qu'avaient dût ressentir les premiers explorateurs à pénétrer dans les pyramides. Cette sensation de violer un lieu de repos, car à n'en pas douter, ils allaient inévitablement croiser quelques restes de squelettes.
Evan stabilisa Polochon devant le couloir grâce aux bras télescopiques et lança le mini dans les entrailles du navire. Alexis le guidait, était ses yeux et le capitaine ne relâchait pas son attention. Son bébé avait été modifié et celui-là, il n'avait pas pu le tester avant. Concentrés comme ils l'étaient à leur tâche, ils ne se rendirent pas compte qu'à l'écran, les visages de leurs amis venaient de se décomposer.
A la surface, l'équipage pouvait suivre leur progression grâce aux caméras intégrées et chacun retenait son souffle à mesure que le robot téléguidé approchait de son but. Il dut pour cela forcer quelques portes mais tout se passait bien. Ce qui n'était pas le cas sur l'Orca, toutes les personnes présentes sursautèrent ou poussèrent des cris de surprise au premier coup de feu qui retentit.
Ils n'eurent pas le temps de se poser de questions qu'une gerbe d'eau s'éleva à quelques brasses à peine du bateau. Se ruant à la baie vitrée, Yoan put apercevoir un navire faire face aux frégates alors qu'un hélicoptère tentait de se rapprocher de l'Orca. Les deux bâtiment de l'amiral ne leur laissaient pas une seconde répit, ils faisaient feu à tout rompre, les mitraillettes ne s'arrêtaient pas, empêchant à la fois l'hélico et le navire pirate d'approcher.
Dans l'urgence du moment, Yoan hurla à Quang Tan de prendre le contrôle du fusil mitrailleur à l'avant du bateau pour le diriger également sur l'hélico. Cette manœuvre allait permettre à l'une des frégates de cesser un instant ses tirs afin de s'approcher suffisamment de l'Orca pour relier les deux navires avec une passerelle d'abordage, permettant ainsi à une partie des soldats de venir prendre position sur le navire de recherches.
Les bateaux enfin réunis, les militaires se déployèrent et investirent les différents ponts du bateau, mais à leur grande surprise, la menace aérienne fit soudain demi-tour et disparut. Le bateau pirate ne fut pas long à se dégager du tir nourri de la marine Naskayenne pour lui aussi s'enfuir brusquement.
_ Putain mais c'est quoi ce bordel ? Hurla le vietnamien, hors de lui.
_ Calme-toi, ça ne te ressemble pas de parler comme ça, ressaisis-toi, lui ordonna d'une voix ferme Charlélie.
_ Pour quelqu'un qui a failli y passer et qui vient de voir son investissement flottant se faire canarder je te trouve bien calme ! Rétorqua Quang Tan, toujours pas calmé.
_ Non, il est encore sous le choc, je ne crois pas qu'il ait vraiment tout réalisé, c'est arrivé trop vite, répondit doucement Yoan en prenant son amant dans ses bras.
Il avait raison, son compagnon était sous le choc, l'attaque n'avait duré qu'une trentaine de minutes, ils y avaient paré de la même façon que dans l'une des simulations faites la veille. En fait, tout avait trop bien fonctionné, comme si le bateau ennemi avait lui aussi assisté aux « répétitions ».
Yoan décida de contacter Gordon pour lui en parler mais il devait d'abord retourner voir où en était Evan.
A peine retourné à la passerelle qu'il put apercevoir, et entendre, Evan hurler pour qu'on lui explique la situation. Il avait apparemment suspendu les recherches en voyant que plus personne ne leur répondait.
_ Evan !
_ Bordel ! Cria ce dernier. Vous étiez où ? Qu'est-ce qui se passe ?
_ Evan, laisse-le parler, le coupa Alexis en voyant que le capitaine n'était pas prêt de se calmer.
_ Merci Alexis. Bien, alors surtout gardez votre calme, fit Yoan d'une voix qui se voulait rassurante, tout le monde va bien ...
_ Abrège ! Ordonna sèchement Evan, les yeux froids.
_ Nous avons été attaqués, avoua Yoan, un hélico et un bateau léger. Nous avons riposté, une partie des soldats de l'amiral ont pris leur position sur l'Orca et les pirates, envoyés par l'OD à n'en pas douter, ont fait demi-tour.
Evan et Alexis encaissèrent la nouvelle mais une rage froide sourdait dans les prunelles du capitaine alors que le visage d'Alexis reflétait plutôt de l'incompréhension.
_ Tu veux dire qu'ils ont abandonné ? Demanda-t-il confirmation.
_ Oui, je sais c'est étrange, James est parti contacter Gordon, dès que j'en sais plus, je vous tiens au courant. Vous, vous en êtes où ?
_ On y est presque, le mini est dans la cabine, reste plus qu'à trouver le coffre, répondit Alexis en voyant qu'Evan avait toujours les mâchoires contractées de colère.
_ Faites attention, lança Yoan avant de couper à nouveau la communication.
Evan bouillait mais il se devait de rester concentré afin de finir tout ça au plus vite pour remonter voir l'état de son navire. Il sentit à ses côtés la présence réconfortante de son amant, ce dernier lui posa une main sur la nuque et entreprit un léger massage, juste de quoi détendre un peu.
_ Merci, souffla le châtain en laissant sa tête retomber un peu en arrière.
_ Je t'en prie, essaie de te contrôler, plus vite on aura fini et plus vite on remontera.
_ Hm. C'est bizarre quand même, pourquoi sont-ils partis aussi vite et surtout sans faire plus de dégâts que ça ? S'inquiéta-t-il sans lâcher son écran des yeux.
_ Nous y réfléchirons une fois à la surface, un problème à la fois. Ne t'inquiète pas, ils sont bien protégés, tenta de le rassurer son amant.
_ Je sais. Je t'aime.
Alexis le regarda, un instant surpris d'entendre une déclaration dans un moment pareil, mais ... après tout, pourquoi pas ? Si ça pouvait rassurer Evan ?
_ Je t'aime aussi, lui sourit-il en retour, maintenant concentrons-nous.
_ Je l'ai ! Il est là, regarde ! S'exclama alors Evan, le faisant sursauter.
_ Je le vois, tu vas pouvoir l'atteindre ? Lui demanda-t-il après s'être remis de son mini infarctus.
Evan le regarda avec son petit sourire narquois, celui qui disait clairement « sais-tu seulement à qui tu parles ? ».
_ Rien ne me résiste, susurra-t-il d'une voix très suggestive accompagnée d'une œillade racoleuse.
Et là, Evan vit pour la première fois ce que personne n'avait jamais vu avant lui, Alexis Miyaki en train de rougir.
_ Non, je le crois pas ! Tu as rougi ! S'extasia presque Evan devant les pommettes cramoisies de l'agent spécial.
Le regard noir que tenta de lui jeter ce dernier ne fit ni chaud ni froid à Evan, pour autant il était tout de même soulagé de lui avoir changé les idées, il ne valait mieux pas qu'Evan se prenne la tête avec les pirates alors que de là où il était il ne pouvait rien faire.
_ Bon, c'est pas tout ça mais on a un coffre à remonter, se recentra Evan.
Et avec délicatesse, il manipula le robot afin qu'il attrape le coffre, le décoinçant de sa gaine murale. Le mini refit le chemin inverse et après avoir déposé son précieux fardeau dans la nacelle de Polochon, il y reprit sagement sa place.
Evan souffla enfin, relâchant la tension dans ses muscles et remit la radio pour les prévenir qu'ils remontaient.
_ Sinon, ça y est vous avez parlé à Gordon ? Leur demanda-t-il après les avoir prévenu.
_ Oui, il pense que … commença Yoan avant d'être interrompu de manière peu poli par James.
_ Si vous permettez j'aimerais faire part des conclusions de cette entrevue avec mon équipier afin d'en débattre avec lui.
Yoan s'effaça de mauvaise grâce et laissa sa place au blond. Evan reporta immédiatement son regard sur l'étendue des fonds marins, cherchant à canaliser sa tension autre part. Alexis prit également sur lui pour ne pas exploser, il devait faire contre mauvaise fortune bon cœur et finir cette mission avec son collègue.
_ Je t'écoute.
_ L'amiral pense que l'attaque avait pour but de détruire l'Orca, l'hélico faisant diversion, commença-t-il. Mais quand celui-ci s'est approché il a dû voir que le sous-marin n'était déjà plus là, comprenant qu'ils étaient arrivés trop tard, ils ont fait demi-tour. Toujours selon Gordon, ils chercheront probablement à récupérer les documents une fois que nous serons à terre. Qu'en penses-tu ?
_ C'est une possibilité, répondit prudemment Alexis en enregistrant toutes les informations une par une, ça aurait été une mission suicide si ils avaient dû couler l'Orca, ils se seraient fait descendre par la marine en s'approchant plus qu'ils ne l'ont fait.
_ Ça ne serait pas la première fois que l'OD envoie des kamikazes, rétorqua James en fronçant les sourcils à ce souvenir.
_ Hn. En tout cas, restez sur vos gardes, rien ne dit qu'ils ne vont pas revenir, le prévint le brun.
_ Le mieux serait qu'un hélicoptère vienne nous chercher directement sur l'Orca pour nous amener au jet, ce serait plus prudent que de retourner au port où ils risquent de nous attendre, argumenta James avec un sourire en coin qu'il ne put réprimer.
_ Hn. Je contacterais le Général en arrivant à bord.
_ Je vais le faire, se proposa rapidement James.
_ J'ai dit que je le faisais, trancha Alexis d'un ton qui n'admettait aucun refus et le blond ne put que serrer les dents avant de mettre fin à la communication.
_ C'est gentil Alexis, sourit tendrement Evan quand le brun se retourna à nouveau vers lui, mais tu ne fais que repousser l'inévitable et tu le sais aussi bien que moi.
_ Je sais.
Le brun soupira et posa sa tête sur l'épaule du capitaine, seul geste qu'il pouvait se permettre pour ne pas gêner Evan dans sa conduite mais celui-ci lui en fut tout de même reconnaissant.
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Evan regarda autour de lui, tentant de jauger les dégâts, effectivement rien de bien grave, rien qui empêcherait l'Orca de naviguer en tout cas. Le voyage de remontée avait été trop rapide à son goût et ils étaient déjà en train de se diriger vers la passerelle, le coffre dans les mains.
Ils se regroupèrent autour d'Alexis qui finit par ouvrir le coffre, ce dernier, plus endommagé qu'il n'y paraissait, n'opposa pas beaucoup de résistance.
Il révéla une liasse de documents papiers légèrement humide ainsi que des mini disques contenant probablement les mêmes informations. Tout était en bon état, vive les coffres étanches ! Après leur avoir jeté un rapide coup d'œil, s'assurant que c'était bien là ce qu'ils recherchaient avec tant de ferveur, Alexis les plaça dans un porte-documents.
Tous se fixaient en silence, conscients que tout ce qu'ils avaient traversé jusque là se justifiaient par ces quelques éléments à l'apparence si insignifiante. C'était terminé. l'Orca et son équipage avait accomplis la mission pour laquelle ils avaient été réquisitionnés, leur rôle s'arrêtait là. Et ils se sentaient soudain si vides.
Toute cette tension, cette adrénaline qui coulaient encore dans leur veine les maintenaient dans un état de fièvre intense mais ils savaient qu'ils n'y trouveraient plus aucun exutoire. En un peu plus de deux semaines, ils avaient vécu plus de choses qu'en une année. C'était tellement étrange, ce vide.
_ Et bien ... je propose que l'on fasse une pause en attendant l'hélicoptère qui ramènera James et Alexis, proposa Charlélie en brisant le silence, tout le monde en a besoin, et une fois au port nous pourrons rendre ses marins à l'amiral Gordon, pas la peine de leur imposer à nouveau une acrobatie d'un bateau à l'autre, nous avons bien assez de place pour le moment. Evan, tu devrais mettre tout ça au coffre en attendant tu ne crois pas ?
Charlélie, cher Charlélie, qui lui offrait l'occasion de rester en tête à tête avec Alexis mais qui lui rappelait en même temps de manière subtile le proche départ de son compagnon.
_ Bien sûr, s'inclina-t-il devant l'évidence. Alexis ?
_ Je te suis, acquiesça ce dernier.
_ Je viens aussi, je suis tout aussi responsable de ces documents, s'avança James sous les regards haineux de tous ceux présents.
_ Là tu l'as rêvé très fort ! Tu restes là et que je ne te vois pas à moins de dix mètres du bureau du capitaine !
Ni Evan ni Alexis n'avait eut le temps de répondre que Penny s'était jetée sur James, apparemment elle aussi avait de besoin de relâcher la pression et le blond venait de lui en offrir la possibilité sans même le savoir. Les deux amants n'en attendant pas plus, se dirigèrent vers le bureau pour y trouver un peu de calme et surtout d'intimité.
Poussant la porte, Alexis laissa passer Evan en faisant remarquer qu'il ne connaissait pas ce côté de la jeune femme, mais Evan n'en avait cure. Il attendit seulement qu'Alexis ait posé le porte-documents pour le plaquer brusquement contre la porte que lui-même venait de refermer. Sans lui laisser le temps de protester, il se jeta sur sa bouche et l'embrassa avec une fougue et une passion peu communes.
Alexis en eut le souffle coupé et se laissa complètement submergé par les sensations, sous le feu de la passion, il inversa la situation et coinça à son tour son amant entre son corps et la porte. Fermant les yeux il fit abstraction de tout ce qui n'était pas Evan, savourant pleinement leur étreinte, leur corps qui se frottaient l'un à l'autre, leurs mains qui se caressaient jusqu'à plus soif.
Une ombre devant la lumière émise par le hublot et Evan eut juste le temps de retenir son amant qui s'effondrait pour se retrouver nez à nez avec un revolver.
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J'espère que ce chapitre vous plaira, je passe en coup de vent, alors juste merci à toutes les personnes qui sont toujours là, si il y en a encore ;)