Coucou et bonne année, si si je peux encore, jusqu'au 31 janvier !

Alors voilà une petite fic en 4 parties qui, je l'espère, vous distraira.

Disclaimer : les persos sont à moi et vous les connaissez si vous avez lu quelques unes de mes fics, l'idée de base pour le monde dans lequel ils évoluent vient du manga Gundam Wing. A la base cette mini-fic est une fanfic, j'ai adapté pour la faire en originale car en fait je l'aime beaucoup ^ ^ De plus pour ce qui est de l'idée de fond, elle vient d'un épisode de Stargate SG1 et la chanson se nomme Beyond the black hole et appartient à Gamma Ray, je vous la conseille, je l'ai mis en français directement. Voilà, je crois que j'ai fait le tour.

Genre : romance, science-fiction type anticipation, BL

Rating : M ( vous commencez à me connaître ...)

Note : pour ceux qui ne le savent pas, vous découvrirez très vite que je suis prof d'histoire géo, la première partie vous aurait mis la puce à l'oreille de toute façon ! J'ai essayé de rendre les explications les moins rébarbatives possible mais elles me semblaient incontournables pour que vous puissiez comprendre même sans connaître le manga, même si j'avoue avoir pas mal extrapolé.

Sur ce, j'espère que ça vous plaira.

Enjoy !

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_ Cette fois c'est la fin mon vieux, souffla Evan à son armure mobile.

A l'abri dans son cockpit, le pilote profitait du calme de l'espace. Lui était à même de comprendre pourquoi l'Homme avait un jour ressenti le besoin de venir se retirer dans l'espace. Il ne s'agissait pas seulement d'une nécessité par manque de place comme le pensait le citoyen lambda qui n'avait jamais quitté la Terre. Mais ceux qui, comme lui, avait eu la possibilité de voir au moins une fois l'étendue glaciale, si pure, si parfaite … eux savaient. La sérénité qui se dégageait de l'espace était son seul réconfort en cet instant.

Quatre siècles plus tôt, les voyages dans l'espace n'étaient qu'un passe-temps pour une partie de la population assez aisée. Très vite cet engouement s'était transformé en une recherche approfondie quant il était apparu que la surface de la Terre ne suffirait plus pour la population humaine.

Si les avancées médicales étaient considérées comme un bienfait pour cette même population, l'augmentation de l'espérance de vie à l'échelle mondiale qui en avait résulté ne laissait plus d'autres solutions aux gouvernements que de chercher une planète capable d'accueillir une partie de la population.

Après des années de sondages infructueux, le Conseil International, dernier fils de l'ONU d'une époque dépassée, avait tenté l'impossible. Aucune planète à proximité de la Terre ne pouvait les recevoir ? Qu'à cela ne tienne, ils en construiraient. Cette idée saugrenue avait été étudiée, conceptualisée et finalement menée à bien.

Peu y avait cru. De nombreux détracteurs, pacifistes ou non, s'étaient élevés dans tous les pays. La population n'étant pas au fait des prévisions alarmantes sur lesquelles se basaient les chefs d'État ne comprenait pas la nécessité de cette entreprise et rechignait face aux augmentations d'impôts qui en avaient découlé. D'autres, les plus extrémistes, refusaient purement et simplement l'idée de quitter la Terre, création de Dieu. Quelque soit le Dieu en question d'ailleurs. Si Dieu, donc, avait voulu voir ses « enfants » ailleurs que sur Terre, il les y aurait mis lui-même, voilà ce qu'ils pensaient ces militants, bien loin de se douter que dans peu de temps l'urbanisation à outrance de la planète serait irréversible, plus de place pour la culture, pour l'élevage, pour la préservation du patrimoine mondiale, pour les espaces verts … L'environnement proche deviendrait invivable et ne regrouperait plus que des robots sans âme parqués dans des bâtiments immenses s'élevant autant qu'ils s'enfonceraient dans le sol pour gagner de la place. C'était ça que les présidents, les ministres, les chanceliers, les rois, les empereurs craignaient, se passant cette peur viscérale d'un homme à un autre en même temps qu'ils se passaient le pouvoir, juste pour être sûrs que leur successeur ne tenterait par d'arrêter le projet « Colonies ».

Et après plus d'un siècle d'études, plus un autre siècle de travaux, à l'image de ces immenses cathédrales des temps immémoriaux, les nouvelles « colonies » spatiales avaient été inaugurées. Cinq. Une par continent, ou presque. C1 pour l'Europe de l'Est et une grande partie de l'Asie, C2 pour le continent américain, C3 pour le continent arabe, C4 pour l'Europe de l'ouest et du nord et C5 pour l'Asie du sud-est qui avait depuis longtemps été la plus peuplée.

Elles possédaient un régulateur d'atmosphère, un régulateur de climats, un circuit interne de distribution d'eau, une surface végétale et rocheuse semblable à celles des continents d'où elles avaient été prélevés. Tout cela avait coûté une fortune, mais les études de marché qui avaient été réalisées étaient formelles, cela aurait été beaucoup plus onéreux de tenter d'adapter ces technologies sur des planètes déjà existantes. On y trouvait également la même faune et la même flore que dans les pays représentés, le même style architectural également.

De cette façon, le choc était moins brutale, les colons se retrouvaient sur un territoire le plus semblable possible à celui qu'ils avaient quitté, avec une population qui venait elle aussi de leur pays. Même langue, même culture, même tradition … bref, comme si ils étaient toujours sur Terre.

Bien entendu, ils pouvaient demander une dérogation pour s'installer dans une autre colonie, ou sur une autre partie de colonie que celle qui leur correspondait, la liberté de circulation était la même que sur Terre. Les gouvernements provisoires instaurés étaient similaires là aussi, même si il était probable qu'ils changeraient rapidement, sur le principe de la démocratie.

En parallèle, de nombreuses navettes spatiales avaient été construites, une propagande relevant du matraquage publicitaire avait été instaurée dans tous les pays, promettant monts et merveilles à ceux qui choisiraient de s'expatrier, à l'image des premiers colons qui avaient décidé de quitter l'Europe pour le continent américain, rêvant d'une vie meilleure, libérée de l'oppression des despotes absolus.

Et nombreux furent les volontaires. Peu à peu, la population des colonies s'étaient stabilisée, permettant de réguler celle de la Terre, même si elle restait beaucoup moins peuplée que leur grande sœur. Les gouvernements avaient été grandement soulagés. Peu de problèmes finalement, et rien qui n'avaient pu être résolu rapidement.

De plus, à l'ère de la propulsion nucléaire, les navettes mettaient entre cinq et vingt heures pour se rendre dans les colonies, de la plus proche aux plus lointaines, sur l'orbite lunaire. Ce qui au final, pour les familles qui se trouvaient séparées entre Terre et colonies, n'était pas insurmontable.

Durant plusieurs décennies, la vie s'était installée, organisée, tranquillement. Rien de fondamentalement différent. Les entreprises s'étaient implantées, les commerces multipliés, les écoles avaient été créées, les villes s'étaient développées, les relations entre les colons instaurées et les gouvernements stabilisés.

Une sorte de sentiment de reconnaissance était né entre expatriés, passant même d'une colonie à une autre. Elles commencèrent à prospérer en commerçant plus facilement entre elles qu'avec la Terre, allant même jusqu'à la concurrencer sur le plan économique.

Cette forte croissance avait conduit de nombreux gouvernements colons à réclamer plus d'autonomie auprès de leur « métropole » respective, voir même une totale indépendance. Après plus d'un siècle d'installation, ils estimaient ne plus avoir à rendre des comptes à leur pays d'origine. Ils ne vivaient pas la même vie que sur Terre, même si elle en était proche et ils pensaient que les gouvernements terriens n'avaient pas à leur dicter leur fonctionnement puisqu'ils étaient trop loin pour les comprendre vraiment, eux et leur mode de vie.

En réponse à ses velléités, somme toute justifiées et amenées pacifiquement, les gouvernements terriens avaient répondu par une mobilisation massive d'hommes et une forte hausse de leur production d'armes et d'armures mobiles légères.

Sentant la guerre arriver, un groupuscule de scientifiques militants pour l'indépendance des colonies avaient mis en commun leur travaux de façon à trouver une parade contre ces forces armées terrestres. Ils construisirent cinq armures mobiles à partir d'un alliage de leur conception, fondu en gravité zéro pour accroître leur résistance sur Terre.

Dans le plus grand secret, chacune de ses armures fut construite sur une colonie, les scientifiques coupant tous les ponts entre eux pour ne pas se faire repérer. Le seul mot d'ordre à respecter était d'envoyer ces armures sur Terre au même moment afin de lancer l'offensive contre l'armée terrestre. Ils trouvèrent chacun de leur côté un pilote capable de contrôler ces monstres de métal encore jamais vu dans la galaxie, ignorant encore à ce moment-là que ces cinq garçons formeraient rapidement une équipe de choc, inséparables malgré les obstacles.

Et alors ce fut la guerre...

Evan regardait le Soleil approcher, il commençait à avoir vraiment, vraiment très chaud. La sueur perlait sur son front et le long de sa colonne vertébrale et sa combinaison le collait désagréablement. Malgré la température caniculaire, il frissonna en pensant à ce qui l'attendait. Il ne regrettait pas sa décision, pourtant il devait bien admettre qu'il avait peur.

_ Donne-moi le courage de vous rejoindre love. J'arrive ...

Serrant une photographie dans sa main gauche comme si sa vie en dépendait, le pilote de la colonie C2 enclencha les propulseurs de son armure mobile, direction la boule de feu immense qui se dessinait sous ses yeux.

Il les ferma et se laissa aller. Il se plongea dans ses rêves, attendant patiemment que la mort l'emporte comme elle avait emporté tout ceux qui avait un jour eut une place dans son cœur.

Ses yeux le démangeaient fortement et il sentit des larmes glisser le long de ses joues, il avait un peu de mal à les différencier des perles de transpiration mais il savait qu'elles étaient là.

Il se morigéna. Il ne devait pas avoir peur. Il allait goûter au repos des guerriers, une paix plus que méritée. Toute sa vie n'avait été que combats et sang, il s'en était sorti mais le prix à payer avait été sa seule famille et l'amour de sa vie. Les autres pilotes n'avaient pas survécu à la guerre, la victoire leur avait été fatale, encore une fois, il était seul ...Mais pas pour longtemps.

Son armure se dirigeait droit vers la sphère incandescente maintenant. Son pilote ne s'en souciait pas, il n'était plus vraiment là, perdu dans ses souvenirs d'une vie presque heureuse. Lentement, l'armure dévia de sa trajectoire, quittant peu à peu la route du Soleil. Sa course s'accéléra de plus en plus, elle était comme aspirée.

Evan se redressa brusquement, il avait moins chaud et n'était définitivement pas encore mort. Il jeta un œil devant lui par le hublot et s'activa sur ses écrans de contrôle.

_ Qu'est-ce que c'est que ce bordel ?! Hurla-t-il en secouant ses manettes. Tu vas répondre oui !

Il paniqua, ce n'était pas du tout ce qui était prévu. Il devait mourir ce soir ! Il sentait sa tête bourdonner, un mal de crâne carabiné poindre le bout de son nez et son estomac se serrer douloureusement à l'idée qu'il ne pouvait même pas réussir son suicide. Puis il releva la tête et resta bouche bée.

_ Merde alors ...

Pour le coup, il retrouva tout son calme. Ce qui s'étendait devant ses yeux valait tous les spectacles. Il allait peut-être réussir à mourir finalement. Il venait de comprendre pourquoi son « ami » ne répondait plus. L'attraction gravitationnelle qui s'exerçait sur l'armure était plus forte que tout et elle prenait encore de la vitesse.

En quelques secondes, AC2 et son pilote furent aspirés par un trou noir. Une masse sombre et imposante au milieu des étoiles lumineuses de l'espace. Un immense champs d'une gravité si forte que rien ne pouvait s'en échapper, pas même la lumière.

Un sourire apparut sur les lèvres du pilote, il se cala confortablement au fond de son siège et ferma les yeux, sa photo toujours fermement enserrée dans sa main. C'était parfait en fin de compte, en plus il n'avait jamais aimé la chaleur...

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_ Mission réussie.

AC1 s'éleva dans les airs, suivit immédiatement par le reste de l'équipe. Derrière eux, les restes d'une base terrestre fumaient toujours et on pouvait apercevoir des débris d'armures mobiles carbonisés. Les soldats rescapés s'étaient sûrement réfugiés dans la forêt toute proche et ne sortiraient qu'une fois certains du départ des Démons, comme ils les appelaient.

_ 01 à 03, 04 et 05, on rejoint la base spatiale des profs, on a besoin de ravitaillement et de réparations.

_ Compris.

_ Je te suis.

_ On y va.

Chaque pilote coupa son émetteur et les propulseurs grondèrent alors que les armures prenaient la direction de l'espace. Cette bataille n'avait pas été bien compliquée mais elle laissait quelques dégâts qu'il fallait réparer au plus vite. En tant que chef reconnu de l'équipe, Alexis Miyaki prit la tête et les autres suivirent sans mot dire. Ils étaient tous fatigués. Leurs missions se faisaient de plus en plus rapprochées. Ils commençaient à atteindre leurs limites même si aucun ne le reconnaîtrait.

Aux commandes du AC1, Alexis plissa les yeux et fronça les sourcils. Il n'aimait pas les contretemps et de toute évidence, ce qui apparaissait devant lui en était un. Une masse sombre ressemblant vaguement à une armure mobile très perfectionnée semblait dériver au gré des vents spatiaux.

_ 01 à tous, on ralentit et on coupe les moteurs, obstacle non identifié à deux heures, les prévint-il.

_ Qu'est-ce que c'est ?

_ Je ne sais pas encore 05, gronda le japonais. Si je le savais je n'aurai pas précisé non identifié.

Il n'aimait pas parler pour ne rien dire et là, c'était le cas. Il entendit vaguement un juron en vietnamien mais ne s'en préoccupa pas. Ils étaient tout près maintenant et cela ressemblait fortement à une de leurs armures, trop pour être une coïncidence. Ce n'était pas normal. Il tenta d'entrer en communication avec lui mais il n'y avait de réponse sur aucune fréquence.

_ Je vais le remorquer jusqu'à la base, on avisera là-bas, leur annonça-t-il d'une voix qui n'attendait aucune réponse.

_ Ce n'est pas que je veuille te contrarier 01, fit une nouvelle voix prudemment, mais tu es sûr que c'est une bonne idée ? Et si c'était un piège, si l'armure était piégée ?

_ Je prends le risque 03, répondit-il tout de même. Pas question de laisser une telle armure dériver et tomber entre les mains des forces terrestres. Elle semble bien trop puissante. Autant que les nôtres, ajouta-t-il plus bas, comme pour lui-même.

_ Tu ne crois pas que les …

_ Je ne sais pas. On y va, le coupa-t-il brusquement.

Il ne voulait pas se poser ce genre de questions, cela impliquerait trop de choses. Il agrippa solidement l'armure noire et remit ses moteurs en marche, direction les profs … et ils avaient intérêt à avoir une bonne explication !

Lorsque la porte géante du hangar s'ouvrit, les armures s'engouffrèrent dedans et se posèrent en douceur. AC1 eut un peu plus de mal à manœuvrer à cause de son encombrant colis mais il y parvint tout de même. Les autres avaient eut le temps de sortir de leur cockpit et se dirigeaient grâce à la passerelle vers celui de l'armure mystère. Alexis les y rejoignit, tout aussi intrigué.

_ Que fait-on Alexis ? Demanda Quang Tan en avançant machinalement vers le système d'ouverture.

_ On l'ouvre.

_ Tu es sérieux ! Sursauta Charlélie. Enfin Alexis, on ne sait rien de cette armure …

_ Raison de plus pour l'ouvrir.

_ Fais-lui confiance Charlélie.

_ Mais … Yoan ...

Devant l'air impassible du rouquin, le pilote 04 capitula et se poussa du chemin. Alexis dépassa Quang Tan et actionna le système d'ouverture extérieure. L'air sous pression fut relâchée dans un silence de mort, les quatre pilotes venaient d'apercevoir la silhouette d'un jeune homme inconscient aux commandes. Un jeune homme coiffé d'une longue natte aux reflets caramels, au visage angélique et paisible et qui devait avoir environ leur âge.

Aucun d'entre eux, pas même leur chef, n'avait imaginé que le pilote puisse encore être là. Ils avaient imaginé, chacun de leur côté, divers scénarios tels qu'une panne obligeant le pilote à abandonner son armure grâce à la capsule de survie, ou encore un problème de remorquage … mais ils ne s'étaient vraiment pas attendu à ça.

Charlélie, qui, comme de nombreux enfants nés dans les colonies de parent nés également dans les colonies, avait développé très tôt un don d'empathie assez élevé et avait été le premier à réagir en voyant que personne ne bougeait, il se précipita donc pour vérifier l'état de santé du jeune homme. Il ne souffla que lorsqu'il sentit un pouls battre faiblement et se retourna pour faire face à ses équipiers.

_ Vous attendez quoi pour m'aider ? Une invitation ? Grogna-t-il sans même se retourner vers eux.

Yoan fut le premier à bouger et aida le blond à descendre le blessé du cockpit. Ils le posèrent d'abord sur le sol pour vérifier qu'il n'y avait aucune blessure qui risquerait de s'aggraver en le déplaçant plus encore.

_ Je ne comprends pas, l'armure n'est pas endommagée, il n'a aucune blessure et … vous avez vu la combinaison qu'il porte ? Fit le rouquin en inspectant le corps au sol devant lui.

Tous hochèrent la tête aux paroles de l'infirmier improvisé. Le jeune homme natté devant eux portait la même tenue de pilote qu'eux, la même que celle fournie pas leurs profs. Charlélie et Yoan restaient là, agenouillés près du rescapé, plus personne ne bougeait, réfléchissant à ce que tout cela impliquait. Un des scientifiques avait-il trahi ?

_ Bon, on ne va pas rester là sans rien faire. Je vais chercher les profs, amenez-le à Amely. Si il reprend conscience on pourra l'interroger.

Sur ces bonnes paroles, Alexis les quitta, les laissant toujours un peu perdus mais avec des directives à appliquer. Dans ce genre de situation, ce n'était pas plus mal après tout de se sentir utile, aussi Quang Tan parti à la recherche de la doctoresse, laissant aux deux restants le soin de porter le blessé. Ce ne fut pas chose aisée d'ailleurs que de descendre les marches de la passerelle avec un fardeau pareil mais ils parvinrent tant bien que mal à l'infirmerie.

Tous croisèrent quelques techniciens au passage mais ils ne s'arrêtèrent pas pour leur expliquer la présence d'une cinquième armure ou encore le jeune homme inconscient qu'ils baladaient, ce n'était pas le moment, eux-même n'avaient pas de renseignement et ils n'aimaient pas ça du tout.

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Il ne se souvenait pas s'être jamais senti autant vaseux. Il avait des vertiges alors que ses yeux étaient fermés et qu'il était allongé. Allongé ? Son cœur eut un raté. Il ne devrait pas avoir de vertiges, il ne devrait pas sursauter, il ne devrait rien du tout …

Il devrait être mort ! Or, a priori, ça ne semblait pas être le cas. Il était engourdi et avait l'impression d'être passé dans un mixer mais il était en vie. La question était où ? Et aussi comment ? Son dernier souvenir était une masse sombre qui les engloutissait AC2 et lui alors qu'ils se dirigeaient vers le soleil.

Il entendait vaguement du bruit autour de lui et l'ambiance lui paraissait familière mais il était encore trop tôt pour ouvrir les yeux. Ses réflexes de terroristes enclenchés, il attendait d'être sûr de ne courir aucun risque avant de les ouvrir. Son bras le tiraillait et il reconnu la sensation d'une perfusion, donc … un hôpital ? Les voix devenaient plus claires et il percevait maintenant ce qui se disait autour de lui.

_ … test ADN deux fois ! Je vous assure qu'il n'y a pas d'erreur professeur ! Fit une voix de femme.

_ Et moi je vous assure que c'est impossible ! J'ai vu l'armure que j'avais conçu exploser avec lui aux commandes il y a presque un an, c'est impossible ! S'écria une voix d'homme cette fois.

_ Vous voulez parler de l'armure qui se trouve avec les nôtres dans le hangar ? Demanda une voix aux accents ironiques.

_ … … Oui, finit par souffler le même homme que précédemment.

_ Et cette photo de nous avec lui qu'il avait dans la main ? Interrogea encore une nouvelle personne.

_ J'ai mal, entendit encore Evan.

_ Qu'as-tu ? Répondit un autre.

_ Ce n'est pas moi … c'est lui ! Il se réveille, c'est sa douleur …

Toutes ces voix, c'était impossible, il avait à peine fait attention à ce qui se disait tant le choc de les entendre à nouveau était grand. Paniqué et complètement dépassé par ce qui arrivait, Evan se redressa d'un coup, arracha sa perfusion et se recroquevilla dans un coin du lit, les genoux contre les poitrine et la tête enfouie dedans. Il la secouait lentement de droite à gauche en marmonnant.

Plus personne ne parlait, tous le regardait les yeux écarquillés ou les sourcils froncés. Charlélie, la main sur le cœur, dû se rattraper à Yoan pour ne pas sombrer.

_ Bloque les afflux, lui souffla-t-il, vite !

Il essayait mais n'y parvenait pas, pas entièrement du moins, la vague de souffrance qui lui parvenait était semblable à un tsunami, il n'avait jamais rien ressenti de pareil. Il finit par s'asseoir, Yoan à ses côtés, au cas où.

Evan leur apparaissait comme un animal sauvage et blessé, particulièrement craintif. Ce fut Amely qui s'approcha la première, sous les yeux attentifs de Quang Tan et des professeurs. Elle avança doucement vers le haut du lit où s'était réfugié le pilote et tendit la main vers lui dans un geste calme. La réaction fut immédiate, Evan repoussa violemment la main en hurlant.

_ Noooooooon ! Qui que vous soyez laissez-moi ! C'est impossible ! Vous êtes morts ! Tous ! Morts ! Morts ! Morts ! Morts ! Je vous ai vu mort ! Vous êtes morts ! Répéta-t-il inlassablement.

La stupeur remplaça la méfiance et l'inquiétude. Il les avait littéralement scotchés sur place. Ils le regardaient, hébétés, se prendre la tête entre les mains en hurlant comme un dément. Sa douleur était sans aucun doute réelle, il ne simulait pas, personne n'en aurait douté, pas même les plus incrédules.

_ Je deviens fou, murmura-t-il sans changer de position, … voilà … c'est ça … c'est ma punition … je dois payer mes péchés avant de vous rejoindre … c'est forcément ça … je comprends pas sinon … pourquoi ? C'est si cruel … je vous ai vu morts, tous … je peux pas revivre ça … pas encore … pas encore …

Profitant de son état limite catatonique, Amely s'approcha rapidement et lui injecta un tranquillisant. En quelques secondes, le corps torturé s'effondra sur le matelas et elle en profita pour le recoucher correctement.

_ Pourquoi avoir fait ça ?! S'exclama l'un des professeurs.

_ Mais enfin Gordon ! Se récria-t-elle. Vous n'avez pas vu l'état dans lequel il était ? Vous croyez vraiment qu'il vous aurait dit quoi que ce soit de censé dans cet état ?

_ Amely a raison, je l'ai senti. Il souffrait trop et était très perturbé. C'est rare que je ressente les émotions avec tant de précision, elles étaient si fortes... finit Charlélie dans un murmure, épuisé.

_ Bien, laissons-le, il va dormir au moins trois heures avec ce que je lui ai injecté, quant à nous, nous avons aussi besoin de souffler.

En silence, ils suivirent Amely hors de l'infirmerie pour se retrouver dans la cantine autour d'un café très noir. Ils semblaient tous avoir perdu la faculté de parler depuis quelques minutes. Ils furent vite rejoins par les autres profs. Gordon fut le premier à lever la tête vers eux, il était avide de réponse, n'importe lesquelles pourvu qu'ils aient un début d'explication.

_ Alors ?

_ C'est l'exact réplique des plans que vous nous avez donné, répondit Jean.

Lui et les autres scientifiques avaient été étudier l'armure mobile ramené par le AC1 pendant que les autres attendaient le réveil de celui qui semblait en être le pilote. Gordon leur avait confié les plans de l'armure qu'il avait conçu et les profs étaient formels. Il s'agissait bel et bien du AC2 et Gordon ne savait plus quoi penser.

_ C'est à n'y rien comprendre, souffla-t-il.

_ Hn.

_ Merci Alexis pour cette précision, souffla Quang Tan, excédé.

Seul un regard glacial lui répondit. Les deux pilotes asiatiques étaient légèrement à couteaux tirés depuis quelques temps et ils avaient de plus en plus de mal à se supporter et à travailler ensemble. Faire équipe n'était peut-être pas une si bonne idée, ou alors il faudrait changer les tandems,mais Charlélie et Yoan fonctionnaient bien, eux, ensemble.

_ On ne peut rien faire d'autre, alors reposons-nous en attendant qu'il se réveille, fit Yoan pour alléger l'atmosphère.

Les autres acquiescèrent et ils prirent leur mal en patience.

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Cette fois, il ouvrit grand les yeux dès le début. Il avait encore cette sensation de brouillard mais c'était tout de même un peu plus net. Il comprenait pourquoi l'ambiance lui paraissait familière, il connaissait parfaitement cet endroit. Il était à l'infirmerie de la base spatiale des profs. La base qu'il avait vu exploser quelques mois plus tôt, avec les profs dedans.

Il n'avait donc pas cauchemarder, il les avait vu, pour de vrai. C'était à n'y rien comprendre et surtout c'était tellement douloureux. Les blessures de son cœur qui n'avaient pas encore cicatrisées étaient remises à vif d'un seul coup. Son cœur saignait et hurlait à n'en plus pouvoir, c'était insupportable. Jamais il n'aurait pu penser qu'une telle douleur puisse exister.

Est-ce qu'il perdait la tête ? Est-ce qu'il avait inventé ou rêvé les événements des derniers mois ? Est-ce que c'était une nouvelle drogue inventée par l'armée terrestre ? Alors, la guerre n'était pas finie ? Et, plus important encore, ils étaient tous vivants ? Sa famille ? Son amour ?

La douleur le plia en deux sur son lit. C'était si douloureux d'espérer … Il avait si peur. Les sanglots qu'il avait bloqué dans sa gorge quelques heures plus tôt remontèrent brusquement et il s'étouffa presque dans ses propres larmes.

Il pleura comme il n'avait jamais encore pleuré mais aucun être humain n'aurait pu supporter ça sans devenir fou et il se laissa aller, complètement. Il pleura tellement longtemps que lorsque ses larmes se tarirent, il était épuisé … mais vide. Son inconscient avait trouvé un échappatoire à cette situation de dingue. Son esprit s'était enfui et il n'était plus qu'une coquille vide. C'est ainsi que les autres le trouvèrent en revenant dans l'infirmerie.

_ Il est réveillé, vous êtes sûrs ? Demanda Gordon à Amely.

_ Oui, répondit-elle, mais dans quel état ?

Elle retenta une approche et cette fois ne fut pas repoussée, ce qui confirma ses doutes.

_ Je crois que le choc qu'il a subi, quel qu'il soit, a été trop fort, il s'est comme retranché dans son corps.

_ Peut-il répondre aux questions ? L'interrogea Jean d'une voix froide et indifférente.

Elle ne lui renvoya qu'un regard noir qui en disait long sur ce qu'elle pensait. Les pilotes prirent place dans les fauteuils et les profs attendirent que la doctoresse finisse d'ausculter son patient.

_ Bien. Aucun dommage physique à part une légère déshydratation, dit-elle à l'attention des occupants de la pièce avant de se retourner vers Evan dont elle pris la main. M'entends-tu ?

Pour toute réponse, il tourna les yeux vers elle, montrant bien qu'il entendait et comprenait mais qu'il ne se fatiguerait pas à répondre à ce genre de questions.

_ Comment t'appelles-tu ? Demanda-t-elle d'une voix douce.

La question lui fit l'effet d'un pieu de glace en pleine poitrine. Ses yeux s'arrondirent sous le choc et il la fixa comme si elle était devenue sénile. Puis, tout disparu de son regard. Il venait de comprendre que toutes ses théories échafaudées précédemment étaient fausses. Ses yeux redevinrent tristement inexpressifs mais personne n'avait raté les différentes émotions qui s'y étaient succédées.

_ Evan Oliver, souffla-t-il d'une petite voix.

Un hoquet de stupeur résonna dans la pièce et tous tournèrent la tête vers Gordon qui s'était levé brutalement, les mains devant la bouche. Il s'approcha du lit en tremblant sous les yeux vides d'Evan.

_ Impossible … Je t'ai vu mourir Evan.

Le dit Evan cligna des yeux, tentant de comprendre comment sa réplique préférée depuis quelques heures étaient apparue soudainement dans la bouche de son « feu » mentor.

_ Je vous retourne le compliment Gordon, rétorqua-t-il d'une voix amère, moi aussi je vous ai vu mourir. Je vous ai tous vu mourir, dit-il en insistant bien sur le tous.

Ce fut Jean qui pris les choses en main et décida de mettre un terme à cette mascarade.

_ Comment expliques-tu la photographie que tu avais dans la main quand les pilotes t'ont trouvé ?

Toujours autant de tact pensa Evan, puis il ramena son attention sur les autres pilotes, la douleur dans ses yeux quand ils passèrent sur Alexis n'échappa pas au principal concerné qui fronça les sourcils d'incompréhension.

_ C'est Amely qui l'a prise à la fin de la première guerre, on en a tous gardé un exemplaire. Je la veux, où est-elle ?

Sa voix ne trahissait aucun sentiment, aucune émotion, il réclamait sa photo comme il aurait demandé qu'on lui passe le sel à table. Amely, en mode automatique et sous le choc de ce qu'elle venait d'entendre, lui tendit le bout de papier qui avait élu domicile sur la table de chevet et il la serra dans sa main sans même y jeter un œil. Sur ce morceau de papier on pouvait voir toute l'équipe au grand complet, Yoan et Charlélie enlacés aux côtés de Quang Tan qui bougonnait, une main posée sur l'épaule d'Alexis, lui-même le cou encerclé par les bras de l'américain. Ils posaient tous devant une base terrestre sous un ciel d'été. La photo respirait la joie de vivre au contraire de son actuel propriétaire.

_La fin de la première guerre ? Demanda Alexis qui élevait la voix pour la première fois.

Tous virent les yeux d'Evan se fermer comme sous l'effet d'une douleur trop vive mais l'instant fut bref et certains pensèrent même avoir rêvé. De quoi parlait-il ? Non seulement la fin ? Mais en plus de la première ?

_ Ouais, marmonna Evan.

_ Je crois que le plus simple serait que tu nous racontes tout si tu t'en sens la force, précisa Gordon après sa demande, conscient que ce ne serait pas quelque chose de facile.

Evan haussa les épaules, il se recoucha plus confortablement et se mit sur le flanc en position fœtale, la couverture remontée jusqu'au menton, les bras serrés sur la poitrine et la photo contre son cœur. On aurait dit un enfant qui se préparait à raconter à ses parents le cauchemar qui venait de le réveiller.

_ Je commence où ? Demanda-t-il de la même voix sans âme que depuis le début.

Jean allait parler mais Gordon le devança, après tout, il était le seul à connaître, ou à avoir connu Evan et donc le plus à même de trier le vrai du faux.

_ Tout. Depuis le souvenir le plus éloigné de ton enfance dont tu te souviennes, c'est la seule façon, s'excusa Gordon d'une voix traînante.

Il était conscient que si ce garçon était bien le Evan qu'il connaissait, replonger dans ses souvenirs traumatisants ne serait pas facile, pourtant c'était nécessaire. Ils purent entendre un gémissement de bête blessée s'élever de sous la couverture.

Evan accepta la requête avec résignation, il devait être en enfer, c'était probablement son châtiment pour les crimes commis dans sa vie et sa tentative de suicide, il l'affronterait comme un homme.

D'une voix peu assurée, il commença le récit de sa vie, détaillant ses souvenirs des rues sombres de C2 où il avait été recueilli par une bande d'orphelins sans savoir qui il était. La mort de son meilleur ami et protecteur, et son arrivée à l'église Oliver.

La façon dont il avait volé une armure mobile pour tenter de les sauver quand des rebelles les avaient pris en otage, le fait qu'il était arrivé trop tard, scellant son destin à jamais. Sa rencontre avec Gordon, concepteur de cette même armure, sa formation, son arrivée sur Terre et sa rencontre avec Alexis et Ilona, la seule descendante connue à ce moment là du Grand Orateur Petya, défenseur des colonies sur Terre, et qui se battait pour la paix avec toute la fougue de sa jeunesse.

La découverte du reste de l'équipe ensuite, qui n'en était pas encore une d'ailleurs, leurs premières missions à plusieurs, les soirées dans des planques sordides qui les avaient rapprochés et avaient fait d'eux des amis avant d'en faire une famille. Leurs liens avec Amely et les rebelles terriens, avec Fred et ses techniciens, avec Ilona. La fin de la première guerre enfin, avec la disparition de Trevor, leader du soulèvement terrien, et le démantèlement de l'armée terrestre. Quang Tan qui suit Amely et Yoan qui reste près de Charlélie. Leur joie d'avoir su apporter la paix, le combat d'Ilona pour la préserver.

Et le drame, la chute vers l'enfer, une chute qui semblait sans fin encore aujourd'hui. Moins d'un an après le début de cette période de calme qu'ils pensaient naïvement définitive, un attentat dans lequel Amely et Ilona trouvèrent la mort avec d'autres personnages politiques d'importance. Amely n'aurait même pas dû y être mais elle était devenue le médecin personnelle de la toute jeune Oratrice et celle-ci se sentait mal depuis quelques temps. On ne sut que beaucoup plus tard que cet attentat était l'œuvre de Trevor qui était bien vivant.

Après ça, tout c'était enchaîné si vite. Tous avait été rappelé sur le front par les profs. Seul Quang Tan était introuvable, la mort de sa fiancée l'avait ravagé. Ils eurent la surprise de voir dans leur rang un ancien ennemi en la personne de James Milor, bras droit de Trevor, alias Zach Petya, frère de la défunte Oratrice qui venait la venger et protéger cet idéal qui lui avait coûté la vie.

Les combats reprirent avec plus de violence encore et leur surprise fut à son comble quant ils retrouvèrent Quang Tan, leur ami, leur frère, passé à l'ennemi qui l'avait apparemment convaincu que les colons et les rebelles étaient responsables de la mort de son amour.

Ils n'eurent d'autre choix que de l'affronter mais laissait en général Zach le faire, eux n'en avait pas vraiment le courage et espérèrent jusqu'à la fin qu'il change d'avis. La fin arriva oui, mais pas comme ils l'auraient souhaité. Dans un combat long et pénible Zach eut raison de Quang Tan, Evan restait persuadé qu'il s'était laissé vaincre exprès.

Après sa mort, les batailles parurent encore plus dures, les profs perdirent la vie lors d'un énième attentat de Trevor qui parvint à les trouver et fit sauter leur base spatiale. Leur principal pôle de repos détruit, les pilotes restant n'eurent guère le choix et se séparèrent, gardant le contact le plus possible, pour mener à bien plusieurs missions simultanées. Yoan perdit la vie en protégeant Charlélie, lequel se sacrifia à son tour pour faire disparaître une des bases principales de l'armée terrestre que Trevor avait restauré.

Evan n'eut plus de nouvelles d'Alexis pendant plusieurs jours et quand sa mission fut finie et réussie, il rejoignit le point de rendez-vous convenue avec le pilote 01 pour ne trouver que son cadavre et celui de Trevor.

La guerre était finie, pour de bon cette fois. Pourtant le prix à payer était incalculable. Les colonies et la Terre avaient été ravagées, il faudrait des années et des années pour reconstruire, les pertes humaines étaient si nombreuses … Et Evan restait seul, encore. Il décida de laisser Zach reconstruire la paix et Fred et ses gars nettoyer l'espace. Aux commandes du AC2, il pensait rejoindre sa famille en se jetant dans le soleil. Même ça, il n'avait pas réussi. Son armure avait été aspirée par un trou noir, lui qui avait toujours cru que ce n'était que des légendes … Et il s'était réveillé ici, dans un endroit qu'il avait pourtant vu exploser et au milieu de sa famille qu'il avait vu mourir petit à petit.

Sa voix, toujours aussi morne, s'éteignit doucement, laissant aux autres le soin de penser ce qu'ils voudraient, de faire ce qu'ils voudraient. Lui n'avait plus ni envie, ni force, ni courage … Comme un vide béant en lui qui ne cessait de grandir pour l'engloutir à l'image de ce qui l'avait mené ici. Comment résister à la disparition de la personne qui était toute sa vie ? Comment trouver la force de continuer à respirer ? Comme éteindre cette culpabilité d'être celui qui reste et qui l'étouffait dans un étau de rage et de désespoir ? À part en mourant également ...

Les profs le fixait comme un miraculé croisé avec avec un alien, apparemment ils avaient compris quelque chose qui les dépassait tous. Les autres pilotes et Amely avaient sur leur visage un panel d'émotions nettement plus variées. Amely était tout simplement en larmes, pleurant silencieusement et broyant la main de Quang Tan dans les siennes sans même s'en rendre compte. Quang Tan, lui, qui avait du mal à assimiler tout ce qui venait d'être dit, les mots comme : Amely, fiancée, morte, trahison ... résonnaient dans sa tête sans qu'il puisse s'empêcher de penser qu'Evan disait vrai, la façon dont il avait raconté tout ça, d'une traite, sans hésiter ou presque, avec une voix ferme, même si froide, laissait à penser qu'il avait transmis sa vision des événements et que pour lui, elle était réelle.

Sans qu'il ne le sache, son avis était partagé par Charlélie qui avait ressenti toute la sincérité et la douleur d'Evan à travers ses mots et ses non-dits. Il n'en était pas moins troublé, la proximité de Yoan n'arrangeait rien et son air impassible non plus. Le pilote 03 semblait hermétique à ce qu'il venait d'entendre mais était profondément bouleversé au fond de lui. Il voyait bien qu'Alexis l'était également, cela se remarquait pour qui savait déchiffrer ses expressions, et lui savait. Seulement, le japonais était plus que troublé, il était frustré, il était certain que ce Evan cachait des choses, il n'avait pas tout dit.

Le silence s'éternisa, Evan ne bougeait plus, il n'avait pas changé de position et gardait les yeux grands ouverts, regardant devant lui. Il ne bougea pas lorsque Gordon s'installa face à lui, sur une petite chaise.

_ Evan, laisse-moi te raconter notre version, lui dit-il prudemment, pour nous Evan Oliver est mort. Je l'ai trouvé caché avec AC2 et jusque là nos histoires sont très similaires, à part de petites différences. Seulement, il n'arriva jamais sur Terre. Le jour du lancement, AC2 a explosé en vol à cause d'un sabotage avec Evan à son bord...

Gordon attendit un moment avant de poursuivre, cherchant sans doute ses mots.

_ Les autres scientifiques et les autres pilotes ne l'ont jamais connu et j'ai toujours sa mort sur la conscience, lui avoua-t-il ensuite, je l'ai aimé comme un fils et te voir, le revoir à travers toi, c'est très dur pour moi, alors j'imagine à peine ce que tu dois ressentir à tous nous revoir, si pour toi nous sommes morts …

Evan se recroquevilla un peu plus en gémissant encore. Il ne voulait pas entendre ça, il voulait disparaître. C'était si dur. Pourquoi insistaient-ils comme ça ? Son mentor se leva finalement, comprenant que pour l'instant il ne pourrait rien faire de plus et Jean pris sa place.

_ Peux-tu me décrire ce trou noir ? Démarra-t-il sans tact aucun.

_ Hm. Grand et noir, cracha presque Evan avec une animosité évidente.

Jean serra les poings et une petite crispation de sa mâchoire montra qu'il était agacé mais il parvint à se contenir au grand étonnement de son élève.

_ J'aurai besoin de plus de précision, rétorqua Jean avait sarcasme. Sa taille par exemple ?

_ La moitié du Soleil je dirais, consentit à lui apprendre le châtain.

_ Bien. Comment a réagi AC2 à son approche ?

_ Je me dirigeais vers le Soleil en pilote automatique. J'avais fermé les yeux, je ne pensais plus à rien. Je ne me suis rendu compte du changement de trajectoire que quand je n'ai plus senti la brûlure de ma combinaison, se replongea-t-il dans ses souvenirs. J'ai ouvert les yeux et je l'ai vu, j'ai essayé de reprendre le contrôle mais le champs gravitationnel était trop fort. Je n'ai rien pu faire et après je me suis dit que mourir dans le soleil ou là-dedans, ça ne faisait pas de différence …

_ Pourquoi tenais-tu tant que ça à mourir ? Demanda Alexis de sa voix glaciale, interrompant l'interrogatoire de son prof.

Evan ne prit même pas la peine de le regarder.

_ Parce que ma vie était finie … Maintenant si ça ne vous fait rien, j'aimerai être seul.

_ Bien sûr, lui répondit Gordon en devançant son collègue, nous reviendrons tout à l'heure avec des réponses.

_ Si ça vous amuse, dit Evan en haussant les épaules.

.

.

_ Alors ? Qu'est-ce que vous savez qu'on ignore ? Interrogea Alexis en s'installant à nouveau dans la cantine avec les autres.

Ce fut au mentor de Quang Tan de parler.

_ Avant de m'occuper du projet Terre, j'étais spécialisé dans la physique quantique, leur apprit-il. J'ai longtemps étudié les atomes, les particules, les trous noirs, ce genre de choses. Mes collègues sont au courant parce que nous avons eu besoin de certains de mes travaux pour nos projets d'amélioration de vos armures. Nous en reparlerons plus tard, précisa-t-il en voyant Alexis et Yoan se redresser, la bouche entrouverte sur des questions. Pour l'instant, ce que vous devez savoir, c'est que j'ai longtemps étudié une vieille théorie qui était un peu à l'abandon, celle des univers parallèles auxquels les trous noirs permettraient d'accéder. Jusqu'à présent, il ne s'agissait que de légendes ou dans le meilleur des cas, d'hypothèses. Pourtant, avec ce que nous venons d'entendre je crois que cela tend à se confirmer.

_ Je ne suis pas certaine de bien suivre professeur.

Les garçons hochèrent la tête, montrant qu'ils partageaient les questions d'Amely.

_ Comment vous expliquer ça simplement, réfléchit-il un instant. Voyons voir, vu la description qu'Evan en a fait, je pense qu'il s'agit d'un trou noir primordial du fait de sa petite taille, aussi appelé trou noir quantique. Ils se seraient formés durant le Big Bang suite à l'effondrement de petites zones de densité trop importante, d'où l'effondrement. Ces trous noirs, tout comme les plus gros de type stellaire ou supermassif, émettent un rayonnement gamma qui peut être détecté par des capteurs de radiation et d'ailleurs, il faut prévenir les techniciens de suite, lança-t-il à ses collègues. Personne ne doit plus approcher l'armure sans une combinaison anti-radiation et Amely, je vous charge de traiter tout l'équipage de la base contre les radiations nucléaires.

_ Selon vous, en faisant des tests sur l'armure, on pourrait savoir si oui ou non, il est bel et bien passer à travers un trou noir ? Demanda Charlélie qui suivait les explications du prof avec passion.

_ Tout à fait 04. Il faudra aussi faire des tests à Evan même si je pense que l'alliage de son armure à dû le protéger.

_ Et pour cette histoire de monde parallèle, quel rapport ? Le rappela Alexis sur le sujet.

_ J'y viens. Sachez que beaucoup de chercheurs ou même d'écrivains ont longtemps opté pour la théorie que certains trous noirs devaient ouvrir sur des univers parallèles, semblables au nôtre dans les grandes lignes mais avec les différences qu'impose la notion de libre-arbitre. Pour faire court, je vous donnerai une version simplifiée de la théorie de Hugh Everett qui travaillait sur la mécanique quantique il y a plusieurs siècles : il pensait que ce monde, comme tous les autres univers, est né du résultat des probabilités. Prenons l'exemple du jeu de pile ou face : une pièce qu'on lance peut retomber sur pile ou sur face, mais on ne sait pas à l'avance de quel côté elle va tomber. Si c'est sur face, ça veut dire que la possibilité qu'elle tombe sur pile a échoué. Mais juste avant qu'on la lance, les deux probabilités ont la même chance. Si, dans un autre monde, la pièce tombe sur pile à ce moment-là, les deux mondes se séparent. J'utilise l'exemple de pile ou face pour que ce soit plus clair. En réalité, ces échecs de probabilités se produisent au niveau des particules élémentaires, précisa-t-il en espérant avoir été assez clair.

_ Alors ce Evan là ne serait pas le Evan que Gordon a connu et tout ce qu'il nous a dit, il l'a vraiment vécu, pour lui, nous étions très proches et nous sommes tous morts, réalisa Charlélie avec horreur.

_ C'est exactement ça 04, confirma le mentor de Quang Tan.

_ Seigneur … Ce n'est pas étonnant qu'il souffre tant.

_ Les sentiments n'ont pas leur place en temps de guerre, il aurait dû le savoir, rappela Jean d'un ton méprisant.

_ Vous n'êtes décidément pas humain ! Pas étonnant qu'Alexis ai tant de mal avec les relations humaines ! Cracha la pilote blond.

_ Charlélie ! Le réprimanda son mentor, s'attirant à son tour les foudres de son élève.

_ Quoi ?! J'ai tord peut-être ? Je suis désolé si vous ça ne vous touche pas ! S'écria-t-il, perdant peu à peu son sang froid. Moi, je ne ressens qu'une infime partie de ce qu'il éprouve et rien que ça me donne envie de mourir tellement c'est douloureux, la seule chose qui me fasse tenir est que ce n'est pas ma souffrance ! Je ne sais même pas comment il a trouvé le courage de tout vous dire !

_ Parce que je m'en fiche, je n'ai plus envie de vivre.


Et voilà mes lapins, on coupe ici pour cette partie, la suite très bientôt, comptez une petite semaine je pense.

J'espère que ça vous plaît et n'hésitez pas à me le dire si il y a des choses qui ne vous paraissent pas claires ou que vous voudriez éclaircir, je me ferai une joie de vous répondre vous le savez !

A bientôt