Il me sourit, et regarda le petit oiseau que je tenais dans les mains puis me déclara :
« Je vais dire à turbo D que tu l'as remplacé par un oiseau !
— Mais je ne l'ai pas remplacé ! rétorquai-je, j'ai juste trouvé de la compagnie. Et en plus c'est un tétras pas un wazo ! »
Il pouffa puis me sourit et se leva, je lui rendis son sourire et me levai à mon tour, et nous repartîmes encore vers l'inconnu. Nous nous arrêtions ici voire là, mais jamais plus d'un quart d'heure. J'avais toujours le petit tétras qui quand j'avais voulu le libérer s'en été pris violement à la manche de ma veste, j'avais donc décidé de le garder avec moi. Le chemin de ce jour fut moins long, avec ma né- mon jumeau nous n'arrêtions pas de se "vanner" comme ils disent aux Chaises ! Thomas était petit, et il détestait qu'on lui fasse remarquer, quand on (ou plutôt moi, j'étais le seul à pouvoir me le permettre) lui faisait une blague, ou juste une toute petite allusion il plongeait dans une colère noire, et se mettait à crier de curieuses chose telles que : "Oui, je ne suis pas petit d'abord, toi en plus t'as un gros cul !" ou même : " Comme si quand je rentrais chez moi je passais sous la porte...". Cette fois-ci ne dérogea pas à la règle :
« Raaaaaaaaah, mon p'tit blondinet d'amuuuuur...
— Je suis peut-être plus petit qu'un haricot ?
— Quelle question ! Bien sur ! je m'amusai de ses réactions, mais finis par arrêter car il me faisait vraiment la tête... Ah les jeunes de maintenant ! finis-je par dire dans un ton faussement outré.
— Oh c'est bon t'es plus JEUNE que moi ! »
La journée se passa ainsi, chacun essayant de trouver le point qui fait mal, Thomas vint à trouver mon point faible :
« Tiens, tes écrits ne seront jamais biens, ils ne sont que torchons avec des lettres insignifiantes ! s'exclama-t-il fier de lui.
— Tu sais quoi, mes torchons ils t'emmerdent ! »
J'étais vexé, plus que quand on m'attaquait sur autre chose... Mes écrits étaient -avec Thomas- mes seuls vrais raisons de vivre... Le jour sombrait derrière l'horizon, nous faisant comprendre qu'il était tant de dormir, ou du moins se reposer. Je m'assis par terre ne me préoccupant de rien et sortis mon cahier et mon stylo de mon sac. De toutes les manières, c'était l'heure de prendre dur repose, la nuit tombai. Et un arbre se présentait à nous comme un abri satisfaisant. Je me mis à écrire.
« Un cri déchira l'air sombre de ce funeste mois de décembre.
Une nouvelle étrange venait de tomber sur elle.
Jessica venait d'apprendre la mort de ses parents. Ils étaient morts. Ils ne reviendraient jamais. Plus jamais elle ne les verrait. Et elle ne l'admettait pas. Pour elle, c'était impossible. Elle pleura toutes larmes présentes en son corps. Sa sœur cadette la rejoignit. Pleurant elle aussi. A douze ans, Eléonore, n'était pas vraiment disposée à supporter une telle annonce. Et voilà donc les sœurs Domité sur le trottoir, sur un tapis blanc de neige, devant leur collège, au milieu d'une foule dense dont les yeux étaient rivées sur elles... Devant les deux filles, un homme, leur oncle. Il était impuissant devant elles. Il ne savait quoi faire. Il n'avait vraiment pas la fibre paternelle. Mais c'était le seul membre de la famille Domité qui restait aux filles.
Le noir. Du noir.
« Où sommes-nous chéri ?
— Je ne sais pas, mais il y a quelqu'un qui parle dehors, fit l'homme en désignant la porte du menton.
— Tu le connais ? interrogea, de plus en plus inquiète, la femme brune.
— LA, c'est une femme...
— Je t'aime Edouard.
— Moi aussi, Hélène, je t'aime. Si tu survis, dis aux filles que je les aime... »
Les deux époux pleuraient l'un contre l'autre, ligotés, accrochés à un câble et un crochet au plafond de sorte que même s'ils arrivaient à se mettre debout, ils n'iraient pas plus loin qu'un cercle d'un mètre de diamètre. La mécanique n'était pas visible, car il faisait sombre une lampe éclairait l'endroit où le couple était assis en un cercle de trois mètres environs. Ils cessèrent de pleurer en entendant les paroles de leur agresseur au loin, derrière la porte :
« Comment ça je me suis trompée de personnes ?! Putain, vraiment, Florian, tu es une pure daube, qu'est-ce que je fais d'eux moi ! C'est n'importe quoi ! Putain, je fais ce que je veux, t'es gentil, merci. Je ne sais pas moi. Quoi encore ! Tu... Mais... Non ! Ne t'as pas le droit ! D'accord tu me quittes, je vais te pourrir la vie. Tu vas crever en douceur mon pauvre ! Préviens ta merde de sœur qu'elle doit se cacher si elle veut survivre plus longtemps. Au revoir Mon ange. »
La voix pleine d'énervement, elle jura et les deux amants devinèrent ses pas qui se dirigeaient vers la porte. Cette dernière s'ouvrit sur une jeune femme, plutôt petite et trapue, mais, l'air angélique qu'affichait son visage n'aurait jamais laissé présager à une criminelle expérimentée dans l'art de la torture...
Car oui, cette jeune fille, rousse, tachée de rousseur, et à peine âgée de seize ans, était une des grandes criminelles pour laquelle la police, ou la gendarmerie, ce seraient damnées !
Avec ses yeux gris perçants elle regarda le couple qui avait des traces de larmes sur les joues.
« Oh, vous avez pleuré ? Je m'en excuse, j'ai fait une grossière erreur, vous n'étiez pas les personnes voulues. Si vous jurez de ne pas révéler mon identité, je vous laisse repartir sains et saufs. Mais seulement si vous jurez de ne rien dire. »
Les époux se regardèrent, puis d'un commun accord s'exclamèrent :
« Ouyonvoulejur.
— Doucement les enfants, déclara la jeune de sa voix doucereuse tout en caressant la joue des adultes avec ses ongles manucurés. Pas la peine d'être pressés. Je rigolais. Je ne vous laisserais partir d'ici vivants sous aucuns prétexte !
— Mais... commença l'homme d'une voix suppliante.
— Tatatata ! Il n'y a pas de « mais ». C'est comme ça. De toute façon, j'ai les nerfs, j'ai le besoin pressant de me détendre. »
Sur ses mots elle partit à l'autre bout de la pièce ouvrir un sac de sport. Dans le quel se trouvait tout un équipement de... Sport ?
Après avoir sorti, un lisseur, une toilette complète, deux pots de gel douche, du shampoing, déodorant et autres affaires, la rousse afficha un sourire carnassier, pareil à celui du félin tenant sa proie entre les pattes.
Image bien réaliste aux vues des courbes de la jeune.
« J'en ai marre qu'on n'me prenne pas au sérieux à cause que je suis jeune et petite et trapue et tout ce que vous voudrez !
— Mais... commença l'homme.
— Qu'est-ce que j'ai dit ? Pas de mais, sinon, j'vous fais avaler de l'acide ! »
Sur ses mots, la jeune s'en fut chercher un couteau, puis revint auprès du couple. Elle présenta l'arme aux adultes et en une déclaration théâtrale s'exclama :
« Madame, monsieur voilà le couteau numéro un ! Il est fin, élégant, simplissime, mais parfait pour un départ ! Rouillé, retrouvé dans mon jardin, il y a peu afin, de vous dégouter, et de vous faire profiter de toutes ses bactérie, je suis sûre qu'il vous plaira ! Voilà donc, votre première source de souffrance mes chers amis... »
Et elle sourit. Et brandit le couteau en l'air pour l'abaisser brutalement juste au nez de la femme de façon à lui laisser une fine trainée de rouille sur le visage.
« Un peu de tétanos pour la madame brune ? Madame est servie ! »
Elle jongla avec son couteau et une seringue dont l'origine était inconnue... Repartant vers son sac, elle chantonnait tout en sautillant joyeusement, d'un air sémillant. Gardant la seringue dans sa main gauche, elle la fit tourner dans sa main tel un stylo.
Elle plongea sa main libre dans le sac et en ressortit un objet qu'elle cacha de la vue des adultes. Revenant vers le couple, les mains dans le dos, elle chantait cette chanson débile qu'on entendait à la radio.
Sans que les amoureux ne s'en aperçoivent, la rousse se retrouva derrière eux. Et planta l'aiguille de la seringue dans le bras de l'homme. En souriant, elle expliqua :
« C'est un mélange, de l'acide dilué, qui va s'insinuer dans ses veines et le dévorer de l'intérieur... Il va souffrir le martyr, mais rester en vie. Et puis vous, vous avez du silicone liquide, qui va bloquer la circulation de votre bras, et vous faire mal, bien sûr. »
La seringue se vida dans le bras de la femme qui hurla de douleur. Et secoua les jambes frappant au passage son mari et la rouquine. Elle partit une nouvelle fois vers l'établi et actionna une manette, et le plancher s'ouvrit laissant apparaître une cuve vide ; la femme resta suspendue par la taille. l'homme descendit tout au fond de la fosse. La tueuse descendit à son tour, et allongea l'homme qui gémissait déjà de douleur en sentant le produit s'insinuer dans ses veines, pour ensuite l'attacher à l'aide de fixations qui étaient ancrées dans le sol.
« J'aime beaucoup cette entrepôt, c'est vrai, il y a tout ce que l'on peut espérer d'un endroit de torture... Que j'aime pouvoir entrer dans ces endroits en trompant la surveillance des caméras. D'ailleurs, celles-ci ont été sacrément coriaces, il y en a partout. Mais, j'ai réussi à les neutraliser, fit-elle d'un air triomphal. Là, madame, j'attache votre mari, pour lui faire subir l'un des pires supplices : la goutte d'eau, je n'ai jamais encore essayé. Le principe est que je vais lui mettre un dispositif qui lui fera couler une goutte d'eau sur le front toutes les trente secondes. Il va finir par avoir soif avec le produit que je lui ai injecté. Très soif, mais il ne va pas pouvoir boire, car l'eau ne passera pas par sa bouche. Il ne pourra pas bouger, il est sanglé de partout, voyez-le vous-même. Et vous, ma brave dame, dès que j'en aurais fini d'installer votre amour, vous irez à deux mètres de là, pour une bonne torture aussi. Mais, vous, ce n'est pas une torture qui vous fera devenir folle, vous mourrez au final. Votre mari finira sans doute sans se rappeler de quoi que ce soit, même de son nom. Ou alors, il restera muet sur tout cela. Mais tout deux, vous n'aurez aucun moyen de raconter cela à qui que ce soit. Madame mourra, et Monsieur deviendra tarré. Donc, là, je place le dispositif de goutte-à-goutte au dessus de sa tête. Et hop ! En appuyant sur un bouton, c'est parti, première goutte d'eau. Ah, et j'oubliai, si vous vous dîtes des niaiseries du genre « je t'aime, gnagnignagna... », j'étale vos entrailles devant les yeux de vos filles. Et puis, restez donc muets tout les deux. Je me contenterai de quelques gémissements de douleurs. Bien que ça manque de musique classique, c'est assez entrainant, vous ne trouvez pas ? Ah, j'oubliai, vous n'avez pas le droit de parler. Madame Domité, ah, c'est flippant, je connais toute votre vie. Vos deux filles risquent de ne pas aimer apprendre la nouvelle. Imaginer, au collège on va les prendre pour des malheureuses. Et le seul membre de la famille qui est susceptible de recueillir les deux machins, c'est leur oncle. Il n'a pas été soupçonné de tentative de viol quand il était plus jeune ? C'est bête. Votre aîné est vachement bien roulée en plus... Mais bon, c'est leur tonton... Je disais, Madame Domité, vous, le treuil va vous emmener là, où il y a la croix. Elle est belle, c'est moi qui l'ai faite. Voilà, je presse le petit bouton et paf, vous y êtes. Mais je vais changer votre ligotage, vous êtes attachée par la taille, et ça ne me plaît pas du tout. On va vous attaché par les poignets, suspendue comme ça, hum... Vous allez souffrir, ça va être sympa. Bon, deux minutes, ne bougez pas, sinon, c'est comme si vous parliez, vos filles seront traumatisées à vie. Je détache ces cordes, et vous les mets... Aux poignets, voilà, un joli nœud qu'on ne peut pas défaire. Je crois que quand on vous trouvera, je pense que ça mettra le temps, parce que cet endroit est peut-être trop évident. Vos filles ce soir vont s'inquiéter et appeler la police, ou un truc du genre. Regardez-moi plutôt que de pleurer comme une vierge ! Je vais aller chercher mon sac, au fond, il y a encore plein de choses intéressantes ! Alors, il y a le couteau à salade, qui coupe drôlement bien, le couteau rouillé que vous connaissez déjà, les seringues de sérum divers et variés. Ensuite nous avons les lames de rasoir, le grand classique des scarificateurs, la tige en pointe, qui s'enfonce dans la chair comme dans du beurre, et, le must : la scie circulaire ! Et le must du must, de l'acide, de l'acide pure », finit-elle en secouant une fiole entre ses doigts manucurés.
Elle sortit tout son matériel de son sac et l'étala sur le plan de travail. Elle souriait et continuait de chanter les chansons qui passaient à la radio. Attrapant un chiffon qui semblait être trempé, elle se mit à nettoyer ses instruments. Cette tâche accomplie, elle revint vers la femme qui, suspendue par les poignets, gémissait de douleur. Dans sa main se trouvais un ciseaux ; elle découpa les vêtements de la femme comme de simples morceaux de papiers, la femme resta ainsi vêtue d'une simple culote de dentelle. Puis dégaina un instrument sur lequel trois lames de rasoir étaient fixées à un centimètre d'intervalle. Elle fit courir les lames sur le corps halé de la plus vielle et se délecta des plaintes de douleur. »
Rubrique fait divers :
La police à retrouver de nouvelle victime du Renard, un homme et une femme ont été retrouvés dans un entrepôt récemment fermé pour manque d'hygiène. L'homme à été retrouvé fou après avoir subi la torture de la goutte d'eau, il ne se rappelait pas même son nom, et se prenait pour un oiseau. Il a mis fin à ses jours en se tirant une balle avec l'arme d'un des policiers. La femme quant à elle, était morte, le corps en sang et peuplé de plus d'une centaine de cicatrices, on lui avait fait boire de l'acide, et arraché l'œil gauche. Œil que l'on a retrouvé près d'un mot visiblement laissé par le ravisseur :
« Œil gauche, sinistra, le mal.
Thibault, ta sœur est la prochaine. »
La police enquête à partir des traces de chaussures et de l'ADN que l'on a retrouvé sur l'œil.
Le couple laisse derrière lui deux orphelines. Nos pensées vont à elles.
Je levai la tête et trouvai un être angélique endormi près de moi, le dos contre mes jambes, les traces de larmes striaient son visage salit depuis ces derniers jours. Je me penchai et déposai un baiser sur le coin des lèvres de Thomas avant de me coucher contre mon Adonis, résolu à accepter mes sentiments...
Le matin, je me réveillai, sous deux perles azur qui me scrutaient -depuis combien de temps déjà ?-, un sourire vint se dessiner sur cette face que je ne connaissais que trop bien :
« Hier soir, j'ai commencé à lire par dessus ton épaule, commença-t-il hésitant, tu écris souvent des choses comme celles-là ? » finit-il par articuler.
Et moi comme un vase (on dit bien une cruche...) je ne trouvai qu'à dire :
« J'aime pas qu'on lise par dessus mon épaule !
— Mais j'ai arrêté au début de la torture... Je veux juste savoir si... Enfin c'est par envie que tu écris, j'ai eu l'impression que tu... Comment dire, tu pleurais hier soir n'est-ce pas ? Tu ne veux pas écrire ou que se passe-t-il pour que tu écrives des horreurs pareilles ? Et ne me dis pas que tu as toujours écrit ça ! dit-il devinant ma réponse. Elles sont où tes histoires à l'eau de roses, que font s'émoustiller toutes les gamines qui trouvent tes écrits sur ton blog ? Dis-moi pourquoi t'es plus comme avant... Par pitié, dis-le-moi... »
Je fermai le yeux et pensai : « Je ne peux pas lui dire que je me taillade les bras en quête d'adrénaline, non ; je ne peux pas non plus lui dire que la nuit, je ne dors que grâce à des somnifères, excité par les médicaments que je prends en cachette dans l'armoire à pharmacie, non non non, pas lui dire ça, je ne vais tout de même pas lui dire qu'à 16 ans, je suis droguée au calmants, excitants et stabilisateurs d'humeur ! Vite un mensonge, que je euh un concours écriture ! Non ça n'est pas crédible, je le préviens toujours de mes concours... Je ne vais pas lui dire la vérité... Lui dire que je ne cesse de rêver à mourir dans des bains d'acide, ou dans les griffes d'une harpie, non c'est pas possible, il ne voudra plus m'approcher avec tout ça... »
Sans que je ne m'en rende compte, mes larmes s'étaient mises à couler sur mes joues meurtries par le froid. Je pettais les plombs. Tout était en train retomber sur moi. Le froid, le manque, la tristesse, la pression, la fatigue, la haine, la douleur... L'amour ainsi que le désir qui n'avaient jusqu'alors plus leur place dans ma vie, dans mon corps, ma tête, mon âme... Je lâchai un hurlement à m'en déchirer les poumons, ne tentant plus de rester censé, ou même calme, je me levai, courus à en perdre haleine, m'effondrai au sol, pleurai, pleurai, pleurais... Je criais, seul ou même quand Thomas m'avait rejoint, il n'aurait pas dû voir ça, jamais personne n'aurait dû me voir dans un tel état, cet état de folie pure, que je ne réservais qu'à ces écrits, reflétant ce que j'aurais voulu faire subir ou subir.
Et puis, je sombrai.
Je me réveillai sur une surface moelleuse, entrouvrant les yeux, je me rendis compte d'une pièce sombre. Une pression sur mon bras gauche me fit tourner la tête, Thomas endormi dos à moi, les cheveux me chatouillant l'intérieur du bras. Puis le noir...
Second réveil, toujours dans le même lit, mais la pièce était illuminée cette fois, d'un blanc immaculé, je l'identifiai comme une chambre d'hôpital. Thomas était assis sur une chaise près de mon lit, les yeux mi-clos -oh tiens ! Un compagnon zombie !- et à ma droite, une personne que j'ai rêvé de voir, certes pas dans de telles circonstance, mais à ma droite, Amélie... Miko, québécoise pure souche, et mon ange gardien... A cette pensée je souris, et essayai d'articuler :
« Miko, c'est comme les glaces, quand on y goute, on peut plus s'en passer...
— Et bien même à peine sortie du coma, tu gardes tes vannes pourrites ? me sourit Thomas.
— Pourries idiot ! Coma ? dis-je un sourcil arqué.
— Ca fait deux semaines que tu « dors », tes parents sont chez moi, ils sont partis se reposer, et nous on veille sur toi, fit Amélie avec un sourire triste.
— Ah ouais », ajoutai-je gazée avant de me rendormir et d'entendre Thomas chuchoter : « Ca fait du bien de revoir ses yeux. »
J'ai fait un rêve, j'étais dans SES bras, il me disait de tenir, que j'étais fort et qu'il serait bientôt au chalet qu'il apercevait, que je ne devais pas le lâcher, que je n'avais pas le droit et puis j'ai sombré dans le néant comme si la mort me prenait en otage...
Puis je me suis re-réveillée.
Mes parents étaient là, quand j'ai ouvert les yeux, je me suis fait la réflexion que si ça avait été des enfants on les aurait vu sauter de joie et danser la danse de la joie... Affichant un sourire sur mon visage, mais les adultes et leur fichue fierté... J'vous jure, les vieux de maintenant...
« Oh on a eu peur, tu peux pas savoir, c'était affreux, quand Amélie et Thomas nous ont appelés, on a eu peur, oh mon dieu ! Tu peux pas savoir, on a pris le premier avion en direction de Québec, et on a dû attendre après le train pendant une journée, on s'est faits du mouron, plus jamais tu nous fais une peur pareille ! Non mais tu te rends compte, on a dû laisser le chat tout seul, et il a rien à manger, alors on a dû trouver le numéro de Prescilla pour qu'elle le nourrisse, et puis elle n'avait pas les clefs alors on a dû appeler le gardien et puis, c'était affolant, tout le monde s'inquiétait, et puis tout le monde voulait nous aider et tout... Oh mon dieu tu nous as manqué ! »
Voilà ce que j'ai compris dans les braillements de mes parents, j'ai dit fierté ? Je retire... Deux vrais gamins, et c'est quoi cette histoire avec le chat ?
« Turbo D il est vivant ? demandai-je pour mettre court à leur charabia.
— Euh oui... » me fit ma mère sans doute surprise que je demande comment va le chat, plutôt que mes amis.
Et nous voilà à parler joyeusement, avec mes parents, Thomas et Amélie étant partis dormir eux aussi.
Au bout de cinq jours, j'ai pu sortir de l'hôpital, et j'ai séjourné en touriste chez Amélie, avec Thomas, mes parents nous laissant pour repartir à leur travail, en France. Thomas, lui, avait prévenu le foyer des orphelins pour ne pas que les éducateurs s'inquiètent ; ils avaient seulement réagi par "Ah, ouais, merci d'avoir prévenu" et puis plus rien... Je plaignais Thomas d'être là-dedans, vraiment.
En tant que touriste maintenant, on a essayé de profiter du paysage, Miko nous conduisant où nous le voulions, on a d'abord fait du shopping, (très important !) au grand damne de mon jumeau, mais il fallait bien qu'on ait de quoi s'habiller pour la semaine qu'il nous restait à être ici. Je sentais un peu (beaucoup) le caribou mort...
Après cette aparté obligatoire, nous avons visité toutes les cathédrales, églises, châteaux et musées québécois à porter de pieds, c'est à dire pas très loin, j'étais encore fatigué. Le style est vraiment différent, ça change de la France ! J'ai pris l'accent québécois en trois jours... Au grand désespoir de Thomas qui ne comprenait rien quand nous parlions vite avec Amélie. C'était marrant à voir, sa mine concentrée comme en train d'essayer de résoudre la quadrature du cercle... Ca payait réellement ! Les yeux plissés, la bouche pincée... C'était tordant, avec Amélie on utilisait un mot de patois pour le qualifier d'idiot et on se mit à rire.
« Je suis sur que vous riez de moi ! Ce n'est pas sympa, je comprends quet'chi à ce que vous racontez !
— Euh... Tu n'es pas en France biquet ! Tu parles normalement et puis on te comprendra ! T'inquiète pas, y a pas de trous ! Tu finiras par comprendre ! Allez, come with me !
— Ah non ! nous exclamâmes-nous en cœur avec Thomas, pas de l'anglais ! »
Après quelques minutes de marche, nous revînmes chez Amélie. Je ne croyais toujours pas que mes parents m'avaient laissé rester ici. Ca me faisait drôle.
J'avais encore très sommeil. Donc, soupe -mon nouveau repas- et dodo !