Ca y est ! Radical est de nouveau en cours de publication !

Je vous remercie vraiment pour toute votre patiente, et votre soutien. J'espère de tout coeur que vous aimerez la version réécrite, n'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez. D'ailleurs, si vous parvenez à remarquer les différences... 8D

Sans plus attendre, je vous laisse profiter du tout nouveau chapitre 1 !

CHAPITRE 1 : Donc c'est vous

Le pays entier en avait tremblé d'effroi. Toutes les couvertures de journaux l'avaient hurlé, toutes les chaînes l'avaient montré. Toutes les bouches l'avait murmuré pendant des semaines.

Jolt Curtis, la célébrité, attaqué chez lui durant une fête. Neuf blessés graves, les lieux défigurés.

De là, sous couvert d'actualité, avaient escaladé toutes les rumeurs possibles. Combien de coups de feu, combien de litres de sang ? Y avait-il eu des morts ? Tout le monde avait été fasciné par le macabre choquant, tout le monde avait voulu savoir. Curtis avait-il été blessé ? À quel point ? Allait-il mourrir ? La foule s'était prétendue inquiète afin de nourrir son appétit pour la chair de son idole. Tant de questions, sur tant de lèvres. Et pourvu qu'elles soient morbides, le peuple voulait des têtes coupées.

Force Russel aussi avait posé des questions. Il avait voulu connaître les faits. Le nombre exact d'assaillants. Par où étaient-ils arrivés ? Pourquoi n'avaient-ils pas été détectés ? Quels armes avaient été utilisées ?

Il ne s'intéressait pas à l'émoi people que tout ça avait suscité. Il n'était pas là pour ça.

Non, Force Russel était un agent de Pollux Security. Son métier, c'était d'empêcher les attaques comme celles-ci. Protéger le client, quoiqu'il en coûte.

Quoiqu'il en coûte. Encouragé par la hiérarchie, les agents comme Force avaient tendance à faire usage d'un droit de légitime défense quelque peu... abusif. Oh, il y avait eu des procès, mais jamais rien de concluant, car bien souvent il n'y avait rien de plus que des preuves circonstancielles. Et puis quelle importance, pas vrai, quand on pouvait garantir à quelqu'un de riche et puissant non seulement sa protection, mais la mort de ses ennemis ?

C'était pour cette exact raison que Curtis, avant même la fin de l'enquête fédérale, avait contacté Pollux Security et signé avec eux. Voilà pourquoi Force et son équipe étaient là, voilà pourquoi il se posait ces questions.

Il avait fallu attendre le rapport d'enquête officiel, et bien sûr la police fédérale ne s'était pas pressée, ni vraiment foulée. Faute de résultat, l'attaque avait été imputée à un groupe violent qui éludait les autorités depuis plusieurs décennies maintenant. Il surgissait de nulle part, armé d'un équipement de qualité militaire, et s'en prenait exactement de cette façon aux minorités. Curtis n'était pas caucasien, ça et d'autres détails de son dossier laissaient supposer qu'il collait au profil cible.

Mais neuf blessés, bien que graves, ça semblait peu pour Force.

La maison de Curtis, isolée dans une pente rocheuse à faible végétation, n'était à priori pas très compliquée à sécuriser. Pourtant, les assaillants avaient sans aucun mal escaladé le grand balcon-terrasse supportant la piscine, brisé la baie vitrée donnant sur toute la longueur du salon, et tiré dans le tas sur une foule de facilement 90 personnes en train de danser, probablement bien alcoolisées. Et là dedans, neufs blessés graves ? Seulement ? Certaines choses ne s'alignaient pas.

Le groupe terroriste qu'on pensait responsable était composé de personnes dites Sui Generis. Une nouvelle génération humaine, capable de prouesses extraordinaires. On ne parlait pas simplement de génies ou d'athlètes. Les Sui Generis étaient dotés de pouvoirs. Certains pouvaient lire vos pensées, d'autres vous soulever avec leur esprit.

Surnommé Radical par les médias et leur manque d'inspiration, cette milice violente se croyait d'une race supérieure. Elle laissait dans son sillage des victimes medio, sans pouvoir, aussi bien que Sui Generis considérés trop faibles moralement ou génétiquement.

Radical était devenue l'agression que Pollux Security se vantait le plus de parer, et à raison. Ce n'était pas la première fois que Force observait les dégâts causés par ce groupe. Les messages suprématistes peints sur les murs, les explosions, les montagnes de corps, c'était pratiquement leur carte de visite. Mais ici, neufs blessés graves ?

Personne ne voulait trop attirer l'attention sur ce genre de choses, aussi Curtis avait dû faire son maximum pour amoindrir le faits, au moins publiquement. Seulement repeindre par dessus un MORT AUX GÊNES FAIBLES, n'était pas ramener miraculeusement des victimes à la vie. Les témoignages disaient uniquement que des figures noires avaient ouvert de feu sur la foule, brisé le verre de la baie vitrée, et qu'à partir de là, tout n'avait plus été qu'un chaos de cris et débâcle. Est-ce que quelqu'un avait soigné les victimes ? Ou est-ce que Radical n'en avait simplement pas faites ?

Force avait déjà observé ça. Parfois, très rarement, Radical se contentait de quelques égratignures en plus des graffitis. Et même si par égratignure on parlait de blessures sérieuses, tuer quelqu'un avec une mitraillette était plus facile que de ne tuer personne. Comme s'il y avait un autre motif.

Force lui aussi était Sui Generis. Si bien que ses supérieurs attendaient plus ou moins de lui qu'il comprenne ce qui se passait – comme si toutes les personnes Sui Gen étaient les mêmes. Mais il n'était pas là pour lever le voile sur ce qui motivait réellement le groupe raciste, ou analyser les anomalies. La sécurité du client passait avant tout. Comme disait le slogan de Pollux : Nos agents sont votre bouclier.

Aujourd'hui était le jour de début de mission. Il se trouvait au milieu du salon, celui-là même dans lequel l'attaque avait eu lieu.

Jolt Curtis, le client, entrait dans celui-ci vêtu seulement d'un peignoir, par la véranda intégralement restaurée. Arrivé au niveau de Force, Curtis baissa ses lunettes de soleil, juste assez pour voir par dessus :

— Donc c'est vous, mon nouveau chef de sécurité, lança-t-il mi-rieur.

Force eut un léger sourire professionnel :

— Oui, Monsieur.

Quiconque avait les moyens d'engager Pollux Security était forcément fortuné. Curtis n'était pas le premier client riche et influent de Force.

Peut-être le premier à être aussi notoire. On pouvait apprendre la moitié de sa vie juste en le cherchant sur internet. Grosso modo, fallait-il dire, elle semblait se résumer à un maximum de débauche dans les milieux glamour dont l'accès n'était rendu possible que par l'argent. Cette moitié de vie qu'on pouvait lire en ligne, c'était principalement la chronique people, défrayée par les frasques du jeune et séduisant Jolt Curtis, et des autres célébrités qu'il entraînait avec lui.

Il possédait également une marque de préservatifs et sextoys, populaire de par la nature de sa notoriété. La foule se délectait de prétendre le choc à chaque scandal que Curtis provoquait, et lui semblait n'exister que pour cette fascination outrée qu'il semait derrière lui.

On grattait l'attention où on pouvait. Le chef de sécurité lui tendit la main.

— Force Russel.

Curtis la serra élégamment. Il était de taille moyenne pour un homme, donc plus grand que Force. Légèrement typé natif américain, il arborait un splendide teint hâlé et un sourire insolant comme les apparats d'un attrait que les yeux ne pouvaient pas nier. Il devait en jouer. Le regard suavement caché derrière ses lunettes de soleil, les cheveux un peu plus assombris par l'eau de sa piscine, il laissait les goutes tomber sur ses épaules et rouler, entre les cols de son peignoir, pour mourir sur son torse humide. Peut-être qu'il ne le faisait même plus exprès. Peut-être qu'il tentait de séduire les chairs faibles simplement par nature.

— Jolt Curtis. Mais vous le savez déjà.

Sourire ravageur.

Peut-être qu'il le faisait exprès.

— Je m'en remets à vous, Russel.

Toujours ce sourire à la bouche, Curtis s'en retourna vers la baie vitrée. En la franchissant, il laissa tomber son peignoir de ses épaules et plongea nu dans la piscine, sur le balcon terrasse.

Qui faisait construire une piscine sur une terrasse suspendue, soutenue à une dizaine de mètres au dessus du sol par quelques piliers de béton ? Il y avait, là où l'argent coulait à flot, une sorte de course tacite à l'impossiblement déraisonnable que Force ne cherchait plus à comprendre.

Puisqu'aujourd'hui était le premier jour, le client rencontrait ses deux équipes en même temps. Tous les agents qu'il aurait à son service pour la durée de son contrat étaient présents. Force serait l'interlocuteur principal, en tant que chef d'opération du jour. Lui et ses agents seraient présent de 9h30 à 22h chaque jour. La nuit était assurée par une équipe jumelle à la sienne, celle de sa collègue Satine Georges, chef d'opération de nuit, qui serait présente de 21h30 à 10h. Le battement de 30 minutes en début et fin de chaque roulement servait au rapport qu'ils se faisaient sur l'activité du jour et de la nuit, afin d'assurer une meilleure passation. Quant aux horaires, c'était le client lui-même qui les avait déterminé. Chaque équipe devait être en sa présence constante 12h30 sur 24.

Alors que ses agents terminait de synchroniser les caméras et détecteurs de mouvements, Force observait l'eau de la piscine. Les vaguelettes étaient comme parsemées de milliers d'éclats de lumière, caressées par le soleil rasant de la fin d'après-midi. Chaque fois que Curtis ou sa compagne de la journée s'éclaboussaient, on aurait juré qu'ils se lançaient des poignées de diamants.

— 180Ŧ qu'il est imbuvable, lança une voix agréablement familière.

Force tourna ses grands yeux noirs. Satine venait de s'adosser au mut à côté de lui. Ils faisaient une drôle de paire, tous les deux. Force était petit mais Satine aussi, alors ils avaient un rapport de taille ordinaire. Elle portait la même tenue que les agents, un uniforme noir et près du corps composé d'un polo, le genre par dessus lequel il était facile d'enfiler un gilet pare-balles, un pantalon épais mais permettant les mouvements amples, de grosses chaussure à semelles crantées qui remontaient pour englober les chevilles et mi-mollet, et enfin, une ceinture supportant quelques étuis. Une matraque électrique était fournie avec l'uniforme, mais Satine n'était pas la seule à avoir la permission d'y porter une arme à feu.

Force eut un léger sourire avant de, comme elle, reporter son regard sur le client qui s'amusait.

— Il est riche et célèbre. Bien sûr qu'il est imbuvable.

Lui, au contraire, portait un costume trois pièces bleu marine. Il était supposé apparaître présentable, car c'était lui qui serait le plus aux côtés du client en public. Il assumait ce rôle depuis des années maintenant. Le costume était sa deuxième peau. Et le gilet-étuis dont la veste cachait un calibre 9 millimètres également.

— C'est pour ça que je prends toujours les nuits, continua Satine. Au moins ils ont mieux à foutre que me chercher des poux.

Elle sourit à Force. Ça faisait quelques années aussi qu'ils travaillaient en tandem. Ils formaient une bonne équipe tous les deux. Ils étaient efficaces, et avaient les mêmes priorités.

Ils avaient beaucoup de points communs, pour deux personnes aussi différentes. Satine avaient de longs cheveux qu'elle teignait en rouge, en guise d'hommage pour un amour d'enfance, l'un des personnages sulfureux de Qui veut la Peau de Roger Rabbit. Par soucis d'efficacité, elle les attachait en queue de cheval, et rabattait les deux mèches trop courtes pour y être incluses derrière ses oreilles quand il lui fallait dégager son champ de vision. Elle avait des yeux rieurs, brun sombre, et un petit quelque chose au fond du regard qui trahissait l'habitue d'avoir raison. D'une manière générale, tant par son expression que son attitude, sa façon de bouger, elle était décontractée, engageante.

Force ne paraissait pas décontracté, et certainement pas engageant. Outre son costume qui entamait déjà un air strict, il se tenait toujours parfaitement droit, l'expression invariable, ses yeux noirs scrutant sans qu'on puisse faire de distinction entre iris et prunelle, parfois sans même que la lumière ne s'y reflète. Il avait le teint pâle, gris, et les cheveux tout aussi noirs, courts dans sa nuque. Toute sa personne reflétait sa façon de penser : le superflus n'était pas pertinent. Il excellait à son travail, ça se voyait. Tout en lui le criait. Dès qu'il prenait son shift, il revêtait en même temps que son costume une efficacité dans sa forme la plus fonctionnelle, la plus direct. Plus qu'excellent, vraiment, il était son travail. Il n'y avait pas tellement de place pour une vie personnelle quand on passait 12h30 par jour dans celle de quelqu'un d'autre.

— Tu lui a parlé ? demanda-t-il.

Satine haussa les épaules.

— Rapidement, je me suis présentée, mais je crois pas qu'il ai retenu mon nom.

Force lança un bref regard interrogateur à Satine.

— Il a surtout observé mon uniforme, expliqua-t-elle. Ou m'a reluquée, au choix.

L'agent de jour laissa échapper un bref soupir jaune entre ses dents.

— Boss ? lança Garcia, l'une des agentes, depuis l'autre bout de la pièce. Tout est connecté, on est bons.

Force lui adressa un signe de tête.

— Bon, soupira Satine. Bah à demain ?

Le contrat commençait officiellement à 22h ce soir, mais les installations et vérifications du premier jour devaient toujours se faire en avance, et pouvait prendre la journée. Pas aujourd'hui, manifestement, il n'était que 18h30. L'équipe de jour avait quelques heures de libre.

— Bon courage.
— Oh, ça devrait aller, s'amusa Satine en désignant le client du menton. Il est en bonne compagnie.
— Hum...

Force s'approcha justement de la baie vitrée, et Curtis le remarqua immédiatement. Le chef de sécurité l'aurait pensé trop pris par ses batifolages pour ça.

— Les préparatifs sont faits, informa-t-il. Mon équipe et moi allons nous retirer, celle de Mademoiselle Georges restera avec vous jusqu'à demain matin.
— Okay. Je dormirai sûrement quand vous arriverez, vous avez les accès ?
— Tout à fait.

Soudain pensif, Curtis hocha la tête pour lui-même.

— Vous...

Il détailla Force un instant, et sa compagne en fit de même, venant se poser à ses épaules comme un oiseau léger.

— On se connaît ? Vous avez déjà travaillé pour moi ?

Le sourire qui s'afficha aux lèvres de Force fut machinalement commercial, et la réponse, toute trouvée :

— Non, Monsieur. Mais vous serez satisfait de mes services. Excellente soirée.

Jolt Curtis resta songeur, pourtant. Quand le chef de sécurité s'éloigna, il le suivit des yeux.

— Ils se ressemblent tous un peu, dit alors sa compagne, elle aussi en pensive observation de l'agent qui disparut. Tu confonds peut-être.

Curtis secoua la tête.

— Non. Son visage... Je crois que je l'ai vu en cauchemars.

Et voilà ! Ça vous plait, pour un début ?
Je posterai le chapitre suivant ce vendredi !